Le ministre de l’Économie dénonce, dans sa réponse à une question parlementaire sur le bail commercial, le risque d’un conflit d’intérêt provoqué par l’ancienne ministre des Classes moyennes.
La ministre du CSV avait soumis, fin septembre 2013, un texte de loi pour réformer le bail commercial qui était inspiré par une proposition écrite de l’avocat Georges Krieger. Le fait que ce dernier présidait à l’époque l’Union des propriétaires soulève la question du conflit d’intérêt. Le nouveau gouvernement a préféré retirer le texte de l’ancienne ministre pour présenter un nouveau projet de réforme, présenté il y a deux semaines.
Les hostilités entre le gouvernement et le CSV ne font pas l’objet d’une pause estivale. Interrogé par le député libéral Lex Delles, le ministre de l’Économie, Étienne Schneider (LSAP), ne s’est ainsi pas fait prier pour dénoncer, dans sa réponse à la question parlementaire sur la refonte du bail commercial, les agissements de l’ancienne ministre CSV Françoise Hetto-Gaasch, qui avait préparé un premier texte lors de la législature écoulée.
Le reproche : être tombé dans le piège de s’inspirer d’une proposition écrite de l’avocat Georges Krieger qui, en tant que président de l’Union des propriétaires, avait pris l’initiative de contacter la ministre des Classes moyennes pour soumettre ses propositions de réforme de la loi sur le bail commercial. Comme l’indique Lex Delles dans sa question parlementaire, Françoise Hetto-Gaasch avait elle-même révélé cette prise de contact lors d’une récente interview avec nos confrères de la radio 100,7.
Interrogé sur le risque d’un conflit d’intérêt, le ministre de l’Économie, qui occupait déjà ce poste au précédent gouvernement, fustige ouvertement l’attitude de son ancienne collègue. Étienne Schneider souligne ainsi qu’«un conflit d’intérêt en la personne de l’avocat est dès lors concevable en théorie, et ne saurait du moins pas être écarté avec certitude dans le présent cas de figure».
Cette analyse critique intervient cependant un peu tardivement chez le ministre socialiste, qui avait approuvé sous l’ancien gouvernement le texte de loi inspiré par la contribution de Me Krieger. Ce n’est que sous le nouveau gouvernement que le texte de Françoise Hetto-Gaasch a été retiré afin de pouvoir «élargir la discussion, de recueillir et d’analyser les avis des chambres professionnelles et d’autres milieux concernés ainsi que d’évaluer de manière plus approfondie les mesures à prendre, adoptées quelque peu à la hâte dans un contexte particulier et peu serein à l’époque», indique Étienne Schneider, qui rappelle l’épisode de la faillite en bloc d’une vingtaine de magasins du centre-ville de Luxembourg.
Une leçon de morale
Les conclusions de cette consultation élargie se retrouvent désormais dans le nouveau texte de réforme, soumis fin juillet de cette année au Conseil de gouvernement. Son objectif : rééquilibrer les relations entre le bailleur et le preneur par rapport au projet de loi initial (lire ci-dessous).
Pour conclure, le ministre de l’Économie s’adonne encore à une leçon de morale en soulignant que même si le texte actuel reste «inspiré» du projet initial, il «ne donne plus lieu à de quelconques soupçons de conflits d’intérêt ou de manque d’objectivité». Étienne Schneider enchaîne : «En général, j’estime qu’il va à l’encontre d’une bonne gouvernance voire qu’il est inadmissible qu’un ministère ou une administration se fasse assister ou consulter par un expert externe lors de la préparation d’un projet de loi ou d’un projet de règlement grand-ducal, alors que celui-ci représente simultanément les intérêts de milieux ou de groupes directement concernés d’un point de vue matériel voire financier par les dispositions y prévues.»
David Marques