Claudia Monti est d’avis que la situation actuelle à l’Unisec est exceptionnelle, due aux conséquences de la pandémie. Mais les mineurs non accompagnés n’y ont pas leur place, selon elle.
L’unité de sécurité pour mineurs de Dreiborn (Unisec) affiche complet et le parquet ne peut plus y transférer de jeunes délinquants qui, faute de place, sont relâchés. Il n’en fallait pas moins pour déclencher une polémique sur la population hébergée à Dreiborn. Sur les douze places, la moitié sont occupées par des mineurs non accompagnés, un fait que le contrôleur externe des lieux privatifs de liberté (CELPL) est allé vérifier.
Si tous les mineurs hébergés à l’Unisec «ont commis des faits qualifiés d’infractions graves et ont dès lors un profil tout à fait comparable», tous n’ont pas leur place dans cette structure qui s’engage à «resocialiser le délinquant» et lui offrir «un plan de vie», déclare Claudia Monti. Le CELPL qui avait entendu des tas d’informations sur les problèmes de l’Unisec, pas toujours vraies, s’est entretenu avec les acteurs de terrain pour comprendre la situation.
Si la population des jeunes désœuvrés augmente, c’est une des conséquences de la pandémie. «Beaucoup d’infrastructures de prise en charge par des éducateurs étaient fermées, les établissements scolaires aussi ou fonctionnaient virtuellement. Il y a eu des décrochages scolaires, plus de consommation de drogues et plus de passages à l’acte qui sont autant de glissements que les éducateurs n’ont pas pu déceler», observe Claudia Monti.
Elle pense que la situation peut se normaliser dans six mois à Dreiborn, mais le problème du placement des mineurs non accompagnés reste entier. «Il leur faut une autre structure, plus axée sur l’inclusion et la réinsertion, par exemple. J’entends dire qu’il faut signer des conventions pour rapatrier les mineurs dans leur pays d’origine. Je ne pense pas que cela soit la solution», nous confie le médiateur, chargé du contrôle des unités fermées.
Ces mineurs, pour la plupart, ne viennent pas au Grand-Duché pour voler mais pour survivre et ceux-là il faut les détecter et s’en occuper, selon Claudia Monti. «Si on les chasse, ils vont revenir par une autre voie parce qu’ils fuient toutes sortes de violences et il y a une responsabilité humaine qui nous interdit de dire que ce n’est pas notre problème», insiste le contrôleur, consciente que «personne n’a de baguette magique», pour trouver une solution toute faite.
En tout cas, l’Unisec sait que ces jeunes mineurs non accompagnés vont leur échapper et ce n’est pas l’endroit adéquat pour travailler avec eux sur leurs perspectives et encore moins à long terme. «Le problème des mineurs délinquants ne date pas d’hier», lance Claudia Monti. Il a urgence depuis longtemps et elle a donc pris sa plume pour rédiger quelques recommandations. D’abord, il faut garder à l’esprit qu’une réforme du droit de la jeunesse est en cours et que celle-ci «entraînera très probablement la conception de nouvelles infrastructures adaptées aux besoins».
Tout sauf la prison
En attendant, il faut continuer à miser sur le travail préventif : sensibiliser sur les dangers de l’usage de stupéfiants, créer une offre en matière d’éducation interculturelle, perfectionner la reconnaissance précoce de signes de violence ou tout autre mauvais traitement et insister sur les moyens de plainte à la disposition des jeunes.
À part ce travail préventif, le CELPL recommande d’élaborer un concept pour l’accueil et la prise en charge des mineurs non résidents, d’intensifier la collaboration avec les unités psychiatriques pour les problèmes graves de stupéfiants et d’améliorer les conditions de travail des professionnels prenant en charge les mineurs avec un profil plus compliqué.
Tout sauf un mineur en prison. Le parquet a déjà la possibilité de demander au juge de la jeunesse de procéder à un placement en prison pour un mineur à partir de 16 ans. Mais les organismes qui veillent aux droits humains et en particulier aux droits des enfants voient cette démarche d’un très mauvais œil et le ministère de la Justice n’apprécie pas non plus.
Claudia Monti tempère : «Au CELPL, nous ne sommes pas radicalement opposés à envoyer un mineur en prison mais cela doit rester l’ultime possibilité pour lui. En règle générale, il faut éviter d’envoyer des mineurs en prison», conclut Claudia Monti.
Pour couper court à toutes les déclarations glanées ici et là le temps d’une petite polémique, le CELPL tient à préciser que le problème de l’Unisec ne tient pas à des placements non justifiés, à une absence de critères légaux ni à une population trop hétérogène.
Geneviève Montaigu