L’association Protransplant.lu tire la sonnette d’alarme. Contrairement à ce que prévoit la loi, on ne prélève pratiquement plus d’organes.
L’année dernière, seules trois personnes décédées ont donné un organe au Grand-Duché. Ce chiffre, le plus bas enregistré alors que la population ne cesse d’augmenter, illustre une situation catastrophique.
Le Luxembourg est un pays riche, généreux, doté d’infrastructures hospitalières de très haut niveau et on loue la plupart du temps l’ouverture d’esprit de ses habitants. A priori, tous les signaux sont au vert pour que le don d’organe soit bien ancré dans les mœurs. Eh bien pas du tout, c’est même le contraire. Statistiquement, «il n’y a que cinq pays au monde où l’on prélève moins d’organes qu’au Luxembourg, avance Jos Bourg, président de l’association Protransplant.lu, transplanté du foie. C’est catastrophique».
Les pays voisins sont pourtant généralement de bons élèves en la matière. La Belgique est particulièrement vertueuse avec 32 donneurs par million d’habitants. La France est dans la bonne moyenne avec 27 donneurs. L’Allemagne se situe un peu derrière avec 11 donneurs. Au Luxembourg, on est à… 5. «On ne peut même pas dire que l’explication soit culturelle puisque même l’Église nous soutient», souligne Christiane Bourg, fille de Jos. Alors pourquoi, sur ce sujet, le Grand-Duché est-il un pays sinistré?
Un des problèmes essentiels est la frilosité des médecins à procéder à des prélèvements. Une réticence entretenue par la loi du 25 novembre 1982, qui attend d’ailleurs toujours plusieurs règlements grand-ducaux pour l’adapter aux nouvelles directives européennes. Le texte est pétri de bonnes intentions… mais il manque de clarté. Il proclame que chacun est donneur tant qu’il n’a pas déclaré de son vivant le contraire par écrit. Oui, mais le médecin est dans l’obligation de demander l’accord de la famille. Or, le deuil n’est sans doute pas le moment propice pour évoquer la question avec les proches.
Il faut également préciser que la Caisse nationale de santé n’a pas établi de tarifications ciblées pour le remboursement des prélèvements d’organes. Les hôpitaux et les chirurgiens ne trouvent donc aucun intérêt financier dans l’affaire.
Le pays profite, mais ne donne pas
L’association milite pour «mettre en place une chaîne autour du don d’organes», explique Jos Bourg. Un médecin responsable de cette problématique devrait être nommé dans chaque hôpital, il expliquerait les tenants et les aboutissants de ce pur acte de générosité et éclairerait les familles. Ce collège établirait une liste d’attente officielle, document qui n’existe toujours pas.
Logiquement, ce constat dramatique devrait indiquer que, faute de donneurs, il est pratiquement impossible à un résident luxembourgeois de recevoir un nouvel organe. Mais heureusement, la solidarité prévaut, car le pays fait partie du réseau Eurotransplant qui fédère huit pays. Grâce à sa proximité avec le bon élève belge, le Luxembourg peut même se targuer d’un délai d’attente moyen très bas : moins de trois ans. En Allemagne, entre huit et dix ans de patience sont nécessaires. «Nous ne faisons que profiter de cette caisse de solidarité, sans rien donner», râle Jos Bourg.
Pour inverser la tendance, l’association Protransplant.lu rappelle qu’il est important de faire savoir à son entourage si l’on est d’accord ou pas pour que soient prélevés des organes en cas de décès. En collaboration avec le ministère de la Santé, l’association délivre également un passeport de vie au format carte de crédit que l’on peut glisser dans son portefeuille après avoir coché son choix. Cette décision, d’ailleurs, n’a pas vocation à être définitive. On a le droit de changer d’avis.
À l’occasion de la journée mondiale du Don d’organes, le 17 octobre, Protransplant.lu va distribuer une brochure dans toutes les boîtes aux lettres du pays. Un passeport de vie sera glissé à l’intérieur.
Erwan Nonet
Courriel : info@protransplant.lu
Tél. : 691 53 53 53