Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères constate que les négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE sont «de facto à l’arrêt». Mais contrairement à l’Allemagne, il juge qu’il ne faut pas suspendre formellement ces négociations car cela reviendrait à lâcher ceux qui en Turquie croient aux valeurs de l’UE.
Le 3 septembre, la chancelière allemande, Angela Merkel, se prononçait pour une suspension formelle des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Cette déclaration intervenue en pleine campagne électorale pour les législatives faisait suite à une dégradation notable des relations entre Berlin et Ankara, notamment après l’arrestation par les autorités turques de plusieurs ressortissants allemands d’origine turque.
Cette position est-elle partagée par le gouvernement luxembourgeois a demandé le député CSV Laurent Mosar au chef de la diplomatie luxembourgeoise dans une question parlementaire? Dans sa réponse, Jean Asselborn rappelle tout d’abord le cadre des négociations d’adhésion de la Turquie, adopté en 2005, précisant qu’«en cas de violation grave et persistante par la Turquie des principes de liberté, de démocratie, d’état de droit, de respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, sur lesquels s’est bâtie l’Union, la Commission recommandera, à sa propre initiative ou à la demande d’un tiers des États membres, de suspendre les négociations».
Depuis le coup d’Etat manqué du 15 juillet 2016, attribué par le régime de Recep Tayyip Erdogan au mouvement du prédicateur islamiste Fethulah Gülen, des dizaines de milliers de personnes ont été arrêtés et détenues et quelque 100 000 fonctionnaires renvoyés. Cette répression touche aussi bien la société civile, les journalistes, les magistrats que les opposants politiques de tous bords.
Le ministre luxembourgeois constate de ce fait que «malheureusement, la Turquie continue à s’éloigner de l’Union européenne, surtout au cours des derniers mois, et les négociations d’adhésion sont de facto à l’arrêt».
Les voyages déconseillés
Jean Asselborn rejoint cependant la position de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne qui avait affirmé le 13 septembre dans son discours sur l’état de l’Union devant les députés européens : «Nous garderons toujours la main tendue en direction du grand peuple turc et de tous ceux qui sont disposés à coopérer avec nous sur la base de nos valeurs.»
Et c’est au nom «de ceux qui en Turquie croient toujours en l’UE et dans les valeurs qu’elle défend» que Jean Asselborn ne veut pas «d’une suspension formelle du processus d’adhésion». Aussi souligne-t-il que l’UE «reste intéressée à une coopération étroite sur des questions d’intérêt commun avec une Turquie sûre, politiquement et économiquement stable et démocratique».
Quant à savoir, comme le souhaite Laurent Mosar, s’il est déconseillé aux «citoyens luxembourgeois» de se rendre en Turquie, Jean Asselborn renvoie vers le site internet de son ministère, tout en rappelant qu’il est généralement «conseillé aux voyageurs d’éviter de se rendre dans des pays ou des régions qui font l’objet de troubles politiques ou autres».
Le Quotidien