Menaces, claques, fessées, coups de pied… À la police, la mère et les deux enfants avaient fait le récit de leur calvaire. Le parquet a requis trois ans de prison et une amende contre le père de famille.
Il est courant qu’à la barre les victimes de violences conjugales se rétractent. Face à leur (ex)conjoint assis sur le banc des prévenus, les langues ne se délient que difficilement. Mais il arrive aussi qu’elles ne se présentent tout simplement pas à l’audience. Comme jeudi après-midi. La condamnation pour «témoin défaillant» à une amende il y a quelques semaines n’y a rien changé.
La mère de famille de 39 ans n’était de nouveau pas là pour témoigner des «fessées, claques et coups de pied» sur ses deux fils et multiples «menaces de mort» dont son ex est accusé. «Madame est définitivement apeurée. Peut-être cela explique-t-il qu’elle ne se manifeste pas.» Voilà le constat du parquetier.
Toujours est-il que le tribunal n’a pas non plus vu la carrure du prévenu de 41 ans. Car ce dernier était également absent. Mais hors de question de fixer une nouvelle fois l’affaire qui remonte à avril 2016. Et c’est ainsi que le tribunal a dû se plonger, à travers le rapport policier, dans cette «ambiance familiale tendue».
Le SREC Capellen était intervenu à la suite de l’expulsion du père du domicile. Du côté de la mère, la peur de son retour était clairement palpable. Elle craignait de le croiser ne serait-ce qu’en allant chercher ses deux fils de 5 et 8 ans à l’arrêt de bus. À entendre les menaces dont elle avait fait état à la police, il y avait de quoi. Les enfants auraient non seulement encaissé des coups, mais il aurait aussi menacé de les «tuer» tous les trois s’ils appelaient la police ou s’il ne pouvait plus les voir. Enfin, au plus jeune, il aurait par ailleurs lancé : «Je t’arrache la tête et les yeux avec.»
Il veut devenir policier pour tuer son père…
Les enfants avaient été emmenés au CHL pour un examen médical. Le fils cadet présentait treize contusions d’environ 2 cm de diamètre sur l’ensemble de son corps. Mais comme à son âge il ne tenait pas en place, on n’avait pas exclu qu’il s’était infligé lui-même une partie des blessures. Une des blessures avait néanmoins pu être qualifiée d’«atypique».
Leurs déclarations lors de leur audition à la police avaient toutefois été plus que marquantes. À l’unisson, les deux frères avaient exprimé la peur que leur père les frappe au moment des devoirs. Et le cadet avait carrément raconté vouloir devenir policier «pour pouvoir tuer son père quand il est grand». Le comportement de l’aîné n’avait pas non plus laissé indifférent le policier. Son arrogance vis-à-vis de sa mère laissait entrevoir une certaine emprise du père. Des enregistrements audio et vidéo de certaines disputes par la mère avaient confirmé les impressions récoltées au domicile familial.
«Zéro prise de conscience»
Lors de son audition, le père avait minimisé tout cela. «Zéro prise de conscience», retient l’enquêteur. Au contraire, il aurait tenté d’endosser le rôle de la victime. «Il s’est justifié en disant que comme la mère n’éduquait pas les enfants, il devait s’en charger. Il est d’avis qu’une éducation rigoureuse est nécessaire.» Il avait reconnu prendre les enfants par les cheveux, en précisant toutefois : «S’ils ne bougent pas, rien ne se passe.»
Après son expulsion, la police avait constaté des tentatives de reprise de contact. Ainsi le père aurait souhaité savoir si sa famille avait suffisamment à manger en son absence. L’enquêteur lui avait proposé de commander directement des repas au domicile ou de faire des courses et de les déposer au centre d’intervention pour que la police les leur apporte. Mais cela ne l’avait visiblement pas intéressé.
Circonstances aggravantes
L’attitude du quadragénaire d’origine tunisienne à l’égard des femmes a également laissé ses traces dans le dossier. Ainsi avait-il fait entrevoir qu’avec une «juge femme» cela ne promettait rien de bon… Le fait qu’une composition mixte, présidée par un juge, s’est saisie de son affaire, il n’a pas pu le voir comme il n’était pas là.
Dans son réquisitoire, le représentant du parquet a demandé trois ans de prison et une amende appropriée contre le quadragénaire. Le fait que les enfants avaient moins de 14 ans et qu’il est leur père constituerait une circonstance aggravante.
La 13e chambre correctionnelle rendra son jugement le 5 mars.
F. A.