Les règles du jeu à propos du contrôle technique ont changé depuis le 1er février. Fréquence réduite, ouverture à la concurrence… et si les interminables files d’attente étaient bientôt de l’histoire ancienne?
La loi réformant le contrôle technique avait été votée le 16 décembre et a été publiée au Mémorial des publications jeudi. C’est finalement ce lundi 1er février qu’elle est entrée en application. Elle sera donc applicable pour tous ceux qui ont acheté une voiture pendant l’Autofestival.
L’organisation du contrôle technique automobile par la Société nationale du contrôle technique (SNCT) a fait hurler bon nombre de galériens dans les stations de Sandweiler, Esch-sur-Alzette ou Wilwerwiltz. Les files, interminables certaines journées, ont achevé la patience de nombreux propriétaires d’autos coincés dans un système incontestablement loin d’être au point. Depuis 2012, certains témoignages évoquaient jusqu’à sept heures d’attente lors des moments de l’année les plus chauds, typiquement ceux qui marquaient les anniversaires des livraisons des véhicules commandés pendant l’Autofestival.
À l’époque, la situation était telle que l’Automobile club de Luxembourg et l’Union luxembourgeoise des consommateurs étaient montés au créneau pour dénoncer la faillite de l’État en la matière (lire ci-dessous l’interview d’Yves Wagner). Depuis, les pouvoirs publics se sont saisis du dossier pour réformer un système qui ne parvenait plus à suivre le rythme spectaculaire de la croissance du nombre d’immatriculations.
Erwan Nonet
Les principaux changements
Finis les contrôles pour les voitures neuves
Cela semble une aberration sans nom et pourtant, il fallait jusque-là amener sa voiture neuve au contrôle technique avant même d’avoir parcouru ses premiers kilomètres! Une formalité inutile qui sera dorénavant remplacée par une simple demande sur dossier à introduire par le garagiste auprès de la Société nationale de circulation automobile (SNCA).
Outre les voitures neuves, d’autres types de véhicules sont maintenant exemptés de contrôles technique, les vélos électriques ou à pédalage assisté et les fauteuils roulant motorisés, par exemple.
L’obligation de certifier les remorques d’une masse maximale autorisée ne dépassant pas 750 kg est également abandonnée.
Une périodicité revue à la baisse
Le Grand-Duché était, et de loin, l’un des pays les plus contraignants de l’Union européenne concernant la périodicité des passages au contrôle technique. Jusqu’à hier, la première visite était à effectuer dès trois ans et demi, puis chaque année. Le nouveau système instaure le premier contrôle au quatrième anniversaire de l’auto, puis au sixième et enfin tous les ans. Cette nouvelle donne permet de se conformer aux échéances conseillées par les trois directives européennes du «Paquet contrôle technique». En espaçant davantage les passages des voitures récentes, il y aura moins d’autos concernées par les contrôles. C’est mathématique… surtout au Grand-Duché où les voitures neuves sont proportionnellement plus nombreuses qu’ailleurs.
Plus spécifiquement, les autos-écoles et les voitures de location (sans chauffeur) n’ont plus de régime particulier. Elles n’ont plus à passer le contrôle chaque année mais suivent la fréquence classique. Cela contribuera également à décongestionner les centres.
Ouverture à la concurrence
La loi modifiée du 14 février 1955 permettait en principe l’arrivée d’opérateurs privés, mais les conditions à remplir étaient telles qu’elles étaient pratiquement impossibles à tenir pour une société privée. Désormais, l’obligation d’ouvrir simultanément trois sites couvrant 90 % du pays est abolie, tout comme celles d’être propriétaire des infrastructures ou d’être situé à moins de douze kilomètres d’une autoroute ou d’une route nationale.
Par contre, les centres devront proposer le contrôle de tous les types de véhicules (camions et bus compris) et effectuer cette activité à titre principal. Cette dernière condition exclut dont les garagistes et les concessionnaires.
L’arrivée attendue de nouvelles sociétés privées ne signifiera cependant pas le glas de la SNCT. Il sera toujours possible de passer ses contrôles à Sandweiler, Esch-sur-Alzette et Wilwerwiltz.
Yves Wagner (ACL) : « Un nouveau pas en avant »
Yves Wagner, le président de l’Automobile Club du Luxembourg (ACL), se félicite d’une réforme qui va dans le sens des intérêts des automobilistes.
Le Quotidien : L’ACL avait été à la pointe de la contestation pour dénoncer les failles de l’organisation du contrôle technique automobile. Comment jugez-vous la réforme qui vient d’être mise en place?
Yves Wagner : Les nouvelles sont bonnes! Comme vous le rappelez, nous avions montré le mécontentement bien légitime des automobilistes qui pouvaient passer une journée entière dans la file d’attente. Mais depuis, le gouvernement nous a associés aux discussions et aux groupes de travail pour résoudre le problème. Et les réponses apportées par cette réforme correspondent à ce que nous demandions. Si, au début, les négociations étaient un peu difficiles car il restait certaines oppositions à gauche et à droite, nous avons ressenti une vraie différence depuis une bonne année.
Estimez-vous que l’ouverture à la concurrence est une bonne chose? Fallait-il absolument revenir sur le principe du contrôle technique automobile en tant que service public?
Nous avons toujours demandé l’ouverture à la concurrence. Une première étape avait été franchie avec la possibilité de réaliser le contrôle technique dans un garage, il s’agit donc cette fois d’un nouveau pas en avant. D’autant plus que des firmes étrangères vont dorénavant avoir la possibilité de s’installer au Grand-Duché.
En tant que représentant des intérêts des automobilistes, allez-vous être attentif à la politique tarifaire des nouveaux venus? Jusqu’à présent, le contrôle technique était très bon marché…
Il est tout à fait exact que le tarif de 27 euros demandé par la Société nationale de contrôle technique (SNCT) était très bas. Pour le proposer également, l’ACL sait bien combien cela coûte. Il est probable qu’il y ait donc une hausse des tarifs (NDLR : dans les futures stations de contrôle), mais il faut également voir que le prix est en relation avec le service. L’ancien système n’était vraiment pas cher, mais il coûtait aussi une journée de travail, ce qui a un prix… J’espère que l’ouverture à la concurrence permettra l’émergence d’un prix juste. Nous resterons attentifs!
E. N.
Concurrence : y a-t-il des firmes intéressées ?
La question se pose nécessairement, puisqu’il s’agit du cœur même de la réforme. Au ministère du Développement durable et des Infrastructures, on préfère cependant être discret sur la question, arguant du fait qu’il est encore trop tôt pour rendre cette information publique. D’autres sources mentionnent que des entreprises étrangères, allemandes, notamment, se sont déjà manifestées. On évoque un intérêt du TÜV (Technischer Überwachungsverein) qui effectue déjà ces tâches outre-Moselle. Le magazine Paperjam a également cité l’intérêt de Dekra.