L’Europe est confinée, les avions sont collés au tarmac et les voyageurs perdent le nord. Le Centre européen des consommateurs les conseille sur la bonne direction à prendre.
Le secteur du tourisme est au point mort et, malgré des dates de reprise annoncées, l’incertitude règne tant pour ses acteurs que pour les clients. À l’approche des vacances d’été, ces derniers hésitent à annuler un voyage ou à en réserver un. Le bureau de liaison du Parlement européen au Luxembourg, la représentation de la Commission européenne et le Centre européen des consommateurs ont tenté de les aider à faire le bon choix à l’occasion, jeudi, d’un «webinaire» (sorte de séminaire en visioconférence) autour du thème «Voyager en temps de coronavirus».
L’industrie des transports est un des secteurs économiques les plus touchés par la crise sanitaire actuelle. C’est aussi le secteur le plus complexe à relancer. En 2019, l’aviation européenne a transporté plus d’un milliard de passagers. Il y a deux mois, ce trafic s’est effondré et enregistre depuis une baisse de 99 % ainsi qu’une perte de plus de 200 millions de passagers. Des chiffres qui ne montrent qu’une partie des dégâts entraînés par le Covid-19. 2,4 millions d’entreprises vivent du tourisme en Europe. 90 % d’entre elles sont des PME. Des millions d’emplois sont en jeu.
Mercredi, la Commission européenne a adopté une série de lignes directrices et de recommandations pratiques dans le but de sauver ce secteur économique et d’éviter une nouvelle vague d’infections. Ce paquet tourisme et transports englobe une stratégie de reprise globale, une approche commune pour le rétablissement de la liberté de circulation et la levée des restrictions aux frontières intérieures de l’UE, un cadre pour soutenir le rétablissement progressif des transports tout en assurant la sécurité des passagers et du personnel, une recommandation pour faire des bons à valoir sur les voyages une alternative intéressante aux remboursements en espèces pour les consommateurs, et les critères applicables à la reprise progressive et en toute sécurité des activités touristiques ainsi qu’à l’élaboration de protocoles sanitaires pour les établissements d’hébergement tels que les hôtels.
Un avoir au lieu d’un remboursement
Reste qu’en attendant que ces recommandations et lignes directrices soient appliquées, les clients consommateurs de voyages n’osent rien planifier ou sont perdus en cas d’annulation de leurs vacances. Plusieurs cas de figure se posent que les experts du Centre européen des consommateurs (CEC) ont éclairé jeudi en se basant sur la règlementation européenne 261 2004 applicable dans tous les pays d’Europe. Elle prévoit, en temps normal, qu’en cas de vol annulé, la compagnie aérienne doit s’acquitter d’une indemnisation forfaitaire et du remboursement des billets aux passagers.
Mais le transporteur peut être exonéré de compensation en cas de circonstances extraordinaires qui ne sont pas de son ressort. Ce qui est le cas actuellement. Toutefois, la compagnie aérienne doit rembourser les passagers. Compte tenu du nombre important de demandes d’annulation, les compagnies aériennes et les plateformes de vente de billets préfèrent imposer un avoir ou un bon d’achat. Une méthode réprouvée par les associations de consommateurs, mais stratégique pour le secteur qui peut ainsi conserver des liquidités et éviter les faillites.
En ce qui concerne l’annulation des voyages organisés, la crise sanitaire arrivant, les États membres ont pris des mesures dérogatoires pour le remboursement de ce type de voyages. Si en Allemagne, la législation n’a pas changé, en Belgique et en France, les mesures dérogatoires autorisent la remise de «vouchers».
Et les annulations de festival ?
Au Luxembourg, seule une suspension de quelques semaines des remboursements est prévue jusqu’à la fin de l’état de crise. En cas d’annulation d’un séjour à l’hôtel, les consommateurs doivent vérifier les conditions du contrat qui les lie avec cet hôtel. Tout comme en ce qui concerne les services sur les lieux de vacances, il n’existe pas de règlementation européenne en la matière. Par contre, si l’hôtel est contraint d’annuler le séjour, il est obligé de rembourser les clients ou de proposer un avoir.
Dernier cas de figure évoqué jeudi, l’annulation de manifestations comme des festivals par exemple. Si certains billets restent valables pour l’année suivante, il se peut que leurs propriétaires souhaitent un remboursement. Les experts du CEC conseillent de consulter les conditions d’achat des billets. Elles font foi, pandémie ou pas. Aucune réglementation européenne n’existant sur la question, le droit national des États membres prime.
Dérogations exceptionnelles
Comme pour les voyages organisés, certains pays ont mis en place des règles dérogatoires exceptionnelles face à la situation actuelle. Mieux vaut donc se renseigner avant d’agir. L’issue de la crise dans le temps étant incertaine, la décision d’annuler ou non un voyage est personnelle. La règle d’annulation pour cas de force majeure ne sera peut-être plus applicable dans un mois, de même tarder à annuler un voyage peut faire grimper les frais d’annulation… Les experts du CEC conseillent de surveiller les plans de déconfinement des divers pays et de suivre leurs actualités avant de prendre une décision. Autre conseil, tenter d’arranger les cas d’annulations à l’amiable en contactant les opérateurs ou compagnies de voyages.
La visibilité est nulle. La situation est inédite, c’est pourquoi la Commission européenne prépare un mécanisme de gestion de crise dans le secteur du tourisme.
Sophie Kieffer