Le Luxembourg est depuis vendredi le premier pays de l’UE ayant banni le glyphosate. Agriculteurs, viticulteurs, maraîchers et personnes privées devront se passer de cet herbicide.
Tout emploi du glyphosate est désormais interdit, que ce soit sur les terres agricoles, dans les vignes, les vergers et même les jardins privés. « C’est la fin de tout un processus engagé dès la signature de l’accord de coalition fin 2018 », rappelle Romain Schneider, joint par téléphone. La date butoir fixée par l’UE est le 15 décembre 2022. Le gouvernement s’était engagé à bannir le glyphosate dès le 31 décembre 2020.
La substance active de cet herbicide est classée depuis mars 2015 comme «potentiellement cancérogène» par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Au Luxembourg, le «Roundup», le produit à base de glyphosate le plus répandu, a déjà disparu des rayons depuis le 30 juin. Le gouvernement a décidé de procéder par étapes. La première a consisté à retirer dès le 1er février dernier l’autorisation de mise sur le marché de produits à base de glyphosate. « Contrairement à d’autres pays, comme l’Autriche compte le faire, nous n’avons pas décidé de légiférer, mais de retirer l’autorisation », explique Romain Schneider. Il a été décidé d’accorder un «délai de grâce» pour écouler les tout derniers stocks entre juillet et décembre.
Conscient qu’il n’existe pas encore de véritable alternative à cet herbicide, le gouvernement a décidé d’accompagner les agriculteurs, viticulteurs et maraîchers qui étaient d’accord pour bannir le glyphosate dès l’année culturale 2020. Les exploitants ont pu toucher une compensation par hectare de 30 à 100 euros. « Il est à rappeler que près de 50 % des terres agricoles du Luxembourg sont des prairies, où aucun herbicide n’est utilisé », fait remarquer le ministre. En 2017, 13 600 kg de glyphosate ont été dispersés au Luxembourg.
Des contrôles annoncés
Du côté des agriculteurs, 727 des 1 005 exploitations que compte le Grand-Duché sont engagés dans le programme de compensation visant à préparer l’après-glyphosate. « Il s’agit de près de 60% d’entre elles. L’écho est assez positif, même si les agriculteurs sont conscients qu’un surcroît de travail manuel les attend », avance Romain Schneider. Les alternatives à cet herbicide restent en effet à peaufiner. Un projet de recherche visant à obtenir des cultures plus résistantes (ANGEL) est mené par la Chambre d’agriculture et un prototype de machine électrique, équipé de herses, est disponible au Luxembourg.
Si le Grand-Duché est pionnier pour l’interdiction du glyphosate, une agriculture plus durable deviendra la norme. La nouvelle politique agricole commune (PAC), complétée par la stratégie «De la fourche à l’assiette», se veut plus conforme à l’enjeu environnemental et climatique. Le gouvernement s’est aussi doté d’un plan d’action de réduction des produits phytopharmaceutiques qui vise une réduction de l’utilisation de 50 % des produits concernés jusqu’en 2030 ainsi qu’une réduction de 30% des «big movers» (produits les plus dangereux) jusqu’en 2025. S’y ajoute l’objectif d’atteindre les 20% d’agriculture biologique d’ici 2025.
« Je constate avec satisfaction que ce sont les jeunes agriculteurs qui ont choisi le chemin pour œuvrer vers une agriculture plus durable et redorer ainsi le blason de leur secteur », souligne encore le ministre Schneider. Les plus récalcitrants doivent savoir que des contrôles seront organisés sur le terrain.
David Marques
Les CFL vont aussi s’en passer
Les CFL ont officiellement confirmé en date du 22 juillet qu’ils «n’utiliser(aient) plus le glyphosate d’ici à la fin de l’année 2020, et ce conformément à la loi». Début avril, le ministre de la Mobilité, François Bausch, avait encore indiqué que les CFL allaient cesser d’utiliser l’herbicide «au plus tôt en 2021».
Entre 2017 et 2019, 4 686 litres de produits contenant du glyphosate ont été employés par les CFL. Sans la lutte contre les mauvaises herbes, les frais d’entretien des rails partiraient à la hausse, leur durée de vie à la baisse et leur stabilité serait fragilisée, précise François Bausch. Les CFL ne sont pas les seuls à devoir trouver des alternatives pour entretenir leurs rails. Les sociétés de chemins de fer française (SNCF), allemande (DB), autrichienne (ÖBB) et suisse (SBB) ainsi qu’Infrabel (Belgique) travaillent sur des solutions à base d’eau chaude, d’électricité et de feu.