À l’approche de la fête du Travail, le syndicat majoritaire au Grand-Duché a réuni son comité national et s’est résolument tourné vers l’avenir en évoquant le spectre de la 4e révolution industrielle.
La ville de Differdange a vu un raz-de-marée syndicaliste l’envahir, jeudi soir, lorsque 800 militants de l’OGBL tous remontés à bloc ont investi le hall polyvalent La Chiers. Un vent de lutte sociale soufflait en effet sur la cité du bourgmestre Roberto Traversini, lorsque ce dernier est également venu honorer la section locale de l’OGBL. «Quel honneur pour un petit Italien comme moi d’être ici devant vous», a-t-il d’emblée déclaré.
La double référence à la célèbre ballade Zwei kleine Italiener et aux propres origines du député-maire de Differdange ne sont forcément pas passées inaperçues. Dans son allocution, Roberto Traversini a en effet largement rendu hommage aux immigrés italiens qui ont travaillé dur dans l’industrie minière, que ce soit à Differdange ou dans tout le bassin minier. Fortement marqué par la révolution industrielle, le sud du pays en garde encore les stigmates. «Le 1er mai me rappelle les différentes luttes sociales qu’ont connues mes parents qui ont émigré depuis l’Italie pour venir travailler au Luxembourg», a souligné le député-maire, avant que le président de l’OGBL n’entre en scène.
Ministres et députés acquis à la même cause
La transition coulait de source et André Roeltgen a enchaîné sur le spectre de cette fameuse 4e révolution industrielle qui s’annonce et qui fait tant craindre pour le salariat. «Les facteurs de production capitalistes trouvent leurs racines dans la première révolution industrielle et ont continué à se développer, de la vapeur à l’électricité et à la numérisation», s’est exclamé le président de l’OGBL. Une fois le décor planté, André Roeltgen est passé à l’attaque, en évoquant successivement l’arrivée de nouveaux processus de production massivement automatisés et le risque qui en découle pour le facteur humain au sein des entreprises. «Le travail humain sera profondément bouleversé, mais l’OGBL sera encore là pour défendre les intérêts des salariés !», a encore tenu à rassurer le président syndicaliste, devant une foule de militants tous acquis à sa cause.
En son sein, des militants de la première heure mêlés à des ministres (Étienne et Romain Schneider, Dan Kersch) ou encore à des députés (Claudia Dall’Agnol, David Wagner, Marc Baum, Roberto Traversini), ont tenu à apporter leur soutien et à manifester leur reconnaissance envers André Roeltgen.
Car même si l’ombre de la 4e révolution industrielle ne donne lieu, pour l’instant, qu’à des prédictions «hautement spéculatives», selon les termes du patron de l’OGBL, ce dernier mise sur la carte de la prévention : «Nous nous apprêtons à passer une grande étape», lance-t-il, en rappelant que l’organisation du travail humain pourrait être sujette à des conflits en s’en retrouvant fondamentalement chamboulée. «Le risque de fracture sociale, d’augmentation des inégalités sociales et de précarisation dans la société capitaliste est énorme», prévient-il encore.
La rationalisation à outrance des processus de travail inquiète notamment le président de l’OGBL et il le reconnaît ouvertement. Mais le syndicat se dit prêt à affronter la tempête de la 4e révolution industrielle : «La légitimation du mouvement syndical ne perdra pas de sa signification; au contraire, sa légitimité n’en sera que renforcée.» En fonction de cette conjoncture imminente, le mouvement syndical devra continuer son combat «au nom des futures générations de salariés».
Car l’OGBL est fin prêt à s’adapter aux métiers du futur qui s’inscrivent dans les secteurs économiques porteurs pour l’avenir. Dans cette optique, le syndicat s’est déjà mis en ordre de bataille : il se penchera sur ses statuts, le 2 juin, à l’occasion d’un congrès extraordinaire. «Mais cela ne suffira pas !», parce que l’OGBL devra également poursuivre sa mission d’uniformisation du mouvement syndical et conclure de nouvelles alliances, avec des organisations politiques aussi bien qu’apolitiques, afin d’assurer le progrès social, la démocratie et la paix.
Claude Damiani