Il aura suffi d’une étincelle pour rallumer la mèche dans le dossier de la suppression des fabriques d’église. Jeudi, la fabrique de Hollerich a publié une résolution pour dénoncer la «spoliation» de son patrimoine.
On l’a bien compris ces derniers jours. Un des principaux champs de bataille de la rentrée politique sera la réforme des fabriques d’église (lire nos éditions précédentes). Et le vocabulaire guerrier est bien de mise, car les fabriques d’église ne sont plus prêtes à subir la loi du ministre de l’Intérieur, Dan Kersch.
Si le Syndicat des fabriques d’église (Syfel) réfléchit haut et fort à mener des actions judiciaires pour contrer ses plans, la fabrique de Hollerich est sortie de ses gonds en lançant une attaque frontale qui fera date. Retrouver des termes comme «spoliation», «intrusion étatique», «confiscation» et «discrimination» dans un texte visant le gouvernement est en effet très rare et a de quoi interpeller. Il convient donc de rester critique et garder une certaine distance avec les propos très rudes formulés hier.
Pour commencer, la résolution signée par le président de la fabrique d’église, Roland Mich, est adressée au Premier ministre, en charge des Cultes, aux présidents de la Chambre des députés et du Conseil d’État, au Parlement européen, à la Commission européenne, à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, à l’archevêque Jean-Claude Hollerich et même à l’ONU, mais bizarrement pas au ministre de l’Intérieur, qui se trouve à la base du projet de loi farouchement dénoncé.
Ensuite, les arguments, notamment juridiques, énumérés dans cette résolution peuvent être remis en question (lire encadré). Mais tout cela n’empêche pas, que ce texte mérite d’être pris en considération. Il y a d’ailleurs fort à parier que même s’il est exclu de la liste des destinataires, le ministre de l’Intérieur ne devrait pas manquer de réagir aux très lourdes critiques. Dans son entretien accordé au Quotidien le 24 août, Dan Kersch avait déjà fustigé la «pression inédite» exercée en amont par le Syfel sur le Conseil d’État. La résolution accentue encore cette pression et va très loin pour obtenir le retrait du projet de loi, validé fin juillet par le Conseil de gouvernement.
Dès l’introduction, la fabrique ne mâche pas ses mots. Il s’agirait d’un projet de loi qu serait «indigne d’un État de droit». Le texte serait en outre «hautement discriminatoire à l’égard des catholiques» vivant au Luxembourg. La fabrique de Hollerich estime d’ailleurs qu’il est du «devoir de la presse d’informer les citoyens sur les conséquences d’un tel projet (…)» qui serait «dangereux à bien des égards». Précisons néanmoins que le choix d’évoquer cette résolution n’est aucunement lié à cette «recommandation».
Pour ce qui est du contenu proprement dit de la résolution, la fabrique d’église de Hollerich estime que le gouvernement compte mettre en vigueur la réforme des fabriques d’église «de façon abrupte et sans aucune discussion avec les concernés». L’«état d’urgence» aurait même été décrété pour faire adopter le texte avant la fin de cette année 2016. Ce manque de dialogue et le calendrier trop serré sont également dénoncés par le Syfel. La paroisse de Hollerich va cependant bien plus loin dans ses critiques.
«Droits fondamentaux bafoués»
«Les catholiques se sentent véritablement harcelés par le présent gouvernement», souligne ainsi la résolution. La communauté catholique serait la «seule visée» par la séparation des Cultes et de l’État, pourtant officialisée en janvier 2015 avec l’aval de l’archevêché. «Il s’agit d’une intrusion étatique inacceptable dans l’exercice du culte catholique et de son fonctionnement au niveau des paroisses», indique la résolution. Les «droits fondamentaux des paroissiens et de leurs institutions» seraient «bafoués». Ce passage démontre une nouvelle fois le profond désaccord au sein même de l’Église catholique dans ce dossier.
La suppression des fabriques d’église pour créer un fonds de gestion unique pour les édifices religieux, géré et financé par le seul culte catholique, équivaudrait à une «mainmise sur l’universalité du patrimoine des 285 fabriques d’église», existant depuis plus de 200 ans, poursuit la résolution. La paroisse fait encore un pas de plus en rappelant qu’elle est encore plus ancienne. Sa création serait même «antérieure à la création de l’État» luxembourgeois. Verser maintenant le patrimoine de la paroisse dans un Fonds unique équivaudrait donc à une «confiscation» et même une «spoliation» de son patrimoine. «De telles mesures sont contraires à l’État de droit et violent le principe d’égalité ainsi que de nombreux autres droits de l’homme», conclut la résolution.
Un double appel est donc lancé pour ne pas approuver cette législation. Pour remplir son objectif, la paroisse de Hollerich espère pouvoir compter sur le soutien des «instances et organisations internationales» ainsi que des «défenseurs de droit de l’homme» pour «faire pression sur le gouvernement et les instances législatives» du pays.
David Marques
juste une question qui appelé vous fabrique d églises merci à vous