La présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE a démarré officiellement mercredi. Réputé pour sa capacité à bâtir des ponts, le Grand-Duché est appelé à gérer des dossiers politiques brûlants (migrants, climat, Grèce…) à un moment où l’Europe se trouve en pleine crise. Le pays aura six mois pour insuffler un nouvel élan à l’UE.
Même si le volet politique de la présidence ne débutera que vendredi avec la visite au grand complet de la Commission européenne, tous les yeux sont rivés sur le Luxembourg depuis mercredi. Membre fondateur de l’UE, le Grand-Duché est appelé à la rescousse pour relancer une Europe qui ne cesse de dégringoler. La marge de manœuvre de la présidence luxembourgeoise reste cependant limitée.
« Ce n’est pas nous qui avons le sort de l’UE entre nos mains. » C’est avec cette phrase lourde de sens que le ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn, décrit les limites de la présidence du Conseil de l’Union européenne que le Luxembourg assume depuis aujourd’hui.
Sans le concours et l’apport des 27 autres pays membres, il sera en effet très compliqué pour le Luxembourg de faire avancer les grands dossiers brûlants qui l’attendent pendant cette douzième présidence européenne. Le poids d’une présidence a lui aussi diminué depuis l’entrée en vigueur en 2009 du traité de Lisbonne, qui est venu redessiner les institutions européennes.
Le Conseil de l’UE, réunissant les chefs d’État et de gouvernement, est en effet dirigé depuis par un président permanent.
Des succès historiques
Depuis fin 2014, ce poste incombe au Polonais Donald Tusk. Les réunions au sommet ont toutes lieu à Bruxelles. Par le passé, ces sommets se tenaient dans le pays qui avait la présidence. Même si le poids a changé et que la présidence doit se «contenter» de réunions ministérielles informelles, le défi qui attend le Luxembourg dans les six mois à venir est de taille.
La présidence luxembourgeoise aura en effet à gérer plusieurs dossier brûlants, dont dès la semaine prochaine celui de la migration. Après le récent refus du Sommet européen d’imposer des quotas obligatoires, il reviendra à Jean Asselborn et à son équipe de trouver une solution pour répartir les 60 000 réfugiés actuellement bloqués en Italie et en Grèce.
Si la crise de la dette grecque devrait moins directement toucher la présidence luxembourgeoise, sa finesse diplomatique et sa capacité à construire des ponts seront également utiles dans ce dossier. Il en va de même pour les conflits internationaux (Ukraine, Russie…).
Autre grand chantier : la relance économique et la lutte contre le chômage. L’objectif de la présidence est d’ailleurs de mettre les citoyens au cœur des préoccupations politiques.
Il reviendra également au Luxembourg d’unir l’UE en vue de la conférence sur le climat de décembre à Paris.
L’agenda est donc bien chargé. Il est à espérer que l’esprit européen qui règne sur le plateau du Kirchberg va positivement influencer les débats. Jusqu’à présent, les présidences luxembourgeoises étaient souvent couronnées de succès, même historiques. Les bases pour le traité de Maastricht, la zone euro ou même l’élargissement de l’UE ont été posées au Luxembourg. Au vu de la crise actuelle, un succès retentissant sur les migrants ou le climat ne pourrait que faire du bien à une UE en pleine crise.
David Marques
Photos : Hervé Montaigu
Dans les coulisses du centre névralgique de la présidence
au Kirchberg
La cour d’entrée
Le centre névralgique de la présidence luxembourgeoise est le centre de conférences du Kirchberg. La grande majorité des réunions techniques et ministérielles aura lieu dans ce centre flambant neuf. La cour d’entrée pour l’arrivée des ministres est située à l’arrière du gratte-ciel de la place de l’Europe. Un petit espace est réservé à la presse pour récolter les premières impressions des ministres avant qu’ils n’entament leurs réunions respectives. Les voitures officielles sont garées dans un parking souterrain, accessible depuis la cour. (photo Hervé Montaigu)
La salle de réunion A
Le centre de conférences héberge deux grandes salles de réunion. La salle A est la plus grande et peut accueillir jusqu’à 600 personnes. Dans la première rangée, ce sont les ministres qui prennent place. Derrière eux sont placés les délégations. Des places sont également réservées pour les représentants de la Commission européenne et du Conseil européen.
Pendant la présidence, la délégation luxembourgeoise sera placée au centre de la salle avec, à ses côtés, la délégation des Pays-Bas, qui va accueillir la prochaine présidence. En face se trouve la Commission européenne. Les autres pays sont installés selon l’ordre alphabétique.
La réunion des ministres des Finances de l’UE en septembre et la réunion des ministres des Affaires étrangères de l’ASEM (Asian-Europe Meeting) en novembre seront les deux seules réunions ministérielles organisées dans cette grande salle. Elle sera cependant aussi utilisée pour de nombreuses réunions techniques, avec à la clé, des centaines de participants.
La salle de réunion B
La salle de réunion B est la deuxième plus grande salle du centre de conférences. Elle sera la principale salle de travail pour la plupart des réunions qui auront lieu d’ici le mois de décembre à Luxembourg. Mieux éclairée, elle avantage aussi le travail des photographes et des caméras TV. L’acoustique de cette salle ovale est semblable à celle d’une salle de théâtre. Comme toutes les autres salles de réunion et de travail du centre de conférences, elle possède des cabines de traduction, outil indispensable pour les réunions européennes.
