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CSV : « je ne trouve pas normal qu’on marginalise le plus grand parti du pays »


L'eurodéputé Frank Engel est candidat à la tête du premier parti d'opposition (Photo d'archives : Hervé Montaigu).

Frank Engel est l’un des deux candidats à la succession de Marc Spautz à la tête du premier parti de l’opposition (CSV). Le 26 janvier, il disputera le poste face à Serge Wilmes. Deux styles pour un même combat.

Quel style comptez-vous adopter si vous êtes élu à la tête du Parti chrétien-social ?

Frank Engel : Nous sommes dans l’opposition pour la deuxième fois et il doit y avoir des raisons. L’une d’elles, selon moi, est que trop de gens cherchaient une bonne raison de voter CSV. Je constate qu’il y a cinq ans il y avait une certaine commotion à travers le pays après notre éviction et je constate encore que les gens s’y sont habitués. Il faut changer cela. J’adopterai un style rigoureux d’opposition et ne ferai pas comme si nous gouvernions parce que ce n’est pas le cas.

Aviez-vous vu venir le score du CSV le 14 octobre dernier ?

Comme certains autres, j’avais le sentiment que nous allions nous éloigner des sondages trop flatteurs, mais je ne m’attendais pas à une perte sérieuse, car 5 % c’est énorme pour nous. Être dans l’opposition pour la seconde fois consécutive, je ne m’y attendais pas. Mon impression à la fin de la campagne était moins bonne que quelques mois plus tôt. J’anticipais que ce gouvernement allait devenir un gouvernement normal et qu’on s’habitue à tout. Il a bénéficié d’une excellente situation économique, donc il y avait peu de raisons de changer et les gens se sont dit que finalement la coalition à trois ne faisait pas un mauvais travail.

Nous ne sommes pas un club de vieux réfractaires

Est-ce à dire que la coalition tricéphale a su moderniser le pays bien mieux qu’avec le CSV comme partenaire ?

Finalement, on fait trop peu la part des choses. En termes d’avancées sociétales, nous en avions déjà mis en chantier et le CSV a su moderniser notre économie. Je n’aime pas ces procès d’intentions et nous ne sommes pas un club de vieux réfractaires à la modernité. Quand je vois les congrès régionaux, je vois qu’il y a pas mal de jeunes et tout cela représente une dynamique.

Pensez-vous qu’il aurait fallu renouveler davantage le personnel politique en plaçant plus de jeunes sur les listes ?

Pour se faire élire, et c’est le système politique qui veut cela, il faut ramener ses voix. Souvent un jeune n’a pas la même visibilité qu’un élu de longue date. Il n’a pas le degré de notoriété nécessaire pour se faire élire. Comme nous n’avons pas été au gouvernement en 2013, aucun jeune n’a pu bénéficier de la relève de ministre. Il était impossible de faire remonter les jeunes. Je trouve cependant que nos jeunes ont fait de bons scores et j’ai l’impression que les gens veulent des jeunes en politique.

Une logique sectaire de la coalition

Comment acceptez-vous le fait que les trois partis au pouvoir ne veulent plus discuter avec le CSV ?

Cela m’agace au plus haut point pour deux raisons. D’abord je ne trouve pas normal qu’on continue à marginaliser le plus grand parti du pays, et ensuite cela n’est pas justifié car on peut très bien gouverner avec nous. Cette logique est une logique sectaire, comme si les trois partis coalitionnaires incarnaient la bonne modernité et nous les vieux réactionnaires. C’est un narratif dangereux.

Cela vous donne du pain sur la planche…

Il faut montrer que nous avons des idées et le personnel politique pour les incarner et que nous ne renonçons pas à l’ambition de gouverner. On fait comme si on avait eu un jour une majorité absolue au Luxembourg, ce qui n’est jamais arrivé. Ceux qui ont gouverné avec nous ont bien réussi à le faire et ils voulaient toujours rempiler pour une autre législature. Ce n’est pas devenu malpropre de gouverner avec le CSV. Il y a une logique sous-jacente qui est une logique d’éviction. Idéalement, pour nos opposants, nous devrions non seulement disparaître du gouvernement mais de la vie politique.

Votre concurrent, Serge Wilmes, fait partie du Dräikinneksgrupp, laboratoire d’idées du parti, pas vous. Avez-vous assisté à leur rencontre de samedi dernier ?

Je suis allé à la réunion et je pense que c’est une enceinte utile, car nous réfléchissons sur notre sort. Nous essayons de dégager des solutions à nos problèmes et mon impression était plutôt bonne.

Entretien avec Geneviève Montaigu