Le président sortant de la Chambre des salariés (CSL), Jean-Claude Reding, se dit satisfait du travail accompli depuis 2009. Pour l’avenir, les défis ne manquent pas.
Dix ans après la création de la CSL, estimez-vous que cette institution est aujourd’hui suffisamment écoutée, qu’elle dispose d’assez de poids et de visibilité pour pleinement jouer son rôle de Parlement du travail?
Jean-Claude Reding : Grâce à la création de la CSL, les possibilités pour influencer le débat politique et économique à l’échelle du pays sont devenues plus importantes. Il est évident qu’on veut avoir toujours plus de poids et d’influence. Mais je dois dire qu’une importante attention est aujourd’hui accordée à nos prises de position.
Il existe différentes façons d’influencer le débat politique. La première est la plus classique avec la rédaction d’avis sur des projets de loi. Mais il est encore plus important d’épingler des sujets en amont qui débouchent en fin de compte sur des projets de loi. L’important travail d’analyse réalisé ces dix dernières années sur la situation sociale du pays a fini par porter ses fruits. On a réussi à initier un véritable débat sur la question. Une autre façon de peser sur le débat politique a été d’augmenter notre capacité analytique, de renforcer nos services économiques et juridiques.
Comment peut-on décrire la coopération entre la CSL et les syndicats?
Il existe une séparation des pouvoirs. Les syndicats sont ceux qui œuvrent directement sur le terrain. La CSL, de son côté, intervient sur le plan législatif, réalise ses études et s’engage dans le domaine de la formation. On est en quelque sorte le « back-office » des syndicats. Mais ce travail effectué dans les coulisses permet de mieux soutenir les syndicats dans leur travail. Nos analyses poussées sur les données économiques et sociales fournies par la Commission européenne permettent au camp syndical d’être mieux armé pour mener les discussions avec le gouvernement et le patronat. La même chose vaut pour les représentants que nous envoyons dans les différentes commissions de la sécurité sociale. Il s’agit d’éléments qui ne sont pas trop mis en avant sur la place publique, mais ce travail permet que certains sujets soient discutés et ne tombent pas aux oubliettes.
La CSL est la seule institution à représenter l’ensemble de la population active. Cela est-il suffisamment pris en compte?
Indépendamment du taux de participation aux élections sociales, le nombre absolu de votants pourrait bien se rapprocher, voire dépasser, le nombre d’électeurs aux législatives. Même si cela peut paraître provocateur, cette donne devrait être prise en compte sur le plan politique. Des travailleurs frontaliers siègent à la CSL, et je suppose que de nouveaux représentants vont être élus le 12 mars. Cela est une bonne chose. Il en va de même pour les élus qui sont des résidents non luxembourgeois.
Notre travail permet aussi d’encourager l’intégration. Nos programmes de formation, notamment ceux destinés aux élus à la CSL, permettent de mieux les familiariser avec le fonctionnement du Luxembourg. Et ils sont nombreux à en profiter, aussi parce qu’ils visent à obtenir à terme la double nationalité. La CSL est ainsi une formidable machine d’intégration bien rodée et elle devrait être vue et entendue comme telle. (…)
Vous allez vous présenter aux élections dans le groupe des retraités. Est-il possible que vous prolongiez une nouvelle fois votre mandat à la tête de la CSL?
J’ai toujours dit que le président de la CSL doit être issu d’un groupe représentant la population active. Ce ne serait pas forcément une bonne chose que le président soit un retraité. A priori, je me suis préparé à ne plus prendre la présidence. Mais il faut attendre le verdict du scrutin. La répartition des forces entre les syndicats mais aussi l’identité des personnes élues vont entrer en compte pour désigner le nouveau président. Cette élection reste complexe. Contrairement aux législatives, les suffrages de liste sont nettement plus importants que les suffrages personnels. Je ne sais pas si cela va changer avec ce scrutin.
Entretien avec David Marques