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Affaire Engel : «On a voulu se débarrasser de moi»


Frank Engel lors de son arrivée dans la salle d'audience. L'ancien président du CSV n'a pas tardé à charger ses anciens collègues de parti. (Photo Hervé Montaigu)

En ouverture du procès sur un supposé emploi fictif, l’ancien président du CSV a chargé la fraction parlementaire chrétienne-sociale qui aurait tout entrepris pour le déloger de la tête du parti. Quatre autres prévenus dans cette affaire ont évoqué des «pressions» exercées par des élus pour dénoncer Frank Engel au parquet.

Au terme du premier jour du procès sur l’affaire Engel, la question sur la légalité du contrat signé par Frank Engel avec le CSV Frëndeskrees, une ASBL qui gère les biens immobiliers du parti, reste complètement ouverte. Le parquet reproche à l’ancien président du CSV d’avoir créé avec le concours de Félix Eischen, alors secrétaire général, et André Martins, le trésorier de l’ASBL, un emploi fictif.

De juin à décembre 2020, Frank Engel s’est vu verser un salaire total de 38 449,83 euros. Sa mission : trouver un nouveau bâtiment pour établir le siège du CSV et transformer l’ASBL Frëndeskrees en fondation. L’entreprise s’est soldée par un échec, aussi en raison de différends personnels, comme l’évoque l’ancien président à la barre.

Un autre volet de ce procès porte sur le remboursement de cotisations sociales à Frank Engel d’un montant de 8 536,05 euros. L’ancien trésorier général du CSV Georges Heirendt est accusé d’avoir commis un abus de confiance en accordant le remboursement des cotisations sociales à son président.

La fraction parlementaire aux manettes

Le volet strictement judiciaire de cette affaire a rapidement laissé place à la baston politique qui se trouve à la base de ce procès. Au vu des dépositions entendues ce mardi, il se confirme que c’est la fraction parlementaire du CSV, en profond désaccord avec Frank Engel, qui a mis la pression sur les membres du conseil d’administration de l’ASBL Frëndeskrees pour dénoncer le supposé contrat de travail fictif. Des déclarations allant dans ce sens ont été tenues par les anciennes vice-présidentes Elisabeth Margue et Stéphanie Weydert ainsi que par André Martins et Georges Pierret, membre de l’ASBL.

Un avis juridique «lacunaire»

Tous les quatre se trouvent aux côtés de Frank Engel sur le banc des prévenus. Et tous ont fait état d’une forte agitation au sein de la fraction parlementaire en date du 16 mars dernier. Une semaine plus tôt, une assemblée générale chahutée du CSV Frëndeskrees aurait poussé plusieurs élus du CSV à demander un avis juridique sur le contrat de travail. Qualifié de «lacunaire» par Stéphanie Weydert et Elisabeth Margue, toutes deux juristes de formation, ce document a servi d’élément-clé pour forcer les dirigeants de l’ASBL à dénoncer le président Frank Engel devant la justice.

Avocat chevronné, Georges Pierret estime, à son tour, que la «base pour une dénonciation n’était pas donnée». «J’ai insisté à plusieurs reprises pour en savoir plus sur la teneur de ce que j’allais signer. Gilles Roth, puis Léon Gloden (NDLR : deux députés du CSV), m’ont assuré que rien ne pouvait m’arriver. J’ai donc fini par signer la dénonciation», relate André Martins.

Un homme de l’ombre ?

«Ma mission n’a pas été remise en question jusqu’à l’intervention de ceux qui ont voulu se débarrasser de moi. La guerre était déclenchée au sein du parti. Tout ce que j’ai mis sur la table, a été rejeté d’office», affirme Frank Engel. Il fait aussi allusion à «un membre âgé, mais signifiant» du parti qui aurait «complètement changé d’avis» sur la mission confiée au président. «D’enthousiaste on est passé à une attitude hostile», complète l’ancien chef de file du CSV.

Des circonstances nébuleuses

Au-delà des répercussions politiques de cette affaire, les juges devront élucider lors de la suite du procès si le contrat de travail accordé à Frank Engel était bien légal. Les circonstances de la conclusion de ce dernier restent nébuleuses. Une partie du conseil d’administration n’aurait, après avoir donné son accord de principe fin avril 2020, plus jamais entendu parler du contrat, finalement signé par le secrétaire général Félix Eischen et le trésorier André Martins.

Ce n’est qu’au moment de la demande de Frank Engel, en janvier de cette année, pour prolonger le contrat que Stéphanie Weydert, Elisabeth Margue et Georges Pierret auraient pris connaissance de l’existence même d’un tel contrat. Frank Engel, insistant toujours sur le caractère confidentiel de sa mission, aurait tenté d’empêcher la tenue d’une assemblée générale. Cette dernière a finalement eu lieu le 8 mars, avec les conséquences que l’on connait aujourd’hui.

Le procès reprend mercredi après-midi.

David Marques

Un commentaire

  1. Le monde politique n’est-il qu’un simple reflet de la société ou se situe-t-il bien au-delà de la norme ?

    Ego, magouilles, montages, manipulations, recherche du pouvoir, neutralisation des adversaires, que dire de plus?

    Cette histoire ne constitue en tout cas pas la gloire du parti CSV.