Les études PISA se suivent et se ressemblent. Le Luxembourg reste un élève en dessous de la moyenne de l’OCDE et affiche des résultats stables. Toute l’attention est braquée sur les élèves les plus faibles.
Toujours pareil. PISA 2018 ne change pas des études précédentes consacrées aux performances des élèves de 15 ans. Elle est réalisée tous les trois ans par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et évalue les connaissances et compétences que les élèves ont acquises en lecture, en mathématiques et en sciences.
Il n’est nullement question de se prononcer sur les programmes scolaires, mais de vérifier si l’élève en fin de parcours obligatoire sait se servir de son bagage. Le Luxembourg se retrouve en dessous de la moyenne internationale et les résultats sont stables. Dans les trois domaines de compétences évalués, le Luxembourg affiche 470 points en lecture (moyenne de l’OCDE : 487), 477 points en sciences naturelles (moyenne de l’OCDE : 489) et 483 points en mathématiques (moyenne de l’OCDE : 489).
Bien sûr, cette étude confirme également les spécificités de l’école luxembourgeoise en termes de population scolaire. Le Luxembourg est le pays de l’OCDE qui affiche à la fois le taux le plus élevé d’élèves avec origine migratoire (55 %) et le taux le plus élevé de jeunes dont la première langue parlée à la maison n’est pas la langue de l’école ni celle du test PISA (83 %). Le Luxembourg a également connu la plus importante hausse du taux d’élèves avec origine migratoire entre 2009 (40 %) et 2018 (55 %).
Malheureusement, «PISA ne rend pas compte de l’impact de cette mutation rapide du contexte sociodémographique et rend donc difficile l’interprétation de l’évolution réelle des compétences», explique Lex Folscheid, premier conseiller de gouvernement, qui a présenté les résultats en l’absence du ministre de l’Éducation nationale, Claude Meisch. «Une fois de plus, la plus-value de l’étude PISA est donc limitée pour le Luxembourg. On remarque que le Luxembourg n’avance pas dans les résultats de PISA, mais PISA ne fait pas non plus avancer le Luxembourg», estime Lex Folscheid.
Néanmoins, en dépit de cette forte augmentation de la population scolaire, le Luxembourg réussit malgré tout à maintenir ses résultats, même moyens. Des résultats qui «ne reflètent pas les défis qui sont actuellement posés dans l’éducation luxembourgeoise», selon le premier conseiller de gouvernement.
Si la diversité de cette population est une grande richesse, elle représente aussi un défi pour le système luxembourgeois. «Notre base de départ ne peut pas être comparée avec celle des autres pays. Avec 55 % de nos élèves issus de l’immigration, cela représente quatre fois plus que la moyenne des pays de l’OCDE», poursuit-il. Le haut fonctionnaire estime que l’on pourrait comparer le pays à certains quartiers de grandes capitales ou à certaines régions ou provinces comme la communauté allemande en Belgique ou d’autres régions multilingues.
«Quand on regarde les visées du système scolaire, on se rend compte que le système luxembourgeois est difficilement comparable avec les autres pays de l’OCDE», dit-il. Pourquoi? «Les élèves luxembourgeois parlent une à deux langues de plus que les autres élèves en moyenne. Le multilinguisme qui est une des visées principales du système luxembourgeois a un impact à ce niveau puisque le pays est premier dans cette catégorie, mais il y a le revers de la médaille dans les autres résultats», admet Lex Folscheid.
Les 20 % qui inquiètent
Les constats sont les mêmes depuis 2009 et il s’agit maintenant de relever le défi que PISA souligne bien dans son étude et qui concerne les 20 % d’élèves les plus faibles. Si les 20 % parmi les meilleurs élèves ont des résultats comparables aux 20 % des élèves dans les autres pays de l’OCDE, les 20 % les plus faibles au Luxembourg obtiennent des résultats bien moins bons que la moyenne internationale.
«C’est ainsi que nous voulons utiliser ce genre d’études internationales. PISA oriente notre priorité. Elle oriente notre regard et il est désormais orienté vers cette population-là», affirme Lex Folscheid.
Pourquoi ce constat à l’âge de 15 ans? «Nos propres études nous aident dans cette analyse. Les différences de performances relevées à l’âge de 15 ans trouvent leurs origines dès l’âge de 9 ans. Au Luxembourg, ces différences se font très tôt donc nous devons nous concentrer sur le cycle 3 de notre enseignement fondamental et les problématiques qui surviennent déjà au cycle 2, lors de l’alphabétisation des élèves. Il nous semble que nous perdons déjà à ce stade toute une population et nous n’arrivons plus à la rattraper parce qu’elle ne trouve pas d’offre appropriée, du moins celle de l’époque», analyse le premier conseiller.
Il est vrai que les élèves de 15 ans testés en 2018 n’ont pas encore connu l’offre des écoles internationales ni la réforme de l’ancienne ministre socialiste de l’Éducation Mady Delvaux qui n’avait pas encore eu d’effet. «Il y a toujours un décalage de dix ans dans l’évaluation des politiques», explique Lex Folscheid. Le Luxembourg continuera de participer à PISA, mais à raison d’un cycle sur deux. Une période de référence plus longue, soit 6 ans au lieu de 3 ans, pour «permettre de poser un regard plus nuancé sur l’évolution réelle des compétences des élèves». Prochaine participation en 2024.
Geneviève Montaigu
Les mesures annoncées
Repenser la voie de préparation : En 2020-2021, le ministère lancera un plan d’action pour adapter la voie de préparation (qui accueille la majeure partie de la frange d’élèves en difficulté) et offrir aux élèves concernés un encadrement plus ciblé, plus personnalisé, qui s’adaptera mieux à leur profil et à leur rythme. Le but sera d’amener plus d’élèves à rejoindre une classe plus exigeante de l’enseignement général ou à réussir leur insertion dans la vie active.
Mieux intégrer les élèves d’origine étrangère : PISA 2018 montre une fois de plus que les écarts de performance entre les élèves selon l’origine migratoire et le statut socio-économique sont très prononcés. La diversification des sections linguistiques au sein de l’école publique luxembourgeoise sera poursuivie. L’accueil des élèves primo-arrivants sera revu pour mieux les guider vers l’offre scolaire qui répond à leur profil individuel et à leurs acquis scolaires.
Améliorer les compétences de lecture : La lecture est au cœur de tout apprentissage, scolaire ou non, comme du développement personnel et social. Les difficultés de compréhension de texte se répercutent négativement sur les compétences dans l’ensemble des disciplines et mènent tôt au tard à des retards scolaires ou à l’échec, voire au décrochage. Une des priorités de la politique éducative sera dès lors d’améliorer les compétences de lecture de tous les élèves, et notamment de ceux en difficulté, pour leur offrir une chance de réussite et des perspectives d’avenir.
Améliorer la qualité de l’orientation scolaire : La diversification de l’offre scolaire sera poursuivie. Encore faut-il que, pour profiter de cette diversification, les élèves soient orientés vers les offres qui répondent aux mieux à leurs capacités et à leurs aspirations. Pour cette raison, l’orientation en tant qu’information sur le système scolaire et les formations, mais aussi en tant qu’éducation au choix fondé sur un projet personnel, sera renforcée.