La salle de réunion D
La salle D est sans aucun doute une particularité mais aussi une attraction du centre de conférences. Alors que le bâtiment a été rénové de fond en comble avant de reprendre du service en 2012, cette salle de réunion a été laissée intacte. L’architecture mais aussi le mobilier est resté en place. La cause? De nombreux chapitres de l’histoire européenne ont été écrits dans cette salle. En 1995, le sommet européen, organisé à l’époque à Luxembourg a ainsi validé ce qui allait devenir l’Eurogroupe. Dans la même salle, l’élargissement de l’UE, devenue une réalité en 2004, a été décidée. Pendant cette présidence 2015, elle servira toujours. Vendredi, elle accueillera ainsi la réunion entre le gouvernement luxembourgeois et la Commission européenne.
Photo de famille
Si les ordres du jour des réunions varient fortement, il existe un point qui ne manque jamais : la traditionnelle photo de famille réunissant les 28 ministres européens présents.
La présidence luxembourgeoise n’échappera pas à la règle et un grand podium est installé près de l’entrée du centre de conférences.
Avec les 54 délégations attendues en novembre pour la réunion de l’ASEM, les places vont devenir chères sur le podium luxembourgeois.
Le centre de presse
Le Centre de conférences possède également un centre de presse spacieux avec des postes de trvail pour 470 journalistes. Tous les postes sont équipés d’un téléphone fixe ainsi que de prises d’électricité. Un réseau wi-fi est bien entendu disponible gratuitement. Le centre de presse comprend des podiums et des cabines de montage pour les journalistes TV et radio.
La salle de conférence
C’est dans la grande salle de conférence que les ministres présentent les conclusions de leurs réunions et répondent aux questions des journalistes. Elle est dotée de cabines de traduction. Trois langues seront de mise lors des points presse : l’anglais, le français et l’allemand. Le podium est modulable en fonction du nombre de participants à la conférence de presse.
Les autres antennes
Si le centre de conférences du Kirchberg sera la base de cette présidence luxembourgeoise, d’autres salles de réunion et sites ont été réquisitionnés pour compléter la demande logistique.
Au mois d’octobre, le centre de conférences n’est en effet pas à la disposition de la présidence en raison des réunions des Conseils des ministres de l’UE, qui ont un caractère plus formel que les réunions informelles organisées pendant la présidence. Ces réunions de Conseil ont lieu trois fois par an au Luxembourg.
Pour combler ce vide, la présidence a également loué des salles de réunion à la Chambre de commerce, à la Banque européenne d’investissement, à la Maison du savoir de Belval, à l’abbaye de Neumünster, à la Coque et au domaine thermal de Mondorf-les-Bains.
Les limousines
Le groupe BMW a été choisi pour devenir le transporteur officiel de la présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE. Le constructeur automobile met à la disposition de la présidence 89 véhicules officiels. Parmi ces voitures figurent des BMW Série 7, Série 5 et aussi la toute nouvelle BMW Série 2 Gran Tourer.
La sécurité
Pendant toute la durée de la présidence, le Kirchberg restera accessible pour le trafic. Il n’est cependant pas à exclure que des rues ou même la place de l’Europe soient momentanément barrées. La rue à éviter est certainement la rue du Fort-Thüngen qui forme l’accès pour l’arrivée des ministres.
Pique-nique géant le 3 juillet
Placée sous le thème «Une Union pour les citoyens», la présidence luxembourgeoise souhaite impliquer au mieux la population. Dès vendredi, un grand pique-nique européen sera ainsi organisé dès 16 h à la place d’Armes de Luxembourg pour lancer la présidence. Le gouvernement et la Commission européenne vont se joindre à la fête.
La présidence en chiffres
6
Le Luxembourg préside pour six mois le Conseil de l’UE. Il prend le relais de la Lettonie et va céder, au soir du 31 décembre prochain, le flambeau aux Pays-Bas.
12 Pour la douzième fois depuis 1958, le Luxembourg assumera une présidence européenne. La première date de 1960. Les autres années de présidence sont 1963, 1966, 1969, 1972, 1975, 1980, 1985, 1991, 1997 et 2005.
21
À 21 reprises, des réunions ministérielles seront organisées à Luxembourg. Il s’agit de conseils informels sur différentes thématiques dont la question migratoire et l’environnement, deux enjeux-clés de cette présidence 2015.
93
Le budget pour cette présidence est chiffré à quelque 93 millions d’euros. Il s’agit sensiblement de la même somme que lors de la présidence de 2005, chiffrée à 90 millions d’euros.
240
Entre aujourd’hui et le 31 décembre prochain, un total de 240 réunions de tous les niveaux auront lieu à Luxembourg.
360
Jusqu’à fin juin, quelque 360 journalistes ont ouvert un compte pour pouvoir s’accréditer aux différentes réunions ministérielles organisées dans les six prochains mois. Pour la visite de la Commission européenne de vendredi, qui marquera le lancement officiel de la présidence luxembourgeoise, 160 journalistes sont accrédités.
11 700
La présidence profitera aussi au secteur Horesca du pays. Début juin, quelque 11 700 chambres étaient déjà réservées dans 25 hôtels, ce qui correspond à plus de 24 200 nuitées en six mois. Il n’est pas à exclure que des délégations ne soient contraintes de migrer vers la Grande Région pour se loger.
Aller plus loin :
Le site officiel de la présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE reprend les actualités et l’agenda des réunions et rendez-vous. Il propose aussi de plus amples informations sur le rôle d’une présidence, un historique sur les présidences antérieures du Luxembourg et présente les différentes facettes du Grand-Duché. Un espace consacré aux médias arrondit l’offre très complète du site officiel.
La riche histoire du Luxembourg dans la construction européenne fait l’objet d’un dossier complet et interactif qui est à découvrir sur le site du Centre virtuel de la connaissance sur l’Europe. Le CVCE propose sur sa page internet une sélection de ressources documentaires, de témoignages oraux ainsi qu’une chronologie interactive sur les actions européennes du Luxembourg de 1944 à nos jours.