Les députés poursuivent leurs travaux et ne jouent pas la montre. Tant pis si la réforme constitutionnelle ne passe pas sous cette législature, mieux vaut prendre son temps.
Pour le CSV, il est clair que cette réforme de la loi fondamentale n’est matériellement pas envisageable avant la fin 2018, et encore. Or elle doit franchir le premier vote à la majorité des deux tiers et, sans le CSV, c’est irréalisable. Mais personne ne se plaint. Il faut dire que le texte est loin d’être finalisé. En attendant, une nouvelle mouture de 136 articles qui contient les propositions de la société civile a été adressée au Conseil d’État.
Tout autre choix ne serait pas sérieux », nous déclare Claude Wiseler, président de la fraction parlementaire du CSV, après que le principal parti de l’opposition a dit qu’il ne voulait pas d’un premier vote de la réforme constitutionnelle pendant cette législature. Donc, par voie de conséquence, pas de référendum non plus.
Lundi, le président de la Chambre des députés, Mars Di Bartolomeo, avait invité la presse pour présenter une nouvelle mouture du texte coordonné de la nouvelle Constitution qui contient cette fois les amendements résultant de la participation citoyenne (lire ci-dessous) . « En douze réunions, la commission s’est penchée sur les propositions de la société civile et des institutions publiques, a rédigé un nouveau texte et l’a fait parvenir au Conseil d’État en novembre dernier », rappelle Alex Bodry, le président de la commission des Institutions et l’un des quatre rapporteurs du projet de réforme.
Mais la commission a beau démontrer qu’elle ne chôme pas, ce n’est toujours pas au cours de cette législature que la nouvelle Constitution sera adoptée. Au moment de faire le bilan de l’ancien gouvernement Juncker, force était de constater que la promesse d’une réforme de la loi fondamentale n’avait pas été réalisée.
La coalition tricolore arrivée au pouvoir en 2013 annonçait dans son programme gouvernemental, à la première phrase de son premier chapitre sur le renouveau démocratique, que les partis de la coalition gouvernementale entendaient «finaliser l’adoption d’une nouvelle Constitution, axée sur la modernisation des institutions et le renforcement des droits et libertés fondamentaux. Les travaux déjà réalisés dans ce contexte seront poursuivis.»
Le calendrier prévu dans ce même programme a vite été revu. Pas de premier vote fin 2015, alors que le gouvernement se remettait tout juste du cinglant revers du référendum sur trois sujets «essentiels» d’ordre constitutionnel. Depuis, les députés ont repris leurs travaux, mais la Constitution est encore loin du compte.
« Il y a plus de 120 articles, quelque 200 questions ouvertes et on ne peut pas se permettre de gâcher des années de travail en bâclant un texte d’une telle importance », nous explique Claude Wiseler.
Tout le monde d’accord
Pour ce premier vote, la majorité des deux tiers est requise et le CSV ne veut pas prendre le risque d’un vote, et encore moins d’un référendum, pendant cette législature. « Quand? Avec les communales? Cela signifierait qu’un soir, les partis se retrouveraient pour défendre d’une seule voix la Constitution et que le lendemain soir, ils deviendraient adversaires en campagne électorale pour les communales. Si on veut organiser un référendum en janvier 2018, cela veut dire que le texte doit être prêt maintenant, car il faut bien sortir et l’expliquer aux électeurs. En outre, cela signifierait aussi que nous devrions organiser le premier vote à la Chambre en octobre prochain. Tout cela est impossible même en travaillant vite, car le Conseil d’État n’a toujours pas rendu son avis sur une soixantaine d’articles. Je crois que toutes les fractions sont contentes de la position du CSV, qui n’a d’ailleurs provoqué aucun tollé. C’est beaucoup plus raisonnable », poursuit le chef de l’opposition chrétienne-sociale.
Lundi, Mars Di Bartolomeo, le président de la Chambre des députés, a déclaré qu’il avait « le sentiment que toutes les fractions voulaient terminer le travail ». Effectivement, personne ne se plaint d’un dépassement de délai. Alex Bodry évoque la possibilité d’adopter une résolution.
« Je peux me prêter au jeu de dire que l’on va faire un premier vote avant les élections législatives et organiser le référendum juste après l’échéance, mais encore faudrait-il que tout soit en ordre. Il faut éviter d’en faire un sujet de polémique pendant la campagne des législatives, sinon on risque de tout gâcher. On verra tout ça début 2018, quand le texte sera finalisé. Il reste encore des questions lourdes sur la sécurité, le Conseil d’État, le Conseil national de la justice et la Cour suprême », conclut Claude Wiseler.
Geneviève Montaigu
Les nouveautés du texte
Les amendements apportés au texte après la consultation populaire se retrouvent donc dans le texte coordonné envoyé au Conseil d’Etat, qui n’a pas encore avisé les amendements de mai-juin 2015.
On y retrouve en plus le droit de l’enfant d’«exprimer son opinion librement sur toute question qui le concerne en considération de son âge et de son discernement».
Un article reconnaît aux animaux «le statut d’être vivant non humain doté de sensibilité» et veille «à protéger leur bien-être».
Un autre dispose que l’État «garantit l’accès à la culture et le droit à l’épanouissement culturel» et qu’il «promeut la protection du patrimoine culturel».
Dans un autre article, on lit que l’État promeut la liberté de la recherche scientifique, tout comme le dialogue social.