Certains politiques se sont engouffrés dans la brèche, entre faux débat et jeu politique.
Burqa, niqab, tchador… Jamais les différents voiles portés par des femmes de confession musulmane n’avaient été autant médiatisés et débattus au Luxembourg qu’au cours de l’année 2015. Un changement de paradigme qui trouve forcément ses origines dans les événements qui ont marqué l’année écoulée. Dans un contexte d’afflux massif de réfugiés fuyant leurs contrées musulmanes, un certain amalgame a rapidement été fait avec le terrorisme qui a endeuillé 2015, par une frange de la population et de responsables politiques.
«Le Luxembourg n’est pas habitué à une immigration musulmane de cette ampleur», avait par exemple souligné l’ADR, dans le courant de l’année. Le même parti, de même que le CSV, ont également insisté sur la notion de «bien vivre ensemble ( lire encadré )» et sur le respect des règles à respecter dans un pays d’accueil, au nom du devoir d’intégration dans la société luxembourgeoise. Sans évidemment omettre la question de la sécurité qui a également été soulevée. Différentes voix se sont en effet élevées afin que « le visage de toute personne circulant sur la voie publique puisse être identifiable et non dissimulé par un voile. »
Bref, le débat est monté en puissance tout au long de l’année, jusqu’à ce que le Premier ministre rencontre les présidents des quatre groupes politiques représentés au Parlement (libéral, socialiste, écologiste et chrétien-social) et que ne soit prise la décision de ne pas légiférer au niveau national. Raison invoquée? Les communes disposeraient d’un pouvoir de réglementation suffisant, au niveau local, pour décider ou non de l’interdiction potentielle du voile intégral.
Entre faux débat et populisme
Le ministre de la Justice, Félix Braz, l’a d’ailleurs récemment rappelé dans sa réponse à une question parlementaire des députés Diane Adehm et Gilles Roth (CSV) : «Le gouvernement n’envisage pas à ce stade de légiférer en la matière, les règlements communaux de police couvrant suffisamment la matière.» Avant, pour le ministre, de rappeler que les communes ayant à leur disposition un tel pouvoir de réglementation «représentent déjà environ 70 % de la population du Grand-Duché de Luxembourg».
En clair, le débat initié ne serait qu’un faux débat, voire un débat disproportionné. Seule une dizaine de pratiquantes mulsumanes porteraient en effet le niqab (voile laissant une fente au niveau des yeux) au Luxembourg, alors qu’aucune femme de confession musulmane n’y serait adepte de la burqa. D’ailleurs, il suffit de se promener dans les rues du pays, de Troisvierges à Dudelange et de Steinfort à Grevenmacher, pour s’en rendre compte…
Quant aux personnes en transit à l’aéroport du Findel portant un «couvre-chef», elles peuvent scrupuleusement être soumises à un contrôle «supplémentaire», selon le ministre en charge des Transports, François Bausch, qui a répondu à une question parlementaire des députés Léon Gloden et Serge Wilmes (CSV), en ces termes : «Une inspection ou filtrage du couvre-chef séparément de la personne est obligatoire. À cette fin, le passager concerné est invité par le personnel de sûreté à se dévoiler en public ou, en cas d’une convocation religieuse ou morale, dans une fouille de cabine spécialement dédiée.»
Alors, pourquoi tant d’acharnement contre un «problème» vraisemblablement créé de toutes pièces, si ce n’est une instrumentalisation de l’islam à des fins politiques ?
Claude Damiani
Au-delà des considérations sécuritaires, ces accessoires vestimentaires sont surtout un frein à toute forme d’intégration et de communication, une négation du vivre ensemble, un rejet d’une société « différente » et la voie ouverte au communautarisme et la ghettoïsation. C’est plutôt sous cet angle que nos politiques doivent aborder le débat car avec l’afflux de réfugiés, la question – marginale jusqu’ici comme vous le soulignez – va forcément s’amplifier.
Bonjour Gerldam
Autrefois, les chrétiennes rentraient à l’église avec leur fichu en signe de respect de la tradition chrétienne et dans la distinction de leur rôle dans la famille chrétienne en adoptant le style de la mère de Notre Seigneur Jésus Christ. Aujourd’hui, notre code vestimentaire a connu des mutations avec l’émancipation du rôle féminin et l’accueil de la diversité au sein de l’église. Cet habit est un code culturel auquel sont très attachés les musulmans. Certains ont depuis très longtemps abandonné cet accoutrement trop distinctif pour épouser la modernité occidentale. Ils n’en restent pas moins de vrais musulmans croyants et pratiquants.
C’est vrai que notre goût pour la transparence se trouve frustré lorsque nous nous trouvons face à un individu voilé. Nous perdons nos repères de communication non-verbale et d’authenticité. Certes chez nous, la notion de » déguisement » a pour fonction de « tromper » l’interlocuteur. Or ce n’est pas le but en religion musulmane. Le voile chez la femme est comme une protection face à l’extérieur, car le rôle de la femme était au foyer, à l’abri du regard des envieux, des hommes, et par respect pour l’entourage familial. C’est aussi une question d’honneur. L’épouse est la garante de l’honneur du foyer. Le pouvoir appartient aux femmes à l’intérieur de leur foyer, au sein de leur famille. Selon le Coran, le Prophète accordait beaucoup d’importance au rôle de la femme: mère, conseillère, gestionnaire, intermédiaire..La femme incarne la sagesse. Elle protège l’honneur de son époux et de sa famille. Ce sont des valeurs lointaines, du Moyen Age Occidental pour la plupart d’entre nous. Et pourtant, des millions de gens s’y appliquent encore au quotidien! La croyance est un héritage intergénérationnel. La pratique est facteur de pérennité.
Il est vrai que toute la polémique autour de ce « tissu d’incompréhension » est source de conflits entre les deux parties. Il est vrai que des imposteurs peuvent l’utiliser pour se déplacer en toute discrétion (notre imaginaire!). Mais soyons lucides, ce n’est qu’un tissu sombre, n’ayons pas peur du noir, du néant! Regardons ces yeux comme le reflet d’une âme humaine et non d’un terroriste présumé. Nous chrétiens nous avons notre voile intérieur, puisse-t-il être ce filtre si cher à Socrates.
Je n’ai rien contre tous ces voiles, du moment qu’ils sont portés dans les pays à majorité musulmane. « In Rome, do like the Romans ». Le Luxembourg est de tradition plus que millénaire chrétienne. Elle doit le ,rester. Les musumans sont tolérés, à condition qu’ils respectent la majorité et se comportent, à l’extérieur, comme elle. A la maison, ils peuvent se déguiser comme ils veulent.