Alors que Laura Zuccoli quitte ses fonctions, l’ASTI se dote de toute une équipe de gouvernance prête à porter les combats historiques de l’association en vue des prochaines élections.
Après 12 ans à la tête de l’ASTI sous la double casquette de présidente et de directrice, Laura Zuccoli passe la main, à quelques mois de la pension. Forcée à se réinventer, l’Association de soutien aux travailleurs immigrés a choisi de s’appuyer désormais sur toute une équipe pour mener ses combats politiques et étoffer ses activités.
Membres bien connus de la structure, Sergio Ferreira et Marc Piron sont respectivement nommés à la direction Politique et à la direction Projets, tandis qu’un duo de bénévoles assure la présidence. Une première pour l’association lancée en 1979, longtemps incarnée par le seul visage de son fondateur et président durant 30 ans, Serge Kollwelter.
Aujourd’hui, ce sont 30 salariés et plus de 300 bénévoles qui œuvrent quotidiennement en faveur du vivre-ensemble, tandis que les trois missions phares de l’ASTI vont se poursuivre : lobbying politique, réflexion et participation au débat public, travail de terrain. En parallèle, le collectif inédit fourbit déjà ses armes en vue des élections communales et législatives de 2023 avec l’ambition de peser dans la campagne.
La priorité pour ces prochains mois étant de rapprocher les citoyens du système électoral : «On va encourager les gens à s’inscrire, d’autant qu’un projet de loi a été déposé pour enfin permettre à toute personne qui s’installe sur le territoire de voter aux communales sans attendre cinq ans», explique Sergio Ferreira, qui souligne que le Luxembourg est le seul pays de l’UE à imposer une condition de résidence aux citoyens européens pour ce type de scrutin.
La question de l’éducation sera aussi sur la table car l’association estime qu’il est urgent de réformer le système luxembourgeois : «Toutes les études montrent qu’il y a un problème au niveau de l’égalité des chances», pointe ainsi le directeur Politique.
Arrêter de «naviguer à vue» en matière d’immigration
En matière de politique d’immigration, thème emblématique de l’ASTI, Sergio Ferreira dénonce le fait qu’«on navigue à vue» et que le programme gouvernemental de coalition n’en dise que quelques mots : «Il indique que l’immigration est au service de l’économie. Voilà qui est un peu court! Non seulement nous plaidons pour une vision plus large et plus humaniste, de l’asile notamment, mais nous voulons aussi la voir inscrite dans la loi. L’ancrage légal d’une politique d’immigration ouverte et généreuse est fondamental pour nous», poursuit-il.
Dans la lutte contre le racisme, les discriminations et la xénophobie, qui fait aussi partie de l’ADN de l’association, la direction attend avec impatience les résultats d’une étude commandée par les autorités : «Le Luxembourg est régulièrement épinglé par les instances internationales car il ne dispose d’aucune donnée sur ces phénomènes. Nous espérons que des mesures politiques suivront, dont la création d’un observatoire dédié, comme nous le réclamons depuis des années.»
Enfin, l’association attend toujours une réforme de la loi sur l’intégration qui date de 2008 alors que la ministre, Corinne Cahen, a entamé une consultation début 2020 : «Deux ans après, il est grand temps qu’une nouvelle loi soit présentée et approuvée avant la fin de la législature», fait remarquer l’ASTI, qui compte bien poursuivre son action en faveur des plus précaires, les personnes en situation de séjour irrégulier. «Nous défendrons des procédures de régularisation et la possibilité pour ces gens qui sont ici, qui travaillent et contribuent à notre richesse, de voir leurs droits protégés», annonce Sergio Ferreira.
Une discrimination dans la réforme constitutionnelle
Le nouveau président, Evandro Cimetta, avocat et militant de longue date au sein de l’ASTI, estime que «le Luxembourg est un pays d’immigration mais continue d’ignorer cette réalité». Pour preuve, il cite la réforme constitutionnelle (lire en page 3) : «Le texte maintient « Les Luxembourgeois sont égaux devant la loi » alors que cette disposition institue une discrimination inacceptable entre Luxembourgeois et étrangers», pointe-t-il. «C’était l’occasion d’ancrer dans la Constitution un principe d’égalité qui est appliqué dans les faits et qui n’aurait eu aucune conséquence.» Mais visiblement, même symbolique, ce pas reste impossible à franchir. La faute aux jeux politiques qui n’hésitent pas, selon lui, à instrumentaliser ce symbole fort.