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Luxembourg : faut-il revoir l’évaluation des maladies professionnelles ?


Le nombre de maladies professionnelles reconnues baisse au Grand-Duché. Mais ces chiffres masquent mal la réalité de la souffrance au travail (Photo d'illustration : AFP).

Le recul progressif des maladies professionnelles reconnues ne doit pas cacher le sort parfois dramatique que vivent des centaines de travailleurs. Entre 2011 et 2018, au Luxembourg, pas moins de 25 cancers ont été détectés.

Le député et ancien ministre de la Santé Mars Di Bartolomeo (LSAP) s’étonne dans une question parlementaire que «dans son rapport annuel, l’Association d’assurance accident se montre assez discrète sur les statistiques concernant des maladies professionnelles déclarées et reconnues». Il s’est donc adressé à son collègue socialiste Romain Schneider, le ministre de la Sécurité sociale, qui vient de livrer un état des lieux plus détaillé sur un domaine de la santé publique qui préoccupe le camp syndical.
«Le problème majeur est que les maladies professionnelles devraient être régulièrement mises à jour. La médecine du travail devrait aussi être modernisée. Or ces deux revendications restent sans réponse», déplore Christophe Knebeler, qui siège pour le compte du LCGB au conseil d’administration de l’Association d’assurance accident (AAA). La dernière actualisation du tableau des maladies professionnelles date de 2016, comme le précise le ministre Romain Schneider dans sa réponse à la question parlementaire.

Il reste à savoir quel serait l’impact d’une intégration de nouvelles maladies dans le tableau défini par règlement grand-ducal. Depuis 2014, le nombre de cas reconnus est en baisse constante (voir graphique ci-dessous). Ces chiffres bruts ne témoignent cependant en rien du sort que connaissent des centaines de travailleurs victimes d’importantes lésions, blessures et maladies chroniques causées par leur activité professionnelle.

chiffre travail
Un chiffre interpelle : depuis 2011, l’AAA a détecté 25 cas de cancer du poumon ou du larynx dus à une «asbestose», soit une exposition sur le lieu du travail à une forte dose de fibres d’amiante. L’interaction avec de la poussière d’amiante ou l’exposition à des hydrocarbures sont d’autres facteurs ayant provoqué des cancers. S’y ajoutent de possibles cancers dans 13 autres cas, où la pathologie n’est pas précisée (cancer ou néoformations au niveau des voies urinaires ou de la peau).

Un tableau reprenant 80 maladies reconnues

L’actuel tableau de l’AAA reprend cinq catégories d’agents nocifs qui peuvent causer jusqu’à 80 types de maladies professionnelles. Le tableau fait référence à des pathologies provoquées par des agents chimiques et physiques, à des agents infectieux, parasitaires ou tropicaux, des maladies provoquées par des poussières minérales et enfin des pathologies liées à des affections cutanées.
La définition de base d’une maladie professionnelle est la suivante : il s’agit d’«une maladie qui a sa cause déterminante dans une activité professionnelle assurée». Comme le précise l’AAA sur son site internet, « il incombe au médecin de faire la déclaration à l’AAA dès qu’il a des suspicions fondées qu’une maladie a sa cause déterminante dans une activité professionnelle assurée». Entre 2011 et 2018, 3 711 déclarations de médecins ont été introduites auprès de l’AAA. En fin de compte, 1 332 maladies professionnelles ont été reconnues, soit 166,5 cas par an.

Les branches où les travailleurs sont le plus exposés à être victimes d’une maladie professionnelle sont le bâtiment (473 cas), l’industrie (268), le travail de métaux, de bois et de matières synthétiques (136) et la production alimentaire (115). Dans une nette moindre mesure, les fonctionnaires et employés de l’État et des communes subissent des maladies professionnelles (16 cas).
Les maladies professionnelles les plus reconnues sont la paralysie des nerfs «dues à des pressions locales prolongées» (353 cas), des blessures musculaires (290), des affections provoquées par des vibrations de certains outils (148) ou encore des lésions au niveau du ménisque (96) et des lésions au dos (68).

David Marques