Les pirates ont le vent en poupe

Renforcés dans les récents sondages, Sven Clement et Marc Goergen, les deux seuls élus du Parti pirate, s’attaquent vertement au gouvernement, trop passif et trop peu respectueux envers la Chambre.

Les acquis engrangés par les pirates sont nombreux en cette fin d’année parlementaire. Le plus retentissant a été «l’arrêt Clement». Le député Sven Clement a forcé devant les tribunaux l’ouverture aux élus de l’accès à tous les contrats signés par l’État. Au départ, c’était le contrat de concession négocié avec RTL Group qui se trouvait dans le viseur du fondateur du parti. Désormais, la Chambre a un droit de regard sur tous les engagements pris par le gouvernement. Mais, comme dans bon nombre de dossiers, la mise en œuvre coince. «Il nous faut enfin trouver une solution convenable pour régler l’accès à ces documents. Cela fait des mois que l’on bricole», déplore Sven Clement.

Mercredi, le Parti pirate a tiré le bilan du travail qu’il a abattu à la Chambre. Un travail qui aurait été effectué contre vents et marées. «L’année parlementaire a été particulièrement chargée. Malheureusement, ce qui allait figurer à l’ordre du jour n’a pas toujours été très clair. Il s’avère que le gouvernement a la mainmise sur l’agenda du Parlement», affirme Sven Clement. S’ensuit une longue liste de critiques envers la coalition au pouvoir. Les pirates emboîtent le pas au CSV en fustigeant l’absence de respect du gouvernement envers la Chambre. «Il est dramatique de constater à quel point la Chambre est considérée comme insignifiante», s’emporte le chef de file des pirates.

Dans ce contexte, Sven Clement a accusé la ministre de la Famille, Corinne Cahen, d’avoir «menti», d’être quelqu’un de «lâche» et d’afficher un comportement «infantile». Il en veut pour preuve son refus de répliquer à la tribune de la Chambre aux questions et critiques formulées par les élus de l’opposition à propos de la gestion de la crise sanitaire dans les structures pour personnes âgées. «Elle affirme qu’aucune question ne lui a été posée lors du débat. Il s’agit de faits alternatifs, digne du trumpisme», s’échauffe Sven Clement, quelques heures après avoir été bloqué par Corinne Cahen sur Twitter. D’autres députés, mais aussi des journalistes, ont connu le même sort. La CSJ, l’aile jeunes du CSV, a fustigé à son tour cette décision de la ministre, qualifiée d’«indigne».

«C’est du jamais vu !, lance dans la foulée Sven Clement. Le texte instaurant enfin un registre de transparence, qui retrace avec quels interlocuteurs un député échange sur un projet de loi, était prêt à être voté avant que le DP et le CSV freinent des quatre fers. Qu’est-ce qu’ils ont à cacher ?» Le même manque de transparence serait de mise avec le blocage de la publicité des réunions des commissions parlementaires : «Le travail fourni reste ainsi invisible. Et les gens pourraient se rendre compte du manque de préparation de certains députés de la majorité.»

Plus visibles ont été les motions, propositions de loi et questions parlementaires introduites par les pirates. Avec un succès mitigé, mais Sven Clement et Marc Goergen ont réussi à faire amender plusieurs lois Covid, dont les passages portant sur l’Horeca et la protection des données.

Pour la rentrée de septembre, le camp pirate exhorte le gouvernement à cesser «les belles paroles et à avoir enfin de la suite dans ses idées». L’investissement massif de l’État dans des logements à prix abordable (10 euros le m² en location) et une lutte plus conséquente contre le changement climatique figurent parmi les priorités de Marc Goergen. Il plaide aussi avec insistance pour l’arrêt des projets d’armement de l’armée.

«On ne va certainement pas changer le monde avec deux députés. Nous avons toutefois réussi à poser les bonnes piques», termine Marc Goergen. Cette devise doit mener les deux élus pirates vers les législatives d’octobre 2023. Le plus récent sondage annonce quatre sièges pour le parti.

David Marques