Un important imbroglio entoure la révision de la Constitution. Les appels pour soumettre les différents chapitres au vote de la population se multiplient. Deux procédures sont lancées pour forcer un référendum. S’y ajoute une pétition qui ne fait qu’accentuer une situation rocambolesque.
L’objectif de la Chambre des députés, engagée depuis plus de 15 ans sur une réforme de la Constitution, a toujours été de «travailler ensemble sur une loi fondamentale qui doit non pas diviser, mais réunir les gens autour de fondements communs, sans se perdre dans une guerre de tranchées».
Ces mots, Mars Di Bartolomeo (LSAP), le président de la commission en charge de la Révision constitutionnelle, les a signés dans notre «Interview du lundi» publiée le 26 juillet dernier. Un peu plus de trois mois plus tard, cette «guerre de tranchées» est pourtant devenue une (triste) réalité. En cause, les grands partis ayant sous-estimé la volonté d’une frange de la population d’obtenir un référendum.
Une responsabilité particulière incombe au CSV et ses pirouettes en la matière. En juin 2018, le oui à une réforme globale de la Constitution, référendum compris, a été acté. Première volte-face en juillet 2019 : un non à une réforme globale, suivi d’un non au référendum.
Et puis, seconde volte-face le 20 octobre dernier : oui à un référendum, à condition que 25 000 personnes signent la pétition réclamant une telle consultation publique.
La pétition a dépassé les 17 000 signatures
Cet imbroglio a été parfaitement exploité par l’ADR, dénonçant que les quatre grands partis ne tiennent pas leur promesse électorale d’organiser un référendum. Un référendum, qui selon l’argumentaire du quatuor DP-LSAP-déi gréng-CSV, serait devenu caduque en raison du compromis de remplacer la réforme intégrale de la Constitution par une révision ponctuelle portant sur quatre chapitres distincts : Justice, Institutions de l’État, Droits et libertés, Chambre des députés et Conseil d’État.
Aujourd’hui, la modernisation de la Constitution, datant en majeure partie de… 1868, fait l’objet d’un débat assez rocambolesque. Les restrictions sanitaires sont mises en relation avec la nouvelle loi suprême. Des fausses interprétations du nouveau texte sont délibérément véhiculées par le Parti réformateur.
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Les pirates reprochent à la majorité de ne pas respecter les principes démocratiques. Pourtant, le vote sur le chapitre consacré à la Justice s’est soldé par un résultat clair : 51 voix pour (DP, LSAP, déi gréng, CSV et Parti pirate), 2 abstentions (déi Lénk) et 4 voix contre (ADR).
Il existe in fine deux voies pour procéder à une révision de la Constitution : un double vote à une majorité des deux tiers par la Chambre des députés (endéans 3 mois) ou le remplacement du second vote par un référendum, qui peut être déclenché par les élus ou les citoyens.
La promesse du CSV de se tenir à une requête sans aucune valeur légale pour forcer une consultation populaire contribue à l’important flou qui entoure le processus de révision. Mercredi 3 novembre au soir, la pétition réclamant un référendum comptait quelque 17 000 signatures. Il en reste 8 000 à trouver en six jours.
Qu’en adviendra-t-il si le seuil prôné par le CSV n’est pas atteint ? Est-ce qu’une frange de députés (au moins huit) va tout de même se joindre à l’initiative parlementaire pour obtenir un référendum ? Ou est-ce que le sort de la Constitution sera remis entre les mains des électeurs, qui devront aussi être 25 000 à signer les listes officielles dans leurs communes respectives ?
Non pas un, mais quatre référendums
Il est important de rappeler que les partis de l’opposition ne cessent de parler d’«un» référendum. Or le choix de soumettre quatre chapitres distincts au vote de la Chambre fait que quatre initiatives parlementaires ou, le cas échéant, quatre initiatives populaires – donc quatre fois 25 000 signatures – seront nécessaires pour obtenir un référendum sur l’ensemble de la révision constitutionnelle.
Même si la volonté existe de soumettre le tout lors d’un seul dimanche au vote des électeurs, les délais à respecter entre un premier vote et l’aboutissement d’une des deux initiatives, risquent de rendre impossible cette entreprise.
La prochaine étape dans cet imbroglio est donc fixée à lundi avec la fin de la période de signatures de la pétition. À ce moment-là, les modalités pour la collecte des signatures «officielles» devraient aussi être connues. La prochaine échéance majeure sera alors fixée à la fin du mois de janvier. Un possible, premier référendum, pourrait avoir lieu au plus tard en été 2022.
Les dates et horaires pour la collecte
de 25 000 signatures restent à préciser
Contacté par nos soins, le ministère d’État confirme que le Premier ministre va encore publier «cette semaine» la communication officielle dans le Mémorial ouvrant la voie à la collecte des signatures pouvant mener à un référendum sur la Constitution. La procédure initiée par un comité de citoyens prévoit différents délais.
PÉRIODE La communication du Premier ministre, à publier endéans 8 jours après avoir validé la demande du comité d’initiative (dans ce cas le 28 octobre), va fixer les dates de début et de fin de la période de collecte des signatures. Les soutiens doivent être récoltés en un maximum de 2 mois après le premier vote de la révision. Ce vote étant intervenu le 20 octobre 2021, on arriverait donc au 20 janvier 2022. Le cas échéant, un référendum doit être organisé dans les six mois qui suivent la validation des signatures.
COMMUNES Les 102 communes du pays sont appelées à informer sur l’organisation qui sera mise en place pour permettre aux électeurs d’apposer leurs signatures sur la liste officielle. La collecte doit commencer au plus tard 15 jours après la publication officielle du Premier ministre (aux alentours donc de la mi-novembre). La signature doit être faite en personne. Les bureaux de collecte doivent être accessibles au moins six heures et obligatoirement le samedi.
David Marques
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