Le défenseur des enfants, désormais institutionnalisé dans son rôle, a dressé jeudi le bilan de son mandat et défriché des pistes pour son successeur. Pour l’Ombuds-Comité fir d’Rechter vum Kand (ORK), 2020 a été une année de transition.
L’Ombudsman René Schlechter aime dire que pour ses dix-huit ans, sa majorité, il entame une nouvelle partie de son existence. Et cela est passé par un changement de statut qui entraîne un changement de nom. «Le comité n’existe plus», indique René Schlechter, puisque le Luxembourg dispose depuis la loi du 1er avril dernier d’un Ombudsman fir Kanner a Jugendlecher (OKaJu), un défenseur des enfants et des jeunes, aux compétences élargies puisque institutionnalisées. «L’année prochaine, nous allons recruter pour assurer des tâches que nous ne remplissions pas pour le moment.
Entre autres, la promotion des droits de l’enfant dans les écoles», poursuit l’Ombudsman qui n’aura pas pu profiter des nouveaux locaux dans la Mënscherechtshaus, la Maison des droits de l’homme, route d’Arlon, plus propices à l’accueil des familles que les anciens locaux de la rue du Fort Wallis. La pandémie de Covid-19 a éclipsé cette avancée considérable. Tout comme elle a réduit le nombre de nouveaux dossiers ouverts concernant des violations des droits de l’enfant : 130 ont été ouverts en 2018, 157 en 2019 et 103 cette année. La majorité concernaient des droits de visite de parents, des enfants demandeurs d’asile dont les familles ont été déboutées ou des enfants migrants. «Ces familles doivent être renvoyées en Grèce ou en Italie, par où elles sont entrées en Europe. Elles ont quitté ces pays dans l’espoir de meilleures conditions de vie, explique René Schlechter. Ces retours sont une catastrophe pour les enfants qui doivent vivre dans des conditions déplorables et n’ont pas accès à une scolarisation adéquate.»
Du pain sur la planche
Les droits de l’enfant sont multiples. C’est pour cette raison que l’OKaJu a souhaité être sous la tutelle du ministère d’État. «Nous voulons montrer que les droits de l’enfant ne concernent pas un unique ministère, mais traversent les compétences de différents ministères. Si nous voulons une bonne coordination des travaux réalisés en ce sens, il faut centraliser. Le ministère d’État semble donc une bonne solution», estime l’Ombudsman. Car si l’ORK est parvenu à certaines avancées sous les présidences de Marie-Anne Rodesch et de René Schlechter, il reste du pain sur la planche dans l’intérêt des enfants. L’OKaJu se félicite notamment d’avoir fait changer la loi sur le divorce et d’avoir abouti à la création d’un juge aux affaires familiales, ainsi que d’avoir donné la possibilité aux mineurs transgenres de modifier leur sexe et leur nom à l’état civil. D’autres dossiers comme celui de la protection de la jeunesse sont de longue haleine.
«Il y avait un volet dans chaque rapport annuel de l’ORK, se souvient René Schlechter. Je suis heureux que la loi soit remise sur le métier pour créer une législation qui prévoit des peines et des règles donnant plus de sécurité juridique que celles en vigueur actuellement.» L’OKaJu, comme l’ORK avant lui, a pour mission de protéger les enfants et les jeunes contre les discriminations, la violence physique ou mentale, les abus, la négligence et l’exploitation, ainsi que de veiller à ce que soit tenu compte de leur opinion et de s’assurer que leur droit à l’éducation et aux soins de santé soit respecté. D’où les craintes qu’éveille la situation au Luxembourg en matière de logement auprès de l’Ombudsman et de son équipe.
«Nous sommes confrontés à de nombreux cas de familles à la rue ou de mères célibataires coincées dans des foyers d’accueil qui ne parviennent pas à trouver de logement, regrette René Schlechter. Le système d’aides repose sur la nécessité d’avoir un logement. Les familles sont exclues de l’accès aux aides qui pourraient les aider à remonter la pente. Ces familles tombent de plus en plus bas.» Les revendications, recommandations et avis de l’Ombudsman sont nombreux et figurent dans son bilan de huit années présenté jeudi. Une sorte de feuille de route pour le prochain Ombudsman.
Sophie Kieffer
Du changement à la tête de l’OKaJu
Après huit années passées à la tête de l’ORK, René Schlechter cède sa place. Son successeur sera nommé au mois de décembre par les députés en séance plénière. Depuis le vote de la loi du 1er avril 2020, l’Ombudsman est rattaché à la Chambre des députés. La description de poste a été affichée sur le site de la Chambre des députés le 21 octobre et les candidatures devaient être soumises avant le 4 novembre. La procédure suit son cours.