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Violences physiques et sexuelles : le parquet révise les faits à la baisse


Les experts et le parquet ne sont pas convaincus de la véracité des accusations portées par Malia contre son père.

En manque d’affection de la part de son père, Malia aurait été prête à l’accuser du pire pour en obtenir. À moins que l’adolescente rebelle n’ait cherché un échappatoire aux violences physiques d’un père exigeant et strict.

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Une jeune femme de 19 ans accuse son père d’être un tyran domestique. Elle décrit les coups, les blessures et les attentats à la pudeur. Le père reconnaît uniquement les violences physiques, «un héritage culturel».

L’homme de 48 ans aurait battu Malia (NDLR : les prénoms ont été modifiés) et son frère entre juin 2013 et septembre 2021, au Luxembourg et en Espagne. Pendant cette même période de temps, il aurait commis des attouchements sur son aînée et sa petite sœur, Aya. La mère, qui ne serait pas intervenue pour protéger les mineurs, est accusée de non-assistance à personne en danger.

Malia était une enfant et une adolescente «difficile». Son père prétend avoir voulu «corriger» son comportement ainsi que celui de son petit frère. À la barre de la 12chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, il a expliqué mardi et hier ne pas avoir eu conscience que ses méthodes d’éducation n’étaient pas tolérées au Luxembourg.

Les poursuites à l’encontre du père reposent exclusivement sur les déclarations des trois enfants. Des déclarations à prendre avec des pincettes en ce qui concerne les accusations d’attentat à la pudeur. Aya et son frère ont pu être influencés par leur aînée, selon des experts judiciaires chargés de déterminer la crédibilité des trois enfants. Ils mettent en doute leurs récits étant donné des incohérences et des contradictions, et vont jusqu’à affirmer que Malia aurait pu avoir menti.

Dans son réquisitoire, le procureur a suivi leurs conclusions et demandé l’acquittement du père de famille pour les faits de violences sexuelles. Il a relevé «le comportement problématique» de Malia, qui «agit avec impulsivité sans prendre conscience des conséquences de ses actes».

L’explication la plus plausible pour ces fausses accusations est, pour le magistrat et les experts, «le besoin accru d’affection de Malia de la part de son père. Dans son récit, elle est au centre de son attention.

Elle indique qu’après les agressions sexuelles supposées, il lui disait qu’il l’aimait.» Un autre mobile possible aurait été le désir de l’adolescente de quitter le domicile familial pour échapper aux coups de son père «autoritaire» et «très exigeant». Des violences extrêmes et régulières qui ont contribué à renforcer les troubles du comportement de Malia, selon les experts.

Les deux prévenus auraient failli dans leur rôle de parents, a estimé le procureur avant de reconnaitre qu’ils ont pu être dépassés. La pression sociale, les ressources limitées et les sacrifices du père pour ses enfants sont autant de circonstances atténuantes à prendre en considération dans la fixation des peines. Le procureur a, de ce fait, requis des peines correctionnelles et non plus criminelles : 3 ans assortis d’un sursis «assez large» à l’encontre du père et 12 mois assortis du sursis intégral à l’encontre de la mère.

«Pas un tortionnaire»

Des réquisitions qui soulagent Me Stroesser, l’avocat du père. Il salue «la clairvoyance des experts» qui ne se seraient pas laissés berner par «une pure invention de Malia», qui voulait «attirer l’attention de son père». Pour cela, elle aurait, explique l’avocat, «poussé le bouchon de plus en plus loin».

Il a demandé au tribunal d’acquitter son client des faits d’attentat à la pudeur et de considérer le fait que Malia a pu exagérer les actes de violences physiques, comme «laver le cerveau» de ses frères et sœurs. Aya avait été claire à la barre mardi, elle n’a jamais subi de coups.

«Malia était une enfant insolente et perturbatrice qui n’a pas supporté que son père ne lui ait pas apporté suffisamment d’attention», note l’avocat. «Mon client a eu une vie difficile et on lui a inculqué des valeurs extrêmement strictes. Il était vital pour lui que ses enfants aient une bonne éducation et puissent s’élever socialement.»

Le père de famille ne serait pas «intrinsèquement violent». «Pas un tortionnaire.» Les coups n’étaient dirigés qu’envers Malia, et dans une moindre mesure contre son petit frère.

Me Stroesser invoque le dépassement du délai raisonnable et les quatre mois de détention préventive de son client «qui n’a plus donné un seul coup à ses enfants depuis le départ de Malia dans un foyer en septembre 2021». Il demande à ce que son client soit condamné à une «peine symbolique» qui n’excède pas les 12 mois d’incarcération et soit assortie du sursis total.

La mère de famille n’aurait, quant à elle, «pas eu conscience de la gravité ou du péril, s’il y avait péril, et ignorait que les faits pouvaient être qualifiés de crime ou de délit», a souligné son avocate qui a demandé son acquittement pour non-assistance à personne en danger.

Elle n’aurait pas su pour les attouchements et aurait tenté de s’interposer quand son mari devenait violent. «Les enfants le confirment», note l’avocate qui décrit une femme soumise, démunie et analphabète. Mardi, elle avait indiqué que «Chez nous, les musulmans, c’est le mari qui commande». La femme de loi a requis l’acquittement en sa faveur.

Avant de clore l’audience, le juge a constaté que «les violences ont cessé à la suite de l’intervention de la police. Si elle (NDLR : la mère de famille) avait contacté les autorités, les violences auraient pu cesser beaucoup plus tôt.»

Le prononcé est fixé au 22 mai prochain.

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