Le ministre de l’Économie, Franz Fayot, estime, comme les pirates, que le moment est venu de limiter à nouveau les commissions des intermédiaires de l’immobilier. Des miettes, juge un professionnel.
Le Statec recensait 1 378 agences immobilières dans son répertoire 2020 des entreprises luxembourgeoises. Elles sont trois fois plus nombreuses que les salons de coiffure et ne se plaignent pas de leur sort avec un marché aussi florissant. Du moins, elles ne se plaignent pas encore. Depuis que le ministre de l’Économie, Franz Fayot, a déclaré sur les ondes de RTL Radio samedi dernier que les commissions des agences immobilières allaient être plafonnées, elles s’interrogent.
Cette idée a également fait l’objet d’une proposition de loi déposée par les pirates il y a deux semaines. Les agences immobilières, qui perçoivent une commission de l’ordre de 3 % du prix de vente des biens immobiliers, la verraient fixée à 2 % et « plafonnée à un maximum de 3 000 euros au nombre 100 de l’échelle mobile des salaires et traitements », selon la suggestion des pirates.
Quand un bien est vendu 1,2 million d’euros, l’intermédiaire encaisse au passage ses 3 %, soit 36 000 euros, qui seraient ramenés à 24 000 euros. «Franchement, c’est comme ça qu’ils pensent rendre l’immobilier plus abordable ? C’est peanuts dans le coût que représente aujourd’hui la valeur d’un bien !», brocarde un agent immobilier installé à Mondorf-les-Bains où l’activité est intense.
«Le vendeur va voir ailleurs»
Il est rare que les intermédiaires prennent au-delà des 3 % de commission que leur autorisait un règlement grand-ducal qui fixait les barèmes jusqu’à l’entrée en vigueur, en 2004, de la loi relative à la concurrence. «La concurrence est trop énorme, déjà que cinquante agents se jettent sur le même bien, ils n’ont pas intérêt à dépasser les 3 %, sinon le vendeur va voir ailleurs», précise encore l’agent.
La facture peut même baisser. Pour les appartements, la pratique veut que ce taux diminue à 2,5 %, voire à 1,5 % si l’agence vend plusieurs logements de la même résidence. L’idée de souhaiter plafonner ne changera pas grand-chose dans le prix final. «Quand on vend du neuf à 12 000 euros le mètre carré, on ne se demande plus si on va payer 2 ou 3 % à l’intermédiaire, ce n’est clairement pas la commission qui doit être plafonnée, il faudrait regarder ailleurs», ajoute encore l’agent mondorfois.
Les grands gagnants
Les auteurs de la proposition de loi, Sven Clement et Marc Goergen, estiment pouvoir augmenter l’offre de logements à prix abordable en instaurant de nouveau une disposition légale prévoyant un plafond pour les commissions des agences immobilières. Ils justifient leur proposition en rappelant que, depuis l’année 2013, les prix du logement ont quasiment doublé. «Comme les commissions des agences immobilières sont liées au prix de vente des transactions, cette hausse est à leur avantage» alors que «la structure des coûts d’exploitation des agences est restée quasi identique». Pour les pirates les agences sont «clairement les gagnants sur ce marché en déséquilibre».
Une telle intervention de l’État semble «indiquée» pour les pirates, «car le jeu de la libre concurrence procure un grand avantage aux vendeurs et aux intermédiaires de vente, ceci au détriment des acheteurs». Les agences en doutent.
Quoi qu’il en soit, après l’annonce de Franz Fayot de vouloir suivre cet exemple, les pirates aimeraient le voir à une prochaine réunion de la commission du Logement à la Chambre des députés afin de discuter du sujet avec lui. Ils disent aussi leur lassitude de voir et d’entendre des ministres émettre des propositions sans avoir consulté les députés au préalable.
La proposition de loi est dans les tuyaux à la Chambre depuis deux semaines. Alors les pirates enragent de se faire voler la vedette. Le ministre Franz Fayot est invité, tout comme la commission de l’Économie, à venir écouter leurs doléances.