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Égalité des sexes au Luxembourg : un plan pas assez concret


Le Conseil national des femmes du Luxembourg reste sur sa faim. (photo archives LQ/Fabrizio Pizzolante)

Le Conseil national des femmes a rendu son avis au sujet du Plan d’action national pour une égalité entre les femmes et les hommes : il n’est «pas assez concret».

Le Conseil national des femmes du Luxembourg (CNFL) attendait plus de ce plan national, explique celle qui le dirige, Anik Raskin. 

Le CNFL se dit «déjà content qu’un tel document existe» et salue le fait que le «gouvernement continue à avoir un ministère dédié à l’égalité entre femmes et hommes». Cela étant, le conseil aurait apprécié que ce Plan d’action national pour une égalité entre les femmes et les hommes soit davantage concret, d’après Anik Raskin. «Car le plan, en lui-même, reprend principalement des mesures de sensibilisation, des campagnes… Il contient des concepts très flous qui ne sont pas explicités ou qui interrogent sur leur mise en pratique. Ce plan avance, par exemple, la création d’un poste de responsable de l’égalité des chances (Gleichstellungsbeauftragte), mais sans qu’on sache concrètement qui sera cette personne, comment elle sera engagée, quels seront son pouvoir et ses missions…. Idem pour l’Observatoire de l’égalité qui est annoncé, et quant à son mode de fonctionnement, sa composition…»

De manière générale, le CNFL considère que ce plan de la ministre Taina Bofferding est très vague. Il regrette qu’il «n’y ait pas de mesures concrètes, législatives, qui seraient quand même très faciles à prendre. En fait, ça ne va pas plus loin que les plans précédents : c’est la même mouture, mais sous une autre forme».

Publicité sexiste, délai de prescription…

À titre d’exemple, pour étayer ses propos, Anik Raskin souligne qu’«il paraît complètement incompréhensible qu’un plan parle de sensibiliser à la publicité sexiste, alors qu’elle est déjà interdite par la loi». Elle poursuit : «Autre exemple : nous avons un délai de prescription très court – dix ans – par rapport aux agressions sexuelles et aux viols. Cela fait des années que nous demandons que ce délai soit étendu, notamment parce qu’il est internationalement reconnu que le choc post-traumatique fait que ces dix ans sont dérisoires et qu’ils n’ont aucun impact. Alors, pourquoi aucun projet de loi n’est élaboré à ce sujet ? À quel niveau se situe le blocage ? Aucune idée…»

Anik Raskin souligne toutefois que certaines choses ont le mérite d’être signalées : «Les points identifiés dans le plan (NDLR : égalité professionnelle, violence domestique…) correspondent vraiment aux domaines sur lesquels il faut travailler. Les priorités dégagées sont tout à fait pertinentes. Ce qui est également très positif, c’est que la ministre actuelle met un accent réellement très fort sur l’éducation dans ses discours.»

Cependant revient toujours le même bémol : «À nouveau, dans l’action concrète, cela devient moins incisif. De manière générale, il n’y a rien de vraiment innovant. C’est structuré de façon différente, mais, mis à part la promotion de l’engagement citoyen et politique, je ne vois pas trop ce qu’il y aurait de nouveau par rapport aux plans antérieurs.»

Cela n’empêche pas le CNFL de rester «optimiste» et de «soutenir chaque action qui puisse, d’une façon ou d’une autre, contribuer à l’avancement de l’égalité».

Claude Damiani

«Un très mauvais élève»

Sur certains points, le Luxembourg souffre de la comparaison avec les autres pays de l’Union européenne, selon Anik Raskin. «Le pays est un très mauvais élève en ce qui concerne la précarité des familles monoparentales, mais aussi en ce qui concerne les pensions directes que les femmes touchent par rapport aux hommes. Il y a une énorme différence par rapport aux autres pays de l’Union. Il faudrait très sérieusement légiférer sur ces questions. Pour les pensions, par exemple, il serait temps qu’on introduise l’individualisation et que, parallèlement, on fasse un partage des droits obligatoires en cas de rupture d’une union, ce qui n’est toujours pas le cas, car cela se fait simplement sur une base volontaire. Par ailleurs, il faudrait revoir nos taux d’imposition, nos catégorisations d’imposition. On en parle depuis des années, et malgré une multitude de conférences et la mise en place de groupes de travail, on n’avance pas! Ce sont ces points-là qu’il faudrait prioriser avant toute chose.»