Le président du Parti chrétien-social va affronter ce mardi les siens, en comité spécial, à la suite de ses sorties aux accents sociaux sur l’après-crise. Son idée de mise en place d’un impôt sur le droit de succession, brocardée comme « à gauche », est en fait raccord avec l’esprit originel du capitalisme.
La mesure peut effectivement être perçue comme étant de gauche, puisqu’il s’agit de tendre vers une certaine égalité à la naissance, et que l’on touche sans trop d’embarras à la notion de propriété. Mais elle est tout aussi authentiquement libérale et dans l’essence du capitalisme. À gros traits, l’accumulation de richesse ne peut être le résultat que de deux leviers principaux dans le capitalisme : le travail ou le risque de l’investissement. Se reposer sur ses lauriers – ou permettre à ses héritiers de le faire – n’a jamais été perçu comme un moteur du capitalisme par ses plus fervents pratiquants ! C’est ainsi que Warren Buffet, le milliardaire américain, ou plus charismatique encore Bill Gates, ont annoncé qu’ils céderaient la quasi-totalité de leur fortune (les héritiers conserveront quelques millions…) à des organismes de bienfaisance.
Ce n’est bien entendu pas à une telle extrémité que veut aboutir le président du CSV, mais plus probablement à une forme de correction d’un système luxembourgeois qui, en l’état des choses, a des allures figées. « Une société où le pouvoir économique se transmet sans avoir à faire preuve de mérite est une société condamnée à la croissance lente, où les rentiers l’emportent sur les créateurs », déclarait Philippe Frémeaux, le fabuleux journaliste économique français, ancien directeur d’Alternatives économiques, malheureusement décédé cet été. À la lumière de cette dernière affirmation, on peut se demander si c’est Frank Engel qui s’est éloigné de son parti ou le CSV qui s’est éloigné d’un authentique capitalisme, pour verser dans une forme de programme qui tend à préserver une partie privilégiée de la société. Les jeux sont ouverts, le match se joue ce mardi soir !
Hubert Gamelon