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Tapage : deux voisins face au juge


La bagarre a dégénéré à tel point qu'un des voisins a dû passer la serpillère pour effacer les traces de sang. (Photo : archives lq/Fabrizio Pizzolante)

Fin mars 2018, un sexagénaire voulait que son jeune voisin respecte le silence nocturne. Énervé, il est descendu le voir. La soirée s’est terminée en véritable rixe. L’épilogue, c’était lundi matin devant le tribunal correctionnel.

À les voir assis côte à côte sur le banc des prévenus, cravate et chemise blanche, difficile d’imaginer l’agressivité, la violence et l’acharnement qu’il a pu y avoir entre ces deux hommes il y a deux ans. Ils ont respectivement 31 et 67 ans. Voisins dans une résidence, située boulevard Grande-Duchesse-Charlotte dans la capitale, ils n’y sont pas allés de main morte, ce soir du 23 mars 2018. Leur bagarre a dégénéré à tel point qu’un de leurs voisins a dû passer la serpillère le lendemain pour effacer les traces de sang…

Qui a porté le premier coup? Sur cette question, les versions divergent. Toujours est-il que le fameux soir, David, la trentaine, organisait une fête avec des amis. Une fête que son voisin sexagénaire du dessus, n’a visiblement guère appréciée. Importuné par les «bruits et rires», Paul finit par descendre. Et de s’approcher par l’extérieur de la terrasse avec les invités.

Coup de barre et t-shirt déchiré

«Je suis sorti affolé. J’ai reçu un coup de barre dans le dos. Mon t-shirt a été déchiré. Je me suis défendu comme j’ai pu…» Voilà ce que déclare David. Paul, pour sa part, affirme tout le contraire. Ce n’est pas lui qui aurait infligé le premier coup : «C’est David qui a bondi. Il m’a donné un coup de poing dans le visage.» Le sexagénaire conteste aussi avoir été armé d’une barre de fer. «Je suis descendu avec ce qui me sert de canne», relate celui qui ne cache pas avoir eu quelques problèmes de sommeil à cause de son nerf sciatique à l’époque.

Mais l’altercation était loin d’être terminée. Le raffut s’est ensuite déporté sur le palier. Effrayé par les bruits tardifs, un couple voisin déclare avoir ouvert sa porte d’appartement et aperçu Paul «très excité, avec un objet métallique allongé» proférer des insultes. Les époux constatent également que la porte de l’appartement du fêtard est endommagée. Et puis ils voient le duo se précipiter vers l’étage. C’est là, où David s’est littéralement acharné sur Paul, si l’on suit le témoignage d’un troisième voisin. «Le voisin du rez-de-chaussée était agenouillé sur mon voisin de palier qui l’assénait de coups violents. J’ai dû employer une certaine force pour le dégager.»

Hématomes, points de suture, égratignures…

Face au juge, lundi matin, David concède : «J’ai eu peur pour mes invités. Je suis monté pour savoir pourquoi il avait endommagé ma porte. À l’étage, j’ai essayé de discuter… Une altercation s’en est suivie. Je me suis défendu comme j’ai pu.»

Une version que Paul conteste fermement : «Je n’ai pas donné de coups. J’ai essayé de le repousser.» «Ce n’est vraiment pas mon genre. Mais quand vous êtes en dessous de quelqu’un qui vous massacre…», dira encore le sexagénaire. Il n’a pas apprécié le témoignage du couple le décrivant «en petite tenue – slip et maillot de corps» : «Cette histoire n’est pas absolument pas vraie.» «C’est n’est qu’un détail dans cette affaire», remarquera le juge.

Secours et police avaient été appelés sur les lieux. Si le sexagénaire a terminé avec deux points de suture et quelques hématomes, le trentenaire s’en est sorti avec quelques égratignures, un t-shirt déchiré et sa montre Patek Philippe cassée.

À tour de rôle, les avocats des deux prévenus ont plaidé l’acquittement de ces coups et blessures volontaires, invoquant la légitime défense : «Si on est roué de coups, on est en droit de se protéger et de se défendre.»

Le parquet partage un autre point de vue dans cette affaire. «Pