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Crises sanitaires : le Luxembourg n’est pas à l’abri


si une crise sanitaire majeure se déclarait, le Luxembourg atteindrait rapidement ses limites, comme pour le nombre de vaccins disponibles. (Photo: Pierre Matgé)

Une conférence-débat a porté, vendredi, sur la gestion commune d’une potentielle crise sanitaire entre les États membres et Bruxelles. De par sa particularité géographique et les flux transfrontaliers qui le caractérisent, le Luxembourg fait face à des défis qui lui sont propres.

Qui dit santé publique, dit forcément santé universelle. En ce sens, la cheffe de la représentation de la Commission européenne au Luxembourg, Yuriko Backes, a inévitablement qualifié ce domaine de «sujet qui nous concerne tous». Avant, pour la représentante de l’exécutif européen, d’évoquer «des risques sanitaires d’une nouvelle ampleur. Avec l’accélération de la mobilité et l’avènement des nouveaux moyens de communication se posent de tout nouveaux défis», a d’emblée prévenu Yuriko Backes au cours d’une conférence-débat à la Maison de l’Europe, à Luxembourg.  .

«Une pandémie ne s’arrête pas…»

Il se trouve que le Luxembourg semble en première ligne face à «ces nouveaux défis», compte tenu de la dimension transfrontalière spécifique du Grand-Duché et de ses milliers de travailleurs frontaliers qui effectuent la navette quotidiennement. En effet, comme l’a très justement souligné Yuriko Backes, «une pandémie ne s’arrête pas aux frontières», tandis que le directeur santé publique auprès de la Commission européenne, John-F. Ryan, a rappelé que «les maladies transfrontalières voyagent avec les personnes, mais aussi avec les animaux et les produits».

De manière plus générale, les différents orateurs à la conférence ont déporté le débat au niveau des relations de coopération et de coordination entre l’échelon national – à savoir celui des États membres – et l’échelon supranational représenté par l’UE. Car les politiques nationales de santé s’apparentent souvent à une véritable «chasse gardée» des différents États membres vis-à-vis de Bruxelles, selon les termes d’Anne Calteux, conseillère de la ministre de la Santé, Lydia Mutsch.

Une problématique qui rappelle inévitablement que le droit européen est régi par le fameux principe de subsidiarité, selon lequel une autorité centrale (Bruxelles en l’espèce) n’est compétente pour traiter de dossiers, que lorsque cela ne peut être fait au niveau local (les États membres dans ce cas).

Le Luxembourg n’est pas à l’abri

Or, concernant le Luxembourg, «un défi supplémentaire se pose, de par la petite superficie du pays, mais aussi de par la quantité de moyens et de ressources à sa disposition», dixit Anne Calteux, qui rajoute : «Les États membres sont très attachés au principe de subsidiarité. Or si une crise sanitaire devait se déclarer, le Luxembourg atteindrait rapidement ses limites (NDLR : au niveau du nombre de vaccins disponibles, par exemple).»

D’où la position forcément très pro-européenne du Luxembourg, dans ce contexte : «Nous avons toujours coopéré de manière très étroite avec l’Union et pas que dans le domaine de la santé», a rappelé Anne Calteux, exemple à l’appui. «Lors de la flambée d’Ebola, le ministère de la Santé s’est sérieusement questionné sur l’opportunité de fermer les frontières du Grand-Duché. Au final, les autorités ont avisé négativement cette option sur la base d’une guidance de la Commission européenne qui a fait prévaloir sa volonté d’éviter un mouvement de panique général.»

Car, fort heureusement d’ailleurs, les États membres de l’UE avaient anticipé ce type de questions et pensé à tout, en adoptant, en 2013, ladite «décision 1082» relative aux menaces transfrontières graves sur la santé. Celle-ci entérine, en effet, la création d’un comité de sécurité sanitaire, qui est un groupe informel composé de représentants de haut niveau des États membres. Quant à ses missions, elles vont de la surveillance épidémiologique et de contrôle des maladies transmissibles, au partage d’informations entre États membres, afin que «toute action soit parfaitement cohérente, car coordonnée en amont», selon John-F. Ryan.

Claude Damiani

 

Épidémie de rougeole en Aquitaine : pas d’appel à l’UE

La phénoménale épidémie de rougeole, qui touche actuellement la région bordelaise, et qui a déjà provoqué le décès d’une personne trentenaire, pourrait également poser la question de l’application du principe de subsidiarité. «Non, la France n’a à aucun moment sollicité l’UE pour une quelconque potentielle collaboration», a d’emblée indiqué John-F. Ryan. La cause? «La France est un grand pays qui dispose d’assez de vaccins. Ce qui n’est, par contre, pas le cas de la Roumanie voire de l’Italie.» Soit une preuve supplémentaire du caractère hybride et inégal de cette association politico-économique qu’est l’UE.