Les médecins ne veulent pas du tiers payant généralisé, qu’ils accusent de mettre en péril la liberté thérapeutique. Ils citent l’exemple des laboratoires, soumis au tiers payant et au joug de l’État. Si l’ordonnance sort des clous, le laboratoire ne l’exécutera pas. À moins de payer de sa poche.
Pas de répit pour l’Association des médecins et médecins-dentistes, l’AMMD, qui s’est épuisée à combattre la nouvelle loi hospitalière et qui se lance maintenant dans la lutte contre le tiers payant généralisé (TPG).
L’idée a refait surface à travers une pétition publique soutenue par l’OGBL et l’Association de défense des patients qui avait obtenu plus de 7 000 signatures. L’AMMD a déjà communiqué sur sa position, mais les élections approchant, les médecins sentent bien que le sujet fera un bon argument de vente ou «un sujet populiste dopé par une période préélectorale», dans le texte.
Voilà que la CNS apporte de l’eau à leur moulin. Les médecins, qui crient à la mise en péril de la qualité des soins médicaux et médico-dentaires par une restriction de leur liberté thérapeutique, veulent en apporter la preuve grâce à une lettre que la CNS a adressée début mars aux laboratoires privés d’analyses médicales. Ces derniers, qui sont déjà soumis au régime du tiers payant, ont été informés que les ordonnances qui n’étaient pas conformes aux règles de cumul en vigueur depuis le 1er janvier dernier ne seraient tout simplement plus prises en charge.
Cela signifie bien sûr que les laboratoires ne seraient pas remboursés. Surtout, pour l’AMMD, cela démontre bien l’emprise que veut avoir l’État sur la manière de faire de la médecine au Luxembourg. «De toute évidence et en conséquence directe, le patient ne bénéficiera pas des analyses que le médecin a cependant jugées utiles en établissant son ordonnance.»
« Le patient sera perdant »
Il y a pire encore pour les médecins : jusqu’au 1er avril, le patient pouvait décider de payer de sa poche les analyses refusées par la CNS, les autres étant opposables à la CNS et ainsi prises en charge. Mais ce ne sera plus le cas à l’avenir. C’est tout ou rien.
L’AMMD explique que le patient aura alors deux possibilités. La première : retourner voir le médecin qui devra renoncer à une partie des analyses et cela marquera la fin de la liberté thérapeutique, «avec perte de chance pour le patient et risque de responsabilité médicolégale pour le médecin», ajoutent les médecins. La seconde : le patient, s’il en a les moyens, payera de sa poche les analyses non conformes aux règles de cumul, mais également celles qui auraient pu être prises en charge par la CNS en cas de nouvelle ordonnance. Il renonce alors au remboursement puisqu’il en a les moyens.
Et là, gare à la médecine à deux vitesses, prévient l’AMMD, pour qui le patient économiquement faible devra renoncer à une prise en charge optimale. «Dans les deux cas, c’est le patient qui sera le perdant. La CNS aura réalisé une économie et le médecin, impuissant, ne pourra que constater les dégâts.»
Le TPG, pour les médecins, c’est le diable. Appliqué aux laboratoires, il sert selon eux de «levier de pression actionné par la CNS pour infliger des contraintes inacceptables aux assurés, ce qui revient à imposer une restriction de la liberté thérapeutique aux médecins et médecins-dentistes», conclut l’association qui annonce un rassemblement des médecins et médecins-dentistes le 16 mai, pour débattre du système de conventionnement obligatoire.
Geneviève Montaigu
Troisième possibilité, le médecin fait deux ordonnances: une pour les analyses prises en charge par la CNS et une pour les analyses payés directement pas le patient… sauf le gaspillage de papier cela ne me semble pas si compliqué