Certains parkings du Grand-Duché proposent des emplacements réservés aux femmes. Une initiative privée qui peut même, dans certaines communes, être étendue à l’espace public. Bienveillance ou sexisme ?
Si la loi sur l’accessibilité impose un quota de places réservées aux personnes à mobilité réduite (une place pour cinquante), elle ne prévoit rien concernant les femmes. Et pour cause, d’aucuns y verrait là la marque d’une politique sexiste. Pourtant le propos se défend. Et notamment pour les mamans se déplaçant avec de jeunes enfants en poussette. L’Allemagne a d’ailleurs été pionnière en la matière dans les années 1990, puisque dans certains états fédérés comme celui de Brandebourg, le nombre de places réservées à la gent féminine (Frauenparkplätze) atteint même 30%.
Au Grand-Duché aussi, certains parkings proposent, dans une moindre mesure, ces emplacements dédiés : sept à Monterey (340 places), huit au parking du Rond-Point Schuman (270), onze au Knuedler (750 places après travaux) et quinze au parking Neipperg (678 places) à Luxembourg Ville.
« La décision appartient à la volonté du propriétaire », souligne le porte-parole du ministère de l’Égalité des chances. « C’est une initiative privée étendue à l’espace public par certaines municipalités », précise encore le fonctionnaire ministériel qui cite notamment les communes d’Echternach et d’Esch-sur-Alzette. La Ville de Luxembourg, elle, n’impose pas de réglementation en la matière : « La mise en place d’emplacements de ce type est décidée au cas par cas, en fonction de la situation géographique et de la configuration de chaque parking », explique Patricia Kariger, la responsable de la communication.
« Pour nous, ministère de l’Égalité des chances, c’est toujours problématique de réserver des espaces aux dames. Les espaces familles sont plus opportuns dans la mesure où certains papas peuvent eux aussi être seuls avec leurs enfants. »
« C’est rassurant »
Une tonalité que défendent aussi les féministes qui voient dans l’attribution de ces places « plus larges et plus visibles » une mesure destinée à renforcer le stéréotype selon lequel les femmes ne savent pas se garer. Condescendance pour les uns, bienveillance pour les autres, la question divise dans la sphère idéologique. Sur le terrain, beaucoup moins.
Situées au plus près des sorties piétons ou des caisses automatiques, au même titre que les places réservées aux personnes à mobilité réduite, ces emplacements sont avant tout pensés pour faciliter la montée et la descente des enfants et le chargement/déchargement de la poussette. Un confort que les mères (et les pères) de famille apprécient.
Mais ces places réservées à la gent féminine le sont aussi pour une tout autre raison : renforcer la sécurité des femmes seules. « Ils sont toujours à proximité du gardien ou à des endroits couverts par la vidéosurveillance », rappelle-t-on à la Ville de Luxembourg. C’est le cas notamment des park and ride (P + R) souvent isolés et où les places réservées aux femmes se situent aux endroits les mieux éclairés comme au P + R de Frisange (trente places réservées aux dames).
« Vers 20h, quand je rentre du travail, il n’y a pas un chat et il fait nuit noire. Avoir sa voiture garée tout près de l’entrée/sortie, c’est rassurant », confie Marie, une Hettangeoise qui emprunte régulièrement la ligne 323 qui dessert Luxembourg et Kirchberg. Pour cette cadre du secteur bancaire, sa sécurité vaut bien de s’asseoir, pour une fois, sur le principe d’égalité.
Catherine Roeder (Le Républicain Lorrain)