Face au risque accru de contagion chez les plus précaires, Caritas souhaite que les sans-abri et les sans-papiers fassent partie de la deuxième phase de vaccination.
Différentes études le prouvent : si l’ensemble de la population est touchée par le Covid-19, ce sont bien les personnes ayant un statut socioéconomique inférieur qui s’avèrent les plus impactées, tant sur le plan sanitaire qu’économique. En outre, le risque de contagion au coronavirus se révèle fortement accru en fonction du niveau de précarité.
«Au début de l’épidémie, les personnes âgées semblaient être les plus touchées, mais en réalité, la probabilité de contagion augmente plutôt avec le niveau de précarité. Les personnes modestes sont généralement en moins bonne santé que les personnes plus aisées. (…) Les plus démunis ont aussi un accès limité aux soins et à l’hygiène. Ils sont donc plus vulnérables face à l’épidémie et ne disposent pas forcément des moyens pour appliquer les règles de confinement et de prévention. La situation est particulièrement préoccupante pour les sans domicile fixe, les personnes qui vivent dans les bidonvilles mais aussi pour les personnes incarcérées», relève ainsi Oxfam.
Un constat dont n’est pas exempt le Luxembourg. C’est pourquoi Caritas a récemment publié sur son site une prise de position au sujet de la campagne de vaccination actuellement menée au Luxembourg. Si l’association salue la mise à disposition gratuite des vaccins, elle «demande à ce que les personnes qui vivent ou doivent dormir dans l’exiguïté d’un hébergement d’urgence pour les sans-abri figurent dans la deuxième phase de vaccination en tant que personnes hautement vulnérables». «Le risque de contagion au Covid-19 est considérablement accru pour ces personnes par rapport à des personnes occupant un logement individuel et les mesures préventives nécessaires difficilement applicables», explique Caritas, qui précise : «La crise accentue et agrandit les inégalités économiques et le gouvernement doit veiller à ce que la situation ne s’aggrave pas.»
Au Luxembourg et au-delà
Afin de mettre en place une campagne de vaccination efficace contre le Covid-19 pour les sans-abri et les sans-papiers, Caritas souligne l’importance d’un travail de concertation auprès des différentes associations mené en amont. L’invitation à se faire vacciner actuellement envoyée par courrier de même que la prise de rendez-vous en ligne ne sont en effet pas toujours possibles pour ces personnes, qui pourraient ne pas parvenir à se rendre à un poste de vaccination dans le délai prévu de deux semaines.
Mais au-delà du seul Luxembourg, c’est également à l’échelle mondiale que Caritas souhaite «un accès juste et équitable au vaccin». «Dans notre monde globalisé, seul l’effort coordonné et décisif à l’échelle mondiale peut apporter une véritable solution.» Selon Oxfam, en effet, «dans les pays pauvres 9 personnes sur 10 n’auront pas accès au vaccin en 2021 pendant que les pays riches ont accaparé suffisamment de doses pour vacciner l’ensemble de leur population près de trois fois». Les pays riches, qui ne représentent que 14% de la population mondiale, ont ainsi pré-acheté plus de la moitié des doses des vaccins les plus prometteurs à l’heure actuelle. Une approche «égoïste» qui met non seulement «en danger les plus pauvres et les plus vulnérables dans le monde, mais [qui] est également vouée à l’échec », avait dénoncé en janvier dernier le patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.
Un point positif toutefois : le Grand-Duché soutient l’initiative Covax (Covid-19 Vaccines Global Access). Cette initiative, codirigée par l’Alliance Gavi, la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (CEPI) et l’Organisation mondiale de la santé, a pour objectif «d’accélérer la mise au point et la fabrication de vaccins contre le Covid-19 et d’en assurer un accès juste et équitable, à l’échelle mondiale».
«Si Covax réussissait, au moins 20% des personnes le plus à risque dans environ 90 pays en développement seraient vaccinées d’ici fin 2021», fait savoir Caritas, qui souligne à cet égard que «la protection par brevet des médicaments, vaccins et dispositifs médicaux pour le traitement du Covid-19 devrait être suspendue jusqu’à ce que l’immunité collective soit atteinte dans le monde entier».
Tatiana Salvan