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«Ce virus est le reflet d’une société malade», dénonce l’Amiperas


L’Amiperas appelle «toutes les tranches d'âge à soutenir les revendications d'une société de solidarité (…) et à s'engager à donner aux seniors toutes les chances de vivre cette période difficile». (photo AFP)

L’Amiperas dénonce vivement des déclarations scandaleuses à l’égard de nos aînés, lesquelles sont légion depuis l’apparition de la pandémie et dénotent un manque cruel de solidarité entre les générations.

C’est un constat aussi surprenant que choquant qui a fait réagir l’Amiperas (l’Amicale des personnes retraitées, âgées et solitaires). Depuis près de 60 ans, cette association, qui compte aujourd’hui quelque 15 000 membres, rassemble les personnes âgées, organise des activités à leur intention, les conseille et les soutient, et défend leurs intérêts auprès des institutions publiques. «Nous sommes la voix des seniors», résume Edmée Anen, la secrétaire générale.

Et parce que leur voix compte justement au sein de notre société, l’Amiperas a publié cette semaine un communiqué pour dénoncer le manque de solidarité envers les personnes âgées qu’a mis en lumière (ou exacerbé ?) la crise du Covid-19. L’Amiperas appelle même le gouvernement à s’exprimer publiquement sur le sujet afin de lutter contre toutes les expressions négatives.

En effet, d’une part, les seniors se retrouvent eux aussi très isolés depuis des mois, plus encore qu’à l’accoutumée, et cet isolement forcé «a des répercussions sur leur santé physique et mentale», signale l’association, qui encourage à cet égard toutes les personnes âgées à se faire vacciner pour que le contact social puisse être rétabli au plus vite.

Mais en outre, ceux-ci se voient confrontés à des remarques «scandaleuses», «immorales» et «inhumaines», tant sur les réseaux sociaux qu’à la télévision ou à la radio, voire même en face-à-face parfois. Entendre parler continuellement depuis près d’un an des personnes âgées comme d’un groupe homogène en les désignant uniquement comme «des personnes vulnérables», apprendre qu’on envisage (ou qu’on fait le choix) de laisser mourir les plus vieux parce qu’il y a trop de malades à soigner dans des hôpitaux débordés, voire assister à des interrogations ou des affirmations plus directes sur le bien-fondé de venir en aide à une population «qui a déjà vécu»… Autant de propos perfides qui ont souvent pour argument de fond : «De toute façon, ces gens-là vont bientôt mourir, peu importe que ce soit immédiatement du Covid-19 ou dans quelques mois».

«Vieux et jeunes dans le même bateau !»

Des attitudes qui ne sont pas sans conséquences et peuvent plonger les seniors dans le désespoir, renforçant leur sentiment de n’être plus utiles à rien. «Nous devons faire attention à ce que nous disons, les personnes âgées sont aussi sensibles», rappelle, si besoin était, Edmée Anen. «Certaines personnes nous ont dit ceci : « Si nous sommes un groupe vulnérable, qu’ils nous donnent une piqûre et nous partons ! »»

L’Amiperas, par la voix de sa secrétaire générale, appelle donc à «une société basée sur la solidarité». «On entend tous les jours que les jeunes ne peuvent pas sortir, mais les seniors non plus ! Non seulement il y a énormément de personnes âgées qui sont encore très actives, qui sont physiquement et mentalement en bonne santé – certaines poursuivent même des études – mais en plus, même s’il reste peut-être deux ans à vivre à certaines, le confinement est aussi du temps perdu pour elles ! Vieux et jeunes sont dans le même bateau.» Par-dessus tout, s’insurge Edmée Anen en devant rappeler cette évidence à ceux qui prétendent que les seniors n’en ont de toute façon plus pour longtemps : «Personne ne sait quand on va mourir !».

Un manque de compassion, de respect et de soutien envers les plus âgés qui s’avère très révélateur pour la secrétaire générale de l’Amiperas : «Le phénomène n’est pas non plus complètement nouveau. Il y a quelques années, j’ai entendu dire à des personnes âgées assises en terrasse : « Pourquoi vous ne mourrez pas pour que nous n’ayons plus à payer vos pensions ? ». Chacun doit se demander pourquoi nous avons ce virus ? Nous avons détruit l’environnement, nous mangeons beaucoup trop de viande… Tout cela est le reflet d’une société malade. Nous devons nous rappeler que la prospérité dans laquelle nous vivons aujourd’hui a été créée par l’ancienne génération.»

Loin de vouloir opposer les jeunes aux vieux, l’Amiperas veut au contraire réunir toutes les générations. Tout un chacun, quel que soit son âge, est d’ailleurs le bienvenu au sein de l’association. «Nous voulons aussi un avenir pour nos enfants ! Mais il faut expliquer dès l’école maternelle l’importance de se montrer solidaire entre les générations. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons toujours organisé des rencontres entre personnes âgées et tout-petits, comme par exemple à l’occasion de la Saint-Nicolas ou de Noël.»

Tatiana Salvan