Pour avoir organisé un important trafic de drogue via Snapchat, trois amis d’enfance étaient jugés depuis la semaine dernière. Mercredi a eu lieu le réquisitoire.
« Ce sont trois amis d’enfance qui venaient du même village. C’est normal qu’ils aient traîné souvent ensemble, qu’ils aient communiqué via l’application mobile Snapchat… Chacune de leurs relations ne peut être interprétée comme ayant servi au trafic de drogue… » Lors de leurs plaidoiries mercredi après-midi, les avocats des trois jeunes prévenus (âgés de 24, 25 et 27 ans) ont tenté de minimiser l’ampleur du trafic de drogue.
Le parquet leur reproche d’avoir mené cette activité jusqu’à fin mars 2017 sous la houlette de Michel H. qui se trouvait à l’époque en Thaïlande. «Ce n’est pas parce que deux personnes se donnent un coup de main qu’on peut parler d’une structure organisée», a ainsi argué Me Pim Knaff. Comme ses confrères Mes Philippe Penning et Denise Parisi, il estime qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments pour retenir la circonstance aggravante de l’association de malfaiteurs.
La représentante du parquet avait toutefois une autre lecture du dossier. Les trois jeunes auraient bien travaillé ensemble pour ce trafic de drogue. Un trafic dans lequel Michel H. aurait tiré les ficelles après avoir recruté ses deux amis d’enfance. Tant les observations, les écoutes téléphoniques que le mouchard placé sous une Renault Clio auraient permis de retracer les rôles bien précis des trois protagonistes dans cette affaire.
Michel H., qu’elle qualifie de «cerveau de toute la bande» pour son expérience dans le milieu de la drogue, aurait coordonné le tout via Snapchat depuis la Thaïlande. Même s’il n’aurait participé à aucune remise sur le terrain, c’est lui qui aurait eu le contact avec les fournisseurs. Yan B., quant à lui, aurait importé la marchandise depuis Villerupt (F) ou Guerlange (B) et aurait approvisionné certains clients. Enfin, Ronny M. aurait fourni le «camp de base». Car c’est chez lui à Fingig qu’aurait été proportionnée et vendue une partie de la marchandise. Là, comme dans un drive-in, les clients seraient venus acheter leurs sachets.
Fuite dans le pays de la peine de mort…
La défense avait argué que les enquêteurs n’avaient pu mettre la main sur la moindre marchandise. Or pour le parquet, il y a une explication pour cela : «Fin mars 2017, il y a eu une fuite. Ils ont appris qu’ils avaient la police à leurs trousses. Trois jours après qu’un mandat d’amener avait été décerné à l’encontre de Yan B. et Ronny B., les enquêteurs ont pu observer comment la panique s’est emparée d’eux. Il est certain qu’ils ont tout fait disparaître, l’argent comme la drogue.»
Sous le coup d’un mandat d’arrêt international (MAI), Michel H. avait été arrêté fin septembre à l’aéroport de Zaventem à Bruxelles. Selon le parquet, Michel H. n’a pas non plus tout raconté au tribunal. Il ne se serait pas rendu en Thaïlande pour travailler, mais pour prendre la fuite. Car il n’en est pas à sa première affaire de trafic de drogue. La parquetière se demande toutefois pourquoi il s’est rendu dans un pays où le trafic de drogue est sanctionné par la peine de mort…
Outre le trafic de marijuana (estimé à une dizaine de kilos), le parquet reproche au trio le trafic de cocaïne. «Les quantités sont minimales, mais elles sont établies», a souligné la parquetière avant de requérir huit ans de prison ferme, une amende conséquente et une interdiction de conduire de 18 mois contre Michel H. actuellement en détention préventive.
Contre Yan B. elle a demandé six ans de prison et une amende conséquente, ainsi qu’une interdiction de conduire de 24 mois. En raison de ses aveux et de ses déclarations qui auraient permis de faire avancer l’enquête, sa peine de prison pourrait néanmoins être assortie d’un large sursis. Six ans de prison et une amende conséquente ont également été requis contre Ronny M. Or vu son attitude et le fait qu’il conteste l’incontestable, ce dernier devrait bénéficier d’un sursis moins large.
Prononcé le 24 janvier.
Fabienne Armborst