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Le gouvernement inflexible face au médiateur


Claudia Monti regrette que des situations particulières aient été oubliées pendant cette pandémie et regrette encore davantage l’inflexibilité du gouvernement.  (Photo : Julien Garroy)

Le médiateur a été submergé d’appels pendant cette pandémie, répondant à des SOS, essayant d’aider du mieux qu’elle pouvait. Mais le gouvernement est resté de marbre.

Le médiateur, Claudia Monti, s’attendait à être davantage sollicitée au cours de cette pandémie. Comprendre être saisie de réclamations en bonne et due forme. En présentant le rapport 2020 lundi aux députés, elle a avoué sa surprise alors que dans le même temps, le médiateur a servi de dernier rempart à des cas difficiles voire désespérés.

Il faut toujours introduire une réclamation dans les règles de l’art afin que le médiateur puisse ouvrir un dossier. «Je crois que les gens étaient grandement lassés des documents administratifs et des dossiers à remplir et ils ont baissé les bras. Il y avait beaucoup de fatigue à ce moment-là», soupçonne Claudia Monti.

Néanmoins, elle a été saisie d’une dizaine de cas «qui ne rentraient pas dans les cases», comme elle l’exprime. Il s’agissait de microentreprises qui n’atteignaient pas les 15 000 euros de gains annuels ou de sociétés en voie de création juste avant le début de la crise. Des situations qui ne donnaient pas droit aux aides de l’État. «Il y a ceux à qui l’État a prétendu qu’ils pouvaient continuer leurs activités alors que, dans les trois premiers mois du confinement, tout le monde devait rester à la maison et toute activité non essentielle était interdite.»

Elle cite le cas de deux photographes dont l’essentiel des revenus dépend de l’événementiel ou encore celui d’un marchand de vin qui vit en sillonnant les foires. Autant de situations pour lesquelles rien n’était prévu. Claudia Monti reconnaît volontiers que le gouvernement a dû agir vite pour venir en aide aux salariés et aux entreprises et que le Conseil d’État n’avait pas le temps d’analyser les textes en toute sérénité. Reste que des gens ont été oubliés.

«Nous avions espéré que ces oublis que nous leur avions signalés seraient réparés, mais les ministères sont restés inflexibles», déclare Claudia Monti. Elle cite l’exemple de la France et de la Belgique qui analysent davantage au cas par cas alors qu’au Luxembourg, s’il n’y a aucune case prévue à une situation particulière, c’est cuit.

Parfois ça marche. Le médiateur cite le cas d’un coach sportif à qui l’État a finalement reconnu l’impossibilité d’exercer son activité pendant le confinement. «J’insiste sur ces formulaires à remplir via internet et qui bloquent systématiquement si vous ne rentrez pas dans les cases et que rien n’est prévu pour donner des explications supplémentaires», regrette le médiateur.

914 réclamations

Si les réclamations directement liées aux conséquences de la pandémie n’étaient pas si nombreuses, le service de la médiation a été submergé d’appels «pour tout et n’importe quoi», parce que les gens désespéraient de pouvoir joindre une administration. «Les gens pensaient que nous avions réponse à tout ou que nous avions un numéro de téléphone secret qui leur permettrait de joindre quelqu’un», illustre le médiateur. Et ajoute : «On a eu aussi des délateurs, pas mal. Bref on était SOS détresse, la police, un peu de tout.»

C’est encore vers le médiateur que les gens se tournaient pour lui dire que les lois étaient liberticides et qu’ils ne comptaient pas les respecter ou bien, plus dramatique, c’est lui que des désespérés prêts à se suicider appelaient.

Rien n’a changé aujourd’hui. Le service est débordé, parce que, en attendant, les réclamations continuent d’affluer qui concernent toutes les administrations du pays, communales et étatiques. Exactement 914 pour 2020, traitées en plus de l’écoute que la médiation a assurée.

Si la médiation a fait preuve de souplesse, ce n’est pas le cas du gouvernement, qui n’a guère été sensible aux situations hors des clous. «Le ministère de l’Économie et le ministère du Travail, pour les problèmes de chômage partiel, se sont montrés particulièrement rigides», souligne Claudia Monti.

Geneviève Montaigu