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L’affaire Superdreckskëscht sera portée en justice


L’opposition reproche à OSL, l’exploitant de la Superdreckskëscht, une toile opaque de la société. La construction servirait à «déplumer l’État», affirme Marc Goergen (Parti pirate).  (Photo : archives lq/anne lommel)

Les partis de l’opposition ont revendiqué, jeudi, en vain, des audits et enquêtes supplémentaires sur de susceptibles dysfonctionnements dans la gestion de la Superdreckskëscht. Le Parti pirate annonce saisir le parquet.

Au bout de plus de trois heures de débat tendues, hier soir, la Chambre a validé par les seules 31 voix de la majorité gouvernementale une loi spéciale de financement venant régulariser de manière expost le contrat portant sur l’exécution de l’action Superdreckskëscht (SDK). L’État a conclu une première fois en 2005 un contrat avec la société Oeko-Service Luxembourg (OSL) pour gérer ce projet de gestion des déchets problématiques et dangereux.

En janvier, la cellule scientifique de la Chambre était venue à la conclusion que la loi de 2005 était contraire à la Constitution. «La loi n’est pas à considérer comme loi spéciale de financement comme le réclame la Constitution si l’État s’engage sur une durée pluriannuelle et pour un montant de plus de 40 millions d’euros», relate François Benoy (déi gréng), le rapporteur du projet de loi. L’État accorde désormais une enveloppe maximale de 112 millions d’euros à OSL pour gérer la SDK sur la période 2018-2028.

Le vote de la loi n’est cependant pas suffisant pour mettre fin à l’affaire Superdreckskëscht, déclenchée courant 2021. Après des révélations dans la presse, notamment par nos confrères de Reporter et du Wort, les suspicions de favoritisme sont venues frapper le projet SDK.

L’audit commandé par l’ancienne ministre de l’Environnement, Carole Dieschbourg, dont les conclusions ont été présentées en septembre dernier, n’a en rien calmé les ardeurs. En cause : la proche amitié entre le directeur de l’administration de l’Environnement et le patron d’OSL. La soumission pour décrocher le contrat SDK aurait été «taillée sur mesure» pour la société. L’audit a conclu que l’appel d’offres et l’attribution du marché se sont faits dans les règles de l’art.

Welfring promet, l’opposition fustige

Cette conclusion est remise en doute par l’opposition parlementaire. À l’occasion du débat d’hier à la Chambre, CSV, ADR, déi Lénk et Parti pirate sont montés au créneau pour revendiquer un nouvel audit, l’annulation du contrat en cours avec OSL et même la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire. L’ensemble des requêtes ont été rejetées par les 31 élus de la majorité.

Le LSAP et sa députée Cécile Hemmen ont été le parti de la coalition gouvernementale à affirmer le plus ouvertement des «erreurs qui ont été commises par le passé» et que les «critiques émises sont pour la plupart justifiées». Depuis 2005, ni la Chambre, ni le Conseil d’État, ni les gouvernements successifs n’auraient cependant remis en cause le financement et la gestion de la SDK, ajoute l’élue socialiste.

Venue succéder en mai dernier à Carole Dieschbourg, qui a finalement démissionné après le rebondissement judiciaire de l’affaire Gaardenhaischen, la nouvelle ministre Joëlle Welfring est néanmoins venue promettre devant les députés qu’elle prenait «très au sérieux» les critiques. «Je m’engage d’approfondir le travail sur les critiques émises par l’audit et la mise en œuvre des recommandations formulées. Je compte charger un expert indépendant pour accompagner ce processus de manière critique», annonce la ministre déi gréng.

Insuffisant aux yeux de l’opposition. Le Parti pirate s’est montré le plus virulent. Marc Goergen est monté à la tribune de la Chambre pour dénoncer de susceptibles faits de corruption et de conflits d’intérêt, voire une prise illégale d’intérêts. Dans le viseur se trouve l’ancien directeur de l’administration de l’Environnement, entretemps parti à la retraite. Son étroite relation avec le directeur d’OSL va faire l’objet d’une dénonciation au parquet, comme l’a confirmé en fin de débat Sven Clement. L’embauche du fils de l’ancien haut fonctionnaire par OSL soulève aussi des questions.

L’opposition se plaint plus particulièrement du refus du gouvernement et de la majorité d’analyser de plus près «la toile opaque de firmes» mise en place par OSL ainsi que les flux financiers entre les entités. «Ce n’est pas une question de volonté, mais on se voit limité par la loi sur le secret d’affaires pour aller plus loin», contre la ministre de l’Environnement. Cette interprétation n’est pas valable non plus aux yeux du CSV.