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Coalitions : la voix de l’électeur compte-t-elle encore ?


Les élections législatives auront lieu en octobre (photo Hervé Montaigu).

L’électeur se demande si sa voix compte encore. Les coalitions se forment, qui ne reflètent pas toujours sa volonté. L’abstention, pourtant punissable d’une amende, gagne du terrain. Faut-il réagir ?

Selon le député socialiste Alex Bodry, il est grand temps d’analyser l’abstention, qui a encore augmenté lors des dernières élections communales. Ils étaient 36 000, soit 13%, à avoir manqué à l’appel le 8 octobre dernier.

La grande discussion née des élections communales porte sur la volonté de l’électeur en ces temps troublés par des coalitions qui se forment sans gêne. Les mieux élus sont relégués sur le banc de l’opposition, tandis qu’une cohorte de candidats parvient à s’emparer du pouvoir en additionnant leurs points. Ils représentent une majorité de l’électorat, qu’on le veuille ou non. L’électeur se sent ainsi floué et ce sentiment n’est pas nouveau. C’est à Bettembourg que la coalition à trois est née pour faire tomber les socialistes et c’est Laurent Zeimet, toujours bourgmestre grâce à cette même constellation, qui en est à l’origine. Il est également secrétaire général du Parti chrétien-social.

Mais l’illustration la plus éclatante de ce phénomène date des dernières élections législatives avec la composition d’un gouvernement tricéphale. La volonté de l’électeur a été massivement ébranlée quand le parti le plus fort n’a pas été convié à discuter et s’est retrouvé tout bonnement ignoré, lâché dans l’opposition sans aucune préparation.

D’autres, dans ce gouvernement, ont alors pris le pouvoir sans aucune préparation non plus. Et l’électeur, dans tout cela, ne s’y retrouve plus. Les politiques non plus. Même dans les villages au scrutin majoritaire, tout est chamboulé. L’épisode de Bous, où le bourgmestre sortant est écarté du pouvoir après avoir affiché le meilleur score, en est le dernier témoignage. Plus de complexes.

Alors l’électeur s’est interrogé : «Pourquoi diable aller encore voter ?», «Les candidats n’ont qu’à composer leur majorité sans rien nous demander, non ?», écrivaient par exemple des internautes au lendemain des élections communales. Mais les politiques aussi se sont interrogés.

En premier lieu, le ministre de l’Intérieur, Dan Kersch, qui s’est fâché tout rouge alors que les socialistes, arrivés en tête des suffrages, se faisaient éjecter à Mondercange, son fief. Le ministre, qui a parlé de «magouilles», en a choqué plus d’un dans le monde politique. Dan Kersch proposait ensuite une discussion entre tous les partis pour éviter ce genre d’attelage.

Claude Wiseler déclarait dans une interview publiée lundi dernier dans nos colonnes que «les élus sont libres de choisir les coalitions qu’ils veulent» et que le moment était mal choisi pour discuter, car de nouvelles élections pointent le bout de leur nez en octobre 2018. «Les partis n’ont qu’à mettre dans leur programme électoral ce qu’ils souhaitent changer dans le système», précisait Claude Wiseler dans sa réponse.

Tous excusés ?

C’est le moment qu’a choisi le député socialiste Alex Bodry pour poser une question parlementaire relative à l’absentéisme électoral. «Le vote est obligatoire pour tous les électeurs inscrits sur les listes électorales», rappelle-t-il. Oui, mais il faut admettre que les poursuites sont inexistantes en cas d’abstention. Pourtant, il croit savoir que les statistiques officielles font état «d’un nombre non négligeable d’électeurs inscrits qui n’ont pas participé aux dernières élections communales». Il s’inquiète du phénomène, qui s’est déjà manifesté lors des dernières élections législatives et lors du référendum de 2015.

Il ne cite pas leur nombre, mais ils étaient 36 434 à n’avoir pas pris part au vote, soit près de 13% des inscrits. Tous excusés ? Difficile à dire. C’est le procureur d’État, selon la loi électorale, qui dresse le relevé, par commune, des électeurs qui se sont abstenus sans excuse valable.

«Le gouvernement peut-il confirmer que le Parquet a effectivement dressé de tels relevés à la suite des dernières votations nationales ? Quelles sont, le cas échéant, les indications de ces relevés ? Quelles sont les conclusions que le Parquet en a tirées ?», interroge le député, qui a hâte de connaître les réponses, comme il l’indique sur son compte Twitter. «Il est grand temps d’analyser l’abstention», écrit-il encore.

Pendant ce temps, une pétition ouverte à la signature et demandant l’abandon du caractère obligatoire du vote ne fait pas recette. En une semaine, à peine 95 signatures au compteur. Très loin des 36 000 abstentionnistes. Il faudrait analyser leur motivation, cela ferait avancer le débat sur le système électoral.

En attendant, laissons les dernières alliances se former.

Geneviève Montaigu