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Cyclone Idai : un mois après, toujours l’urgence sanitaire


Le cyclone a causé la mort d'au moins 830 personnes, dont 602 pour le seul Mozambique, le pays le plus sévèrement touché. (©MSF)

Un mois après le passage du cyclone Idai, les organisations humanitaires sont toujours déployées au Mozambique, au Malawi et au Zimbabwe pour apporter une aide d’urgence aux populations.

C’était il y a tout juste un mois. Dans la nuit du 14 au 15 mars, le cyclone Idai dévastait la ville portuaire de Beira, au Mozambique. La tempête avait peu avant provoqué de terribles inondations au Malawi, pour terminer sa course folle sur les terres zimbabwéennes.

Au total, le cyclone a causé la mort d’au moins 830 personnes, dont 602 pour le seul Mozambique, le pays le plus sévèrement touché. Près de 240 000 habitations y ont été endommagées, dont la moitié entièrement détruites.

Un mois plus tard, 160 000 personnes sont toujours déplacées. «Un quart des habitants de la ville de Beira, qui en compte 500 000, vit encore dans des centres d’hébergement ou des camps de fortune», alerte Paul Delaunois, directeur général de Médecins sans frontières Luxembourg.

L’organisation, qui travaille depuis 1984 au Mozambique, a déployé plus de 1 000 personnes, dont 700 locaux, pour venir en urgence en aide aux Mozambicains sinistrés.

L’une des priorités de cette mission d’urgence : la réhabilitation des centres de santé. MSF a par ailleurs mis en place des cliniques mobiles et plus de 350 lits pour soigner les malades du choléra. En effet, comme souvent après des inondations dans des zones où l’hygiène s’avère compliquée, la propagation des maladies diarrhéiques est souvent une conséquence désastreuse. Une épidémie de choléra a ainsi été déclarée le 27 mars.

Plus de 700 000 personnes vaccinées

«Aujourd’hui, l’épidémie est contenue, mais on n’est pas pour autant à l’abri : de nouveaux cas continuent d’apparaître», témoigne Karin Huster, référente médicale MSF pour le projet Beira, jointe au téléphone par l’association.

Une bonne nouvelle due pour beaucoup à «la capacité de résilience de ces populations et à l’efficacité du ministère de la Santé mozambicain. Ce n’est pas le cas dans tous les pays», insiste Karin Huster. «En cinq jours seulement, le ministère, avec l’appui technique et logistique de MSF, est parvenu à une couverture vaccinale de 93%. Plus de 700 000 personnes ont pu être vaccinées contre le choléra», fait savoir la référente MSF. «C’est comme si on vaccinait tout Luxembourg», précise Paul Delaunois. «Ce qui est déjà extrêmement difficile dans un contexte structuré l’est bien plus encore après une catastrophe naturelle, lorsqu’il n’y a plus de routes, avec des populations disséminées.»

Pour éviter le risque épidémique, MSF travaille également activement à rendre à nouveau accessible l’eau potable, ce qui demeure une préoccupation majeure à l’heure actuelle.

L’accès à la nourriture reste lui aussi problématique. «Les zones de culture environnant Beira ont été détruites, ce qui menace la sécurité alimentaire», prévient Paul Delaunois. «Les gens ont faim», confirme Karin Huster. «Des distributions ont été organisées, notamment par le PAM (NDLR : le Programme alimentaire mondial, l’organisme d’aide alimentaire de l’ONU), mais certaines zones sont toujours inaccessibles. Et comme les cultures ne donneront rien cette année, il faudra surveiller de près ce problème.»

MSF poursuivra sa mission d’urgence «le temps nécessaire, peut-être encore un ou deux mois», estime Karin Huster, précisant toutefois que «MSF restera ensuite au Mozambique pour poursuivre ses activités habituelles». Et de conclure : «La question du changement climatique se pose : nous sommes en dehors de la période cyclonique. C’est terrible de constater que les pays qui ont le moins contribué au réchauffement climatique paient le plus.»

Une personne sur six porteuse du virus du sida

Le taux de prévalence du VIH est particulièrement élevé au Mozambique. Dans la ville portuaire de Beira, un adulte sur six vit avec le sida. «C’est la première fois qu’un cyclone d’une telle envergure touche un pays avec un tel taux de VIH», assure Karin Huster, référente MSF pour le projet Beira.

Or, suite au cyclone, de nombreux séropositifs n’ont pu bénéficier pendant plusieurs jours voire plusieurs semaines de leurs traitements antirétroviraux, notamment faute d’accès à des centres de santé.

«Les conséquences sont déjà graves pour les séropositifs eux-mêmes, qui risquent des rechutes et sont plus exposés aux risques d’infections opportunistes. En outre, sans traitement, ces personnes redeviennent des vecteurs de transmission.»

MSF a donc créé au sein de l’hôpital général de Beira une salle de soins intensifs spécifique pour les séropositifs atteints du choléra, maladies qui, combinées, sont d’autant plus lourdes à gérer. Quant aux projets réguliers visant à lutter contre cette épidémie, ils ont repris il y a peu mais les conséquences de cet épisode pourraient à long terme être dévastatrices.

Tatiana Salvan