Le tribunal correctionnel de Thionville a examiné pendant trois jours un vaste trafic de stupéfiants associé à la possession d’armes de guerre. 14 prévenus ont été jugés, 11 sont repartis libres, ayant déjà, pour les plus impliqués, couvert leurs peines en détention provisoire.
L’enquête débute en février 2018, à la suite d’un courrier anonyme adressé à la gendarmerie. Cette lettre faisait état d’un trafic de stupéfiants à ciel ouvert dans le quartier République à Guénange , rue des Marguerites et boulevard de la Division Leclerc. Les enquêteurs relèvent effectivement un va-et-vient incessant sur le secteur, avec des dealers souvent très jeunes, voire mineurs, venus d’Orléans.
Il donne ses ordres depuis sa cellule
En septembre 2018, cette bande se fait évincer au profit d’autres revendeurs dont le leader présumé, Mohamed Sekkil, est emprisonné. C’est pourtant de sa cellule qu’il continue à donner ses ordres. Son téléphone portable, placé sous écoute, confirmera qu’il recevait tous les soirs un rapport d’activités de « ses » subordonnés. Le trafic, bien établi, va pourtant être grippé par le retour sur le territoire des Orléanais. La bande en place décide alors de faire l’acquisition d’armes pour mettre la pression sur ses rivaux et dégote un pistolet CZ et un fusil-mitrailleur Kalachnikov type AK47, une arme de guerre. De sa geôle, Mohamed Sekkil incite celui qui est considéré comme son adjoint, Omar, à en faire usage, « à tirer dans les jambes ».
Ces écoutes sont jugées suffisamment sérieuses par le procureur de la République et les enquêteurs pour, le 5 décembre 2018, décider d’interpeller tout ce petit monde afin d’éviter un bain de sang. Une vingtaine de perquisitions permettront en outre de mettre au jour de belles sommes d’argent en numéraires (jusqu’à 24 000 €) au domicile de certains protagonistes.
Huit ans de prison requis
Au cours de l’audience, qui a débuté mardi au tribunal correctionnel de Thionville pour s’achever ce jeudi, les prévenus ont dans l’ensemble nié participer à un quelconque trafic de stupéfiants, et encore moins se fréquenter. Du bout des lèvres, certains avoueront dealer un peu, mais en solo, pour leur compte. Quant à Mohamed Sekkil, dont le nom revient à plusieurs reprises, il assure « n’avoir jamais contrôlé un trafic de drogue depuis la prison. Ça, c’est du fantasme policier. » « Oui mais c’est bien vous qu’on entend donner des ordres », lui rétorque le président du tribunal. « On a dû me l’emprunter (le téléphone) en prison », répond sans sourciller le prévenu…
Pour le substitut du procureur de la République, le trafic de drogue ne fait pas l’ombre d’un doute. Et il désigne clairement Mohamed Sekkil comme la tête de réseau et Omar comme son adjoint. Il requiert 8 ans d’emprisonnement pour le premier et 4 ans pour le second.
Le tribunal a finalement condamné Mohamed Sekkil, 23 ans, à 4 ans de prison ferme et Omar Hassak, 23 ans également, à 30 mois de prison dont 10 avec sursis. Ayant déjà effectué 20 mois de détention provisoire, ce dernier est reparti libre du tribunal. Deux prévenus, déjà incarcérés, en reprennent pour dix mois chacun. Deux autres sont relaxés. Le reste de l’équipe est remis en liberté, soit parce que leur détention provisoire couvre la durée de leur condamnation, soit parce qu’ils écopent d’une peine avec sursis simple. Tous sont en revanche interdits de séjour à Guénange.
O.M. (Le Républicain Lorrain)