Selon le ministère de l’Éducation nationale, il n’y a pas eu d’«effet Covid» sur le taux de décrocheurs au cours de l’année 2019/2020. Le syndicat SEW/OGBL conteste, lui, cette affirmation.
Dans un récent communiqué intitulé «L’Éducation nationale a relevé le défi de la crise Covid-19», le ministère de l’Éducation nationale indique que malgré la pandémie et ses conséquences sur le système scolaire, le taux de décrocheurs reste stable en 2019/2020 par rapport aux années précédentes. Le SEW/OGBL est, lui, sensiblement d’un autre avis.
Au sein de son nouveau rapport («Jeunes décrocheurs et jeunes inactifs au Luxembourg»), le ministère s’intéresse au décrochage scolaire entre les années 2016/2017 et 2019/2020. L’étude porte en effet sur les élèves qui ont quitté le système scolaire au cours ou à la fin de l’année scolaire sans diplôme ni certification. Il en retourne que le taux de décrocheurs a été de 8,16% en 2019/2020 contre 7,97% en 2018/2019, 8,57% en 2017/2018 et 9,29% pour l’année scolaire 2016/2017. «Le décrochage scolaire est en légère diminution», conclut le ministère, tout en affirmant que l’année scolaire 2019/2020 n’a «pas connu d’effet Covid.» Et d’ajouter : «Malgré la pandémie et ses conséquences sur le système scolaire, le taux de décrocheurs reste stable en 2019/2020 par rapport aux années précédentes. La tendance sera à confirmer dans l’analyse des données 2020/2021, qui permettra d’évaluer l’impact des mesures de soutien mises en œuvre à partir de l’automne 2020.»
«Retours du terrain contradictoires»
De son côté, le président du syndicat SEW/OGBL, Patrick Arendt, se montre plus que sceptique : «Les retours que nous avons des écoles sont contradictoires; en effet, on nous dit que les problèmes se sont fortement renforcés pendant la pandémie et qu’il y a un très fort risque de décrochage de certains élèves. Cela me semble évident et je ne vois pas comment le ministère peut dire le contraire, à savoir que le décrochage serait en légère diminution !»
Et Patrick Arendt a une vision bien à lui sur le décrochage : «Pour moi, le décrochage scolaire doit se rapporter aux compétences des élèves. Et l’on voit que beaucoup d’élèves ont des difficultés à suivre les cours, à atteindre des objectifs définis pour chaque année scolaire. Ce qui a fait, les dernières années, un nivellement vers le bas : en rendant les épreuves plus faciles et surtout en comparant les élèves avec eux-mêmes…» Et le président SEW/OGBL de poursuivre : «Donc si le niveau général baisse et qu’on ne compare que les élèves, c’est clair que le niveau reste le même ! Des résultats sont présentés, mais à mon avis, ils ne reflètent pas vraiment la réalité du terrain. C’est un petit peu trompe-l’œil !»
«Pas de mesures contre le décrochage»
Par ailleurs, sur la question de la réponse à donner pour contrer le décrochage, le ministère mentionne des mesures de soutien aux décrocheurs, mises en place par le Service national de la jeunesse (SNJ), telles que «les services volontaires national ou européen, les ateliers avec encadrement individuel ou encore les stages de découverte». Mais une fois encore, Patrick Arendt se montre peu convaincu : «Ces mesures ne sont pas valables et même carrément bidon, car c’est ce qui a été fait l’année passée, pendant les deux dernières semaines des vacances d’été. C’est-à-dire que se sont tenues trois à quatre leçons supplémentaires par élève. Donc, franchement, ce ne sont pas des mesures très valables face au décrochage scolaire.»
En guise de conclusion, il est d’avis qu’«il faut dire que toutes les personnes qui ont été engagées, les dernières semaines et derniers mois, étaient plutôt des personnes non qualifiées, engagées pour être affectées dans les maisons relais, en cas de besoin, si jamais des groupes d’élèves plus restreints devaient être formés. Ce personnel a été affecté dans les écoles, mais il ne fut pas d’une grande aide. À mon avis, il faudrait d’abord faire sérieusement le point sur les effets Covid en rapport avec le décrochage, car ils sont plus qu’évidents. Il ne faut pas de mesures de courte durée, mais vraiment des mesures applicables pendant toute une année voire deux.»
Claude Damiani