Caritas publie une prise de position sur le sans-abrisme au Luxembourg sans disposer de données. Elle sait que le phénomène est en progression et propose des solutions.
«Au Luxembourg, une augmentation du sans-abrisme a été observée», constate la Caritas tout en étant dans l’impossibilité de livrer des chiffres ou la moindre statistique comparative. Dans une prise de position, l’ONG déplore le manque de données centralisées sur le phénomène du sans-abrisme.
«Tous les street workers ont leurs chiffres et j’ai essayé de les regrouper, mais ce n’est pas possible», témoigne Carole Reckinger, responsable de la veille sociale chez Caritas et auteure du papier de position publiée mercredi sur le site de l’organisation. «Il y a beaucoup de personnes qui nous échappent, qui ne contactent aucun service d’aide», explique-t-elle.
Ce n’est pas le seul problème qui se dresse dans la tentative de centraliser des données concernant ce public. Il faut d’abord savoir qui entre dans la catégorie des sans-abris.
Faut-il distinguer entre ceux qui ont des droits sociaux et ceux qui n’en ont pas, ceux qui n’ont aucun toit et ceux qui vivent dans des taudis ?
Le Luxembourg n’est pas le seul pays où cette question fait débat puisque les Français qui distinguent un SDF (Sans Domicile Fixe) d’un sans-abri.
Le premier trouve refuge en bougeant dans des squats, des hôtels, des hébergements d’urgence alors que le second est une personne qui dort dans la rue. « À partir de combien de nuits passées dans une structure d’accueil comme la Wanteraktioun est-on considéré comme sans-abri ? », interroge d’ailleurs Carole Reckinger.
Les données sont rares, mais le problème bien réel et les observations des acteurs de terrain sont le meilleur baromètre pour le jauger. « Si l’on veut mieux comprendre le phénomène du sans-abrisme et envisager des solutions au plus près des besoins actuels et futurs, il est impératif de recueillir régulièrement des données », relève Carole Reckinger.
Les 18-25 ans en danger
Le groupe de travail interministériel «Jeunes et Logement» a relevé qu’en 2020, 69 jeunes ont passé un total de 1 099 nuitées (réparties sur 9 mois et non 12 mois) dans un hébergement d’urgence.
Impossible avec un tel marché de l’immobilier de payer ne serait-ce que la location d’un studio et se contenter de petits boulots. Outre le prix exorbitant des logements, la Caritas observe un nombre important de décrocheurs scolaires, des jeunes souffrant de problèmes de santé mentale ou encore de conditions de travail peu stables.
«Pour les jeunes , qui, pour une raison ou une autre, ne peuvent retourner chez leurs parents et qui, majeurs, ne peuvent plus être placés en foyer (…) la rue devient leur seul point d’ancrage», note l’ONG.
Les démarches pour obtenir un logement paraissent insurmontables pour la plupart des jeunes et certaines structures d’aide requièrent une indépendance financière que beaucoup n’ont pas. C’est l’autre problème des moins de 25 ans qui ne peuvent pas bénéficier du REVIS sauf quelques exceptions, mais peu nombreuses.
Pour Caritas, le gouvernement devrait en ajouter plusieurs autres à la loi en vigueur sur le REVIS afin que certains jeunes particulièrement vulnérables puissent en bénéficier, comme ceux qui sortent à l’âge de 18 ans d’un foyer, ceux atteints d’une maladie psychique ou mentale, qui ont des problèmes de toxicomanie ou qui sont venus au Luxembourg comme mineurs non accompagnés.
Dans l’idéal, Caritas verrait bien des structures de petites tailles avec quelques lits et réparties dans tout le pays, pour loger individuellement les sans-abri. «Notre expérience a montré qu’une meilleure prise en charge est possible dans des chambres individuelles plutôt que dans des chambres communautaires», explique Caritas.
Mais il y a un réel besoin en structures spécialisées et adaptées pour des profils spécifiques comme des couples, des alcooliques, des toxicomanes, des personnes âgées, des personnes avec des problèmes physiques et mentaux, des personnes qui travaillent en journée ou des personnes avec chien. Ces dernières préfèrent dormir dans la rue que d’abandonner leur animal.
Le gouvernement a bien adopté le concept de «housing first» qui consiste à proposer un logement individuel et sans condition à un sans-abri de longue durée et de l’accompagner pour résoudre ses problèmes par la suite. «Le concept est connu, mais nous n’avons toujours pas de stratégie», regrette Carole Reckinger.
Le comité national de défense social dispose de 20 studios dans un même bâtiment et avait accueilli 30 personnes en 2020. Mais aucun jeune en dessous de 30 ans.
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