Après des commentaires proférés à l’encontre de sa présidente Laura Zuccoli sous un post du député ADR Fred Keup, l’ASTI lance l’alerte.
«Je suis pour l’élimination de cette dame», «Dommage qu’on ne brûle plus les sorcières»…. Ces commentaires et d’autres se sont retrouvés sur la page Facebook de Fred Keup à la suite d’un post du député ADR attaquant la présidente de l’ASTI, Laura Zuccoli, pour ses propos concernant les discriminations au Luxembourg lors d’une «Carte blanche» sur RTL le 12 février dernier.
«Depuis 40 ans, l’ASTI lutte contre les discriminations, rappelle le porte-parole de l’association, Sergio Ferreira. Serge Kollwelter (NDLR : ancien président) et Laura Zuccoli ont été menacés de mort, des attaques ont été proférées à l’encontre de plusieurs de nos membres… Mais là, les limites ont été dépassées. Dans son post, Fred Keup conteste notamment les discriminations en matière d’orientation scolaire des jeunes cap-verdiens cités, considérant qu’il n’y a et il n’y a jamais eu des discriminations en fonction des origines ou de la nationalité dans le milieu scolaire. Pour justifier cette affirmation, il invoque ses 17 ans d’expérience en tant que professeur. “Venez avec des faits, pas avec des polémiques bon marché”, s’exclame le député. Sauf que, entre citer son expérience personnelle et forcément subjective, comme le fait le parlementaire, ou se référer à une étude scientifique du CEFIS, comme le fait Laura Zuccoli dans sa “Carte blanche” il y a une différence… factuelle. Des études menées par des chercheurs sont ainsi critiquées, attaquées et considérées comme du “poison” que “Madame Zuccoli et l’ASTI continuent de répandre”. Le terreau était créé pour que la haine se déchaîne dans les commentaires.»
Fred Keup a une responsabilité
Résultat, Laura Zuccoli a saisi la justice en son nom personnel et porté plainte contre X. «Nous sommes dans une démocratie et toutes les idées peuvent être dites. Nous avons toujours invité l’ADR à nos débats et toujours accepté de débattre avec eux. La discussion doit se faire sur des idées et des faits, estime la présidente de l’ASTI. Là, il y a eu des insultes et de la misogynie. C’est à la justice de décider de donner une suite ou non à ma plainte.»
Selon l’ASTI, «les propos de Fred Keup ainsi que les commentaires dont le terreau a été préparé par sa publication, correspondent clairement à la définition du discours de haine de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) à savoir “le fait de prôner, de promouvoir ou d’encourager sous quelque forme que ce soit, le dénigrement, la haine ou la diffamation d’une personne ou d’un groupe de personnes ainsi que le harcèlement, l’injure, les stéréotypes négatifs, la stigmatisation ou la menace envers une personne ou un groupe de personnes (…)”».
Pour l’association, Fred Keup (ADR) a une responsabilité en tant que député : «Il est inacceptable et hautement condamnable qu’un élu politique qui endosse une charge dans un organe de souveraineté qui représente le pays et qui, lors de sa prise de fonction, jurait obéissance à la Constitution, se permette d’être lui-même l’instigateur de commentaires faits de clivages sociétaux, d’attaques personnelles et d’insultes (…). Diffuser sur les réseaux sociaux des messages diffamant et ciblant une personne, encourage sa mise au pilori et est incompatible avec une fonction politique. Nous osons espérer que les partis politiques, les forces démocratiques et la Chambre de députés condamnent fermement ces agissements.»
Et l’association lance «une alerte à l’ensemble de la société luxembourgeoise et en particulier au monde politique : un discours de haine de ce type n’a pas lieu d’être dans le combat politique au Luxembourg».
Guillaume Chassaing
«Au tribunal de décider»
«Nous sommes dans un État de droit et l’ASTI a le droit de porter plainte», nous confie Fred Keup avant de rappeler que «la plainte n’est pas contre moi», mais contre X et liée à certains commentaires se trouvant sous l’un de ses posts sur sa page Facebook. «Parfois, il y a des centaines de commentaires, je ne les vois pas tous, avance le député ADR. Je ne suis pas juriste, ce n’est pas à moi de condamner ou pas des commentaires des autres. Maintenant, c’est au tribunal de décider.» Fred Keup rajoute : «Moi, je suis responsable de ce que je dis et j’écris. Et je dis et j’écris que l’ASTI fait de la polémique.»
En fin d’après-midi mardi, l’ADR a publié un communiqué en indiquant qu’«il est absolument légitime de critiquer une ONG qui joue un rôle important dans la vie publique, de surcroît et du moins partiellement avec l’argent du contribuable (…). Maintenant, l’ASTI n’hésite plus à insulter un député luxembourgeois en lui reprochant, d’ailleurs gratuitement et sans le moindre élément de preuve concret à l’appui, d’être un “instigateur de commentaires faits de clivages sociétaux, d’attaques personnelles et d’insultes”. L’ASTI franchit ici un pas important : elle assimile dorénavant la critique à son égard à l’instigation à des activités répréhensibles. Championne d’intolérance, elle n’hésite même plus à remettre l’intégrité personnelle d’un député en question pour s’être opposé à ses agissements, ce qui constitue de toute évidence un outrage à un député».