Un ancien soldat est suspecté d’avoir violé deux jeunes femmes. Absent, le jeune homme n’a semble-t-il pas ressenti le besoin de venir se défendre à son propre procès.
Un avis avait été émis par le parquet pour inviter Dean, «sans domicile, ni résidence connus», à comparaître ces mardi, mercredi et jeudi devant la 13ᵉ chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Pourtant, ni lui ni son avocat n’avaient fait le déplacement, mardi. Dean est suspecté de plusieurs viols sur deux jeunes femmes différentes en 2012. Une troisième dit avoir été violée à deux reprises, mais n’aurait pas porté plainte par peur de représailles de sa part. Dean sera jugé par défaut.
Dean aurait été «un Don Juan et un macho», selon un témoin. À tel point que son père lui aurait interdit de ramener ses différentes conquêtes au domicile familial, a raconté une enquêtrice du service de protection de la jeunesse, hier matin. Le jeune homme n’apprécierait pas que les femmes lui résistent, selon une de ses anciennes petites amies qui dit qu’il pouvait devenir violent et manipulateur quand il n’obtenait pas ce qu’il voulait sexuellement. Un témoignage qui joue en la défaveur du prévenu à la lueur des faits qui lui sont reprochés et du mode opératoire qui se dégage des témoignages des trois jeunes femmes.
Dean rencontre Jennifer à un concert à la Rockhal un soir de mars 2012. Les deux jeunes auraient flirté et poursuivi la soirée dans un café avec des amis communs. Jusqu’au moment où Jennifer se serait sentie mal et aurait voulu rentrer chez elle. Le jeune homme aurait proposé de la raccompagner pour veiller sur elle. La jeune femme ne se serait pas méfiée et aurait fini par céder, rassurée de ne pas devoir prendre la route seule. Ils auraient convenu que Dean rentrerait chez lui au matin. Ce qu’il a fait après avoir violé la jeune femme à deux reprises, selon elle.
«On s’est installé dans le canapé et j’ai allumé la télévision. Il a dit que nous pouvions nous occuper autrement», dit-elle dans un sanglot, «Au bout de quelques minutes, j’ai abandonné. Je l’ai laissé faire. Je savais que je n’avais aucune chance de m’en sortir.» À bout de forces, elle se serait réfugiée dans son lit où Dean l’aurait rejointe. «Il m’a dit qu’il faisait partie de l’armée, qu’il connaissait plein de monde, qu’il savait comment se défendre», se souvient-elle. Traumatisée, elle n’osera pas non plus résister le lendemain matin quand, au réveil, Dean l’aurait violée une deuxième fois.
«Je ne me souviens que de flashs»
Quatre mois plus tard, alors qu’il avait été prévenu par la police que Jennifer avait porté plainte pour viol à son encontre, il aurait récidivé. Il aurait recontacté Nathalie avec qui il avait déjà eu un rapport sexuel non consenti lors de la Saint-Sylvestre 2010. La jeune fille de 17 ans à l’époque n’avait pas porté plainte. En juillet 2012, elle accepte de passer du temps avec Dean à Esch-sur-Alzette. Pas entièrement à l’aise, elle demande à une amie puis à son compagnon de l’époque de les rejoindre. Ils vont de café en café puis achètent de l’alcool à une station-service pour le consommer au Galgenberg.
C’est là que Nathalie aurait commencé à se sentir mal. Dean aurait lourdement insisté pour que la jeune femme passe la nuit à son domicile. Tellement mal en point, elle finit par céder. «Dans la voiture, je m’endormais, je me réveillais. Cela devenait noir devant mes yeux, indique la jeune femme. De la nuit, je ne me souviens que de flashs : Dean torse nu, Dean sur moi…» Elle aurait tenté de le repousser et aurait fini par abandonner et subir le viol. Dean aurait retenté le coup au réveil et lui aurait dit qu’elle se comportait «comme une gamine de 12 ans».
Cette nuit est un véritable choc pour la jeune femme qui se remettait à peine d’un premier viol subi en 2009 alors qu’elle n’était âgée que de 16 ans. Elle venait de clôturer sa thérapie l’après-midi des faits.
Le jeune homme est également suspecté d’avoir violé une troisième jeune femme à deux reprises. Par peur de Dean, elle n’aurait pas porté plainte. Son nom serait apparu au cours de l’enquête. Son témoignage ressemble aux deux précédents. Excepté qu’elle ne se serait pas sentie mal.
Dans la famille de Dean, on aurait du mal à croire que le jeune homme puisse avoir commis de tels actes, selon l’enquêtrice. Et ce d’autant plus que sa maman aurait été régulièrement abusée sexuellement durant une partie de son enfance et de son adolescence. L’avocat de Dean aurait, selon la présidente de la 13ᵉ chambre correctionnelle, laissé entendre qu’il s’agirait d’une cabale contre le jeune homme. Pourtant, les jeunes femmes n’ont cessé de le répéter à la barre, elles ne se connaissaient pas.
Le procès se poursuit ce mercredi avec les rapports des experts et le réquisitoire du procureur. À moins que le prévenu et son avocat ne fassent leur apparition à l’audience.
Sophie Kieffer