Paulette Lenert est la directrice de l’Institut national d’administration publique (INAP) que doivent fréquenter stagiaires et fonctionnaires. Ce très discret institut subit pourtant une grande réforme.
L’Institut national d’administration publique ne fait pas beaucoup parler de lui…
Paulette Lenert : Oui, voire pas du tout. L’État est pourtant le plus grand employeur et la formation est un enjeu de taille dans le contexte de la transformation digitale, car les métiers vont changer comme partout. Le défi est d’autant plus grand que les fonctionnaires s’engagent pour toute leur carrière auprès du même patron qui doit les soutenir afin de développer les compétences nécessaires pour évoluer dans leur métier.
Vous avez dépoussiéré l’examen-concours, mais la réforme ne s’arrête pas là. Avez-vous un nouveau concept pour l’INAP ?
Oui, nous avons complètement réformé le recrutement, de sorte qu’il s’agit désormais d’une procédure de sélection basée sur les compétences. Cette façon de sélectionner est d’ailleurs déjà pratiquée par l’administration fédérale belge et EPSO, le bureau de sélection des institutions européennes, où il a fait ses preuves depuis plusieurs années. Nous identifions les différents types de compétences essentiels au bon fonctionnement du service public et à la suite nous revoyons toute la formation. En parallèle à la réforme de l’examen-concours, nous avons élaboré un autre règlement grand-ducal qui est pour l’instant au Conseil d’État pour un deuxième avis, mais je suis confiante que nous saurons proposer aux agents de l’État une nouvelle formation initiale dès novembre. C’est un immense défi de repenser la formation initiale et continue de nos agents, en même temps cette démarche leur sera propice pour développer un nouvel ensemble de compétences et de savoir-faire.
Qu’est-ce qui change fondamentalement ?
La formation initiale a deux composantes majeures : une formation générale à l’INAP pour tous les stagiaires, puis une formation spéciale au sein de l’administration. Nous allons réformer tout le bloc formation générale avec un tronc commun de base et, ensuite, beaucoup plus de cours au choix. Auparavant, il y avait un tronc commun très variable au niveau des heures avec des programmes prédéfinis selon le type de carrière. Par exemple le fonctionnaire niveau bac, le B1, avait jusqu’à 372 heures d’un programme qu’il connaît déjà en partie pour l’avoir révisé lors de l’examen-concours. J’ai remarqué que certains d’entre eux vont retrouver en cours de carrière jusqu’à quatre fois les mêmes contenus et le « B1 » qui travaille au ministère de la Culture avait les mêmes cours que le « B1 » occupé à l’administration fiscale. Certains s’ennuyaient ferme. Nous avons donc défini un tronc commun très compact de 60 heures pour tous, sans distinction de carrière, ce qui va changer radicalement et laisser davantage de choix pour le surplus.
Comment ce tronc commun sera-t-il articulé ?
Il va se décliner autour de quatre domaines de base. En premier lieu, les connaissances générales de l’État qui consistent à connaître son employeur, les origines politiques du Luxembourg et le système institutionnel. Les tests seront de niveaux distincts selon la carrière, mais le cours reste le même pour tous. Ensuite nous aurons le cours sur les droits et obligations des agents publics qui comprend en outre les relations de travail ou encore le droit disciplinaire. Le troisième bloc se concentre sur les principes de la gestion publique avec la comptabilité propre de l’État, la gestion par objectifs, l’administration digitale et la gestion des ressources humaines. Enfin, le quatrième bloc de ce socle commun qui est pour moi très important, c’est la communication et les compétences comportementales. Nous sommes un service public donc il faut des règles de base de communication avec le citoyen. En même temps, le cours entend aussi développer le travail collaboratif et l’esprit d’équipe.
Entretien avec Geneviève Montaigu