Une étude publiée vendredi dans la revue médicale The Lancet affirme que 13% de la population mondiale est obèse. Le Luxembourg n’échappe pas à ce constat, avec un taux d’environ 15% d’obèses.
C’est à peine sorti du bloc opératoire que le Dr Santiago Azagra a accepté, vendredi, de commenter les résultats de l’étude publiée dans la prestigieuse revue médicale britannique The Lancet. « Il s’agit d’une étude solide et contrôlée », souligne-t-il d’emblée, la réputation de la revue n’étant, en effet, plus à faire.
Chirurgien au sein de la clinique de l’obésité, le Dr Santiago Azagra intervient dans ce qu’il nomme «la chaîne» de traitement de l’obésité, à savoir au niveau de ce que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) classe dans la catégorie des obésités de grade III, soit le cas le plus important de l’obésité.
Reconnue comme «maladie» par la même OMS en 1997, l’obésité se définit par un indice de masse corporelle (IMC) égal ou supérieur à 30, chiffre qu’on obtient en divisant le poids (en kg) par la taille (en mètre) au carré.
Deux types d’opération privilégiés
Cela étant, les interventions chirurgicales n’interviennent donc qu’à partir d’une obésité supérieure à un IMC de 40. « Cela correspond à une personne dont le poids fait environ deux fois la taille d’une personne, selon la formule de l’IMC », souligne le Dr Santiago Azagra.
D’autres cas nécessitent néanmoins aussi de passer par la case bloc opératoire. « Il peut s’agir de patients ayant un IMC de 35 auquel s’ajoute une maladie grave, telle que le diabète ou des apnées du sommeil », complète le chirurgien. « En termes d’interventions chirurgicales, cela représente 160 à 200 opérations par an », précise-t-il encore.
Au niveau des types d’intervention chirurgicale pratiqués, la clinique de l’obésité utilise avant tout la technique dite du «by-pass gastrique», qui consiste à réduire le volume de l’estomac et à modifier le circuit alimentaire. « Il s’agit de notre premier choix d’intervention », explique le Dr Santiago Azagra.
Ce type d’intervention, réversible, existe depuis les années 1970 et donne de très bons résultats, selon le médecin : « Cette intervention permet une perte d’excès de poids entre 60-70%, ce qui représente en général une perte de poids de 30 à 40 kg. Cela dit, il existe tout de même certains inconvénients, car le patient qui subit un by-pass est contraint de prendre des suppléments vitaminiques à vie. »
En deuxième lieu, le chirurgien opte pour la «sleeve gastrectomie», opération dont le but est de retirer une grande partie de l’estomac, pour former un tube. Mais l’inconvénient de cette seconde technique est que l’ablation d’une partie de l’estomac est irréversible.
Enfin, il existe également la technique de l’anneau gastrique, rendue célèbre par l’ancien footballeur Diego Maradona. « Nous ne faisons plus ce type d’intervention et plusieurs pays, tels que la Belgique et l’Espagne, l’ont abandonnée : le système d’anneau ne tient pas la route sur le long terme », précise le Dr Santiago Azagra.
Une éducation précoce pour contrer l’obésité
En ce concerne les origines de l’obésité, le Dr Santiago Azagra se veut catégorique en balayant d’un revers de main certaines idées reçues : « L’obésité génétique est très rare », estime-t-il. L’origine de la maladie réside essentiellement dans l’hygiène de vie de tout un chacun, selon lui. « Les habitudes alimentaires de type fast-food et le manque ou l’absence d’exercice physique sont autant de facteurs explicatifs », indique le chirurgien, pour qui l’éducation et la sensibilisation à des modes de vie sains doivent intervenir dès le plus jeune âge. « Les familles, les politiques et les écoles ont toutes leur part de responsabilité dans la conscientisation de la société », poursuit le Dr Santiago Azagra.
Car les risques liés à l’obésité sont graves : « Maladies cardiovasculaires, cancers, déficits immunitaires, raccourcissement de l’espérance de vie, diminution de la résistance à l’effort physique, etc. »
Enfin, si l’obésité touche tous les milieux sociaux, le chirurgien du CHL constate cependant qu’obésité et précarité sont souvent liées. À l’inverses des couches sociales aisées qui se tourneront davantage vers « la culture du corps, les légumes et produits bios ».
Claude Damiani
La clinique de l’obésité en bref
Située au sein de la maison médicale du site du CHL Eich, la clinique de l’obésité a pour objectif d’améliorer la qualité de la prise en charge médicale du patient obèse pour mieux organiser son parcours s’il est candidat à la chirurgie ou si le patient nécessite un suivi médico-diététique. L’obésité est une maladie multifactorielle par ses causes génétiques, comportementales et psychologiques et elle a des conséquences psychologiques, médicales et physiques.
L’équipe pluridisciplinaire de la clinique de l’obésité fonctionne sous la coordination d’une infirmière et se compose d’endocrinologues, de diététiciens, de psychiatres, de psychologues, de chirurgiens spécialisés en chirurgie bariatrique et d’autres spécialistes, selon les besoins spécifiques du patient. Le Dr Santiago Azagra, qui y exerce, est notamment diplômé en chirurgie générale de l’université libre de Bruxelles.