Quand le ministre de la Sécurité intérieure, Étienne Schneider, dresse le bilan de la présidence, il est forcément consacré à la lutte contre le terrorisme.
Le ministre de la Sécurité intérieure, Étienne Schneider, a imité son collègue de la Justice, Félix Braz, en présentant un bilan de la présidence que l’on peut qualifier d’élogieux. Les Luxembourgeois ont réussi à faire bouger les lignes dans d’importants dossiers qui restaient bloqués dans les tuyaux. La lutte contre le terrorisme a ainsi connu de grandes avancées alors que les attentats du 13 novembre en France sont venus augmenter la pression qui s’exerçait déjà sur les Européens depuis les attaques de janvier.
La présidence luxembourgeoise a donc eu fort à faire pour garantir une plus grande sécurité aux citoyens européens. «Les attentes étaient grandes, l’Europe devait réagir et prendre des mesures concrètes et efficaces», rappelle Étienne Schneider. En matière de sécurité intérieure, la présidence a donc porté une attention particulière sur plusieurs aspects, à commencer par la finalisation du très controversé fichier des passagers dit PNR, sigle pour Passager Name Record.
Le Parlement européen, qui bloquait le projet en exigeant plus de garanties en termes de protection des données, a finalement trouvé un accord en commission le 10 décembre dernier. La présidence avait mis la pression lors d’un conseil extraordinaire Justice et Affaires intérieures (JAI) organisé le 20 novembre au lendemain des attentats de Paris.
«Nous avons réussi, après d’intenses négociations avec le Parlement européen et la Commission, à trouver un accord équilibré et acceptable», se réjouit Étienne Schneider en précisant que le vote en plénière «ne sera plus qu’une formalité». Le PNR est un projet de vaste fichier recensant l’identité de tous les passagers des avions circulant, entrant ou sortant de l’espace européen.
Autre avancée jugée capitale par Étienne Schneider, celle ayant trait à la lutte contre le trafic d’armes à feu. «La présidence a particulièrement mis la pression sur la Commission pour qu’elle élabore au plus vite un règlement d’exécution sur les normes minimales pour la désactivation des armes à feu. Elle a accéléré les choses puisqu’elle a livré le règlement le 18 novembre», ajoute Étienne Schneider.
Schengen renforcé ?
Les propositions de la Commission étaient prévues dans le programme européen en matière de sécurité, adopté en avril 2015 mais tout s’est accéléré après les attentats. La Commission a donc adopté un paquet de mesures qui rendra plus difficile l’acquisition d’armes à feu dans l’Union, améliorera la traçabilité des armes détenues légalement, renforcera la coopération entre les États membres et garantira que les armes à feu neutralisées seront rendues inopérantes.
La présidence voulait aussi une révision de la directive sur les armes à feu. Elle a été entendue dans la mesure où, le même jour, le 18 novembre, la Commission livrait sa copie qui devrait être adoptée sous présidence néerlandaise.
C’est aussi pendant la présidence que les accords de Schengen ont été le plus menacés au nom de la lutte contre le terrorisme et d’aucuns les ont d’ailleurs déjà enterrés. Mais Étienne Schneider pense plutôt le contraire et estime que les mesures décidées vont renforcer cet espace dans lequel la libre circulation n’est pas remise en cause. «Nous avons notamment demandé une révision du Code frontières Schengen qui permettra une meilleure gestion des visas dans le cadre du dossier « frontières intelligentes »», souligne le ministre.
Ces mesures visent à améliorer la gestion des frontières extérieures et à contribuer à la lutte contre la migration irrégulière. Il y aura lors du franchissement des frontières extérieures des contrôles systématiques de l’identité de la personne et de ses documents de voyage. Le tout informatisé, bien sûr.
Il restait encore l’épineux dossier de l’échange d’informations. Le ministre distingue l’échange d’informations policières et judiciaires, principalement via Europol et l’échange entre les services de renseignement. Pour le premier, il s’agit de pousser tous les États membres à alimenter le système information Schengen (SIS) en y entrant les informations relatives aux combattants terroristes étrangers. Il faut également assurer l’interopérabilité des diverses bases de données, et soutenir le travail d’Europol.
Concernant les services de renseignement, c’est plus compliqué. Le partage d’informations entre services de renseignement reste limité par les législations internes et les exigences relatives à la protection des données.
Sous présidence luxembourgeoise, le Groupe antiterrorisme (GAT), qui regroupe les services de renseignement de l’UE, de la Norvège et de la Suisse, s’est engagé à mettre en place, «dès le début 2016», une plateforme de partage de renseignements qui devrait aboutir à «un partage multilatéral aussi complet et rapide que possible», explique le ministre en se félicitant «de ce formidable progrès».
Geneviève Montaigu