L’enquête sur le crash de l’Airbus A320, dans les Alpes françaises, a établi que le copilote a eu « la volonté de détruire l’avion« . Du côté des pilotes travaillant au Luxembourg, et à Luxair en particulier, tandis que la compagnie assure faire le maximum sur la sélection des pilotes, le syndicat aviation civile est plus nuancé.
« Cet accident, son envergure, cela a surpris tout le monde. Mais on est choqué surtout », témoigne Hubert Hollerich, le secrétaire central du syndicat aviation civile de l’OGBL. « Je reviens justement (NDLR : jeudi) d’une réunion de la Fédération européenne des travailleurs des transports. Les représentants syndicaux de toute la région étaient présents, et le sujet a été discuté, bien sûr. Ils étaient consternés, et le syndicat a exprimé ses condoléances à toutes les victimes. »
Est-ce que les pilotes luxembourgeois font l’objet de formations ou de suivis liés à des troubles psychologiques extrêmes, comme les tendances suicidaires ? « Je crois que c’est un phénomène qui n’est pas très répandu, ni étudié, explique Hubert Hollerich. Selon les discussions qu’on a eues au niveau européen, il n’y a pas de suivi des pilotes par rapport à ce genre de risque. Car en principe, un pilote avant d’être embauché, doit passer un test psychologique, qui doit d’ailleurs être renouvelé périodiquement. Et, en dehors de cela, il n’y a pas vraiment d’autres suivis sur cette question. »
Chez Luxair, on assure que la sélection des pilotes est drastique : « Nous sommes au dessus de la législation européenne, que ce soit au niveau des compétences techniques, mais également au niveau de la résistance au stress et la stabilité émotionnelle », explique Daniel Colling, directeur des opérations chez Luxair. Les pilotes candidats passent une sélection d’environ six mois en trois étapes : un solide entretien, un séjour au centre DLR en Allemagne qui prépare les astronautes et les pilotes où des tests de motricité et psychologiques sont effectués.
Une évaluation tous les six mois
Un « simular check » est ensuite fait en présence d’un psychologue. Puis des jeux de rôle sont organisés à Luxembourg sous l’observation de psychologues. Au final, seuls 10 à 20% des candidats, pourtant déjà en possession de leur licence de pilote, sont retenus après cette batterie de tests.
Et une fois qu’ils sont employés chez Luxair ? « Tous les six mois les pilotes évaluent leurs compétences dans un simulateur, tout ce qui est également non-technique et l’on mesure également leur intégration dans l’équipe. Une visite médicale est également prévue tous les ans », poursuit Daniel Colling.
Des cas de pilotes perdant leur licence ont été recensés, un pilote a notamment été licencié car il avait de gros problèmes financiers et avait menti plusieurs fois à son employeur. Il a été jugé instable par ses supérieurs.
Mais pour le reste, « la compagnie est petite, tout le monde se connaît. Les pilotes ont tout de même la possibilité d’envoyer un rapport confidentiel en cas de doute sur un collègue. Tous les membres d’équipage ont également accès à un psychologue en interne en cas de besoin. Mais bien sûr, avec toutes les précautions du monde, il est impossible d’être dans la tête d’une personne… ».
La compagnie Luxair, comme beaucoup d’autres en Europe, planche actuellement pour mettre en place des règles afin qu’il y ait toujours deux personnes présentes dans le cockpit. « Nous n’avions jamais pensé que cela serait nécessaire, maintenant cela va le devenir », conclue le directeur des opérations.
Audrey Somnard et Romain Van Dyck