Le projet Covid-Kids de l’Unicef renseigne sur le bien-être subjectif et les expériences des enfants de 6 à 16 ans pendant le premier confinement. Un impact énorme.
S’il persistait encore un doute sur les effets négatifs de la pandémie sur les enfants, l’étude Covid-Kids menée par l’université du Luxembourg et soutenue par l’Unicef vient malheureusement le dissiper. Beaucoup d’enfants n’étaient pas heureux pendant le confinement. Cette observation est douloureuse.
«On parle beaucoup des personnes âgées pendant cette pandémie, mais il faut garder à l’esprit que c’est également une crise pour les enfants qui sont concernés par ses répercussions directes sur leur bien-être et l’impact est énorme», soutient Paul Heber, responsable de la communication à l’Unicef-Luxembourg.
Pour prendre la température auprès des plus jeunes, des chercheurs de l’université du Luxembourg ont interrogé de mai à juillet 2020 à travers tout le pays près de 700 enfants âgés de 6 à 16 ans. Pour autant, «cette étude n’est pas représentative», prévient Pascale Engel de Abreu, professeure à l’université du Luxembourg. Le statut professionnel des parents, catégorisé en trois groupes, indiquait 7 % avec un niveau bas, 16 % avec un niveau moyen et 77 % avec un niveau élevé. Cela étant précisé, cette enquête en ligne à grande échelle, doublée d’entretiens de groupe, révèle que le bien-être de l’enfant et de l’adolescent a été affecté par la pandémie, que leur satisfaction dans la vie a baissé de 30 points de pourcentage, passant de 96 % avant la pandémie à 67 % pendant le confinement. «C’est dramatique», commente Paul Heber.
Leur satisfaction à l’égard de l’école a diminué aussi : de 91 % avant la pandémie à 76 % pendant la pandémie pour l’enseignement fondamental et de 84 % avant la pandémie à 62 % pendant la pandémie pour le secondaire.
Une vingtaine de facteurs sont susceptibles d’avoir une influence sur le bien-être de l’enfant pendant la pandémie, dont quatre en particulier, à commencer par le degré de difficulté et la quantité du travail scolaire pendant la période d’enseignement à distance, comme l’explique Claudine Kirsch, professeure à l’université du Luxembourg. Le sujet a d’ailleurs fait l’objet de nombreuses discussions entre parents qui se plaignaient eux aussi de la charge de travail de leur enfant. L’étude montre que 28 % des enfants de l’école fondamentale et 45 % des enfants du secondaire ont estimé la quantité de travail souvent «trop importante».
Autre facteur qui influence le bien-être : le contenu du travail scolaire pendant la période d’enseignement à distance jugé pas toujours intéressant, voire très ennuyeux ou encore trop difficile. À la question de savoir s’ils s’en sortaient bien avec le travail scolaire, 63 % des élèves du primaire et 44 % des élèves du secondaire ont déclaré «bien s’en sortir». Par ailleurs, 18 % des élèves du primaire et 26 % du secondaire ont déclaré qu’ils trouvaient souvent, voire très souvent, leur travail scolaire incompréhensible.
Peur de tomber malade
Presque tous les élèves ont expliqué qu’ils se débrouillaient bien avec les nouvelles technologies. Les problèmes rencontrés portaient sur des problèmes de communication entre eux et les enseignants ou sur des problèmes d’organisation dus au nombre d’applications différentes utilisées. De plus, certains ont exprimé une certaine frustration par rapport au temps que cela prenait pour obtenir des réponses des enseignants. Leur sentiment général était qu’ils s’en sortaient avec l’école à domicile, mais que cela était difficile. Certains n’ont bénéficié que de peu d’aide de la part des enseignants et des parents et d’autres ont eu du mal à organiser leur travail. En revanche, quelques élèves du secondaire ont semblé apprécier leur flexibilité nouvellement acquise et leur capacité à organiser leur travail, comme le résume le rapport.
La peur de tomber malade est un autre facteur influent. Plus d’un tiers des enfants ont exprimé avoir des craintes quant à la possibilité de tomber malade pendant la pandémie. Quand il a été demandé aux enfants si eux-mêmes ou un membre de leur foyer avaient été atteints par le Covid-19, 14 % ont répondu positivement. La peur de tomber malade et de contaminer les autres était aussi un sujet qui revenait souvent dans les entretiens.
Enfin, un facteur influent de première importance est la façon dont les adultes écoutent les enfants. «Les enfants qui se sentent écoutés par des adultes se sentent mieux», certifie Pascale Engel de Abreu.
Et c’est certainement le message le plus important des chercheurs de l’université : Il faut laisser les enfants s’exprimer et les écouter.
Geneviève Montaigu