Ils étaient les premiers à faire les frais de la crise sanitaire et aujourd’hui ils sont recherchés par toutes les agences. Le sort des travailleurs intérimaires inquiète surtout l’OGBL.
Au début de ce mois, Adecco, entreprise de travail intérimaire, lançait un jeu-concours pour inciter les travailleurs à s’inscrire chez lui alors que le marché de l’emploi affichait une hausse de 63 % des postes vacants par rapport à 2021. L’agence comptait remplir quelques centaines d’offres d’emploi par jour sur un marché luxembourgeois qui compte 10 200 postes vacants. «Jamais Adecco n’a dû chercher autant d’intérimaires», communiquait, il y a quelques semaines, Jan Dekeyser, directeur pays d’Adecco Belgique et Luxembourg.
L’agence se met à la recherche active de talents et, pour les attirer, leur propose de gagner trois séjours tout inclus en Grèce pendant une semaine et pour deux personnes. La condition? Travailler au moins un jour sous contrat avec cette agence entre le 19 janvier et le 31 mars.
Une initiative qui fait sourire l’OGBL. Les talents que recherche aujourd’hui cette agence, comme toutes les autres, ont peut-être été refroidis depuis le début de la pandémie. «Le travailleur intérimaire post-COVID : de l’enfant délaissé au V.I.P.», titre le syndicat, qui rappelle dans un communiqué le sort réservé aux intérimaires et pas seulement en temps de crise sanitaire.
Si le marché de l’emploi explose, les intérimaires qualifiés font défaut. «Organiser un jeu-concours qui fait sous-entendre que le travailleur intérimaire dans le monde du travail luxembourgeois serait accueilli comme un enfant roi frise l’ironie», écrit l’OGBL en pensant à ceux qui sont «le dernier maillon de la chaîne au Luxembourg et qui ont été parmi les premières victimes de la pandémie».
Lors du premier confinement en mars 2020, alors que les salariés bénéficient du chômage partiel et du maintien dans l’emploi, une masse de travailleurs intérimaires contacte le syndicat «parce que les agences intérimaires les ont convoqués et poussés à signer une résiliation d’un commun accord de leur mission de travail… sans contrepartie extraégale, bien sûr», rappelle l’OGBL.
L’ancien ministre du Travail Dan Kersch avait publié en août 2020 les chiffres qui indiquaient que 9 708 salariés intérimaires étaient occupés en mars 2019, pour chuter à 3 300 en mars 2020, soit une diminution de 65 % en un an.
Reprendre les discussions
Des travailleurs vraiment précaires qui hésitent désormais à proposer leurs services aux agences d’intérim. La pandémie n’a fait qu’aggraver leur cas. «Les travailleurs intérimaires doivent faire face à des conditions de travail non seulement difficiles, mais carrément illégales», souligne l’OGBL en citant des contrats de mission signés hors délai, des retards ou des manquements dans l’affiliation du travailleur à la sécurité sociale, un non-respect du salaire social minimum ou encore la multiplication de contrats de mission à courte durée. Les intérimaires ne bénéficient pas des avantages de la convention collective de l’entreprise utilisatrice, ce qui entraîne une discrimination entre les salariés permanents et les travailleurs intérimaires.
Il est grand temps de réformer le statut du travailleur intérimaire et de mieux le protéger, revendique l’OGBL, qui avait rencontré fin décembre 2019 le ministre du Travail Dan Kersch et lui avait soumis un catalogue de revendications. Il comprenait des sanctions plus accrues et davantage de contrôles de l’Inspection du travail et des mines (ITM) et l’introduction d’une limitation du nombre maximal d’intérimaires par entreprise. Il s’agissait aussi d’introduire l’obligation légale d’établir un contrat de mission avant le début de la prestation du travail intérimaire et de limiter les contrats de mission à courte durée, sinon de les convertir en CDI en cas de prolongation. L’OGBL appelle donc à la reprise des discussions pour trouver des solutions durables aux problèmes que rencontrent les intérimaires.
Précisons que le recours à des salariés intérimaires n’est pas fait pour pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Le recours à des salariés intérimaires est, sur ce point, soumis aux mêmes règles de recours que pour les contrats à durée déterminée.
Cependant, l’inobservation des règles de recours au travail intérimaire est sanctionnée par une amende pénale alors que dans le cas du contrat à durée déterminée, la sanction est la requalification du CDD en contrat à durée indéterminée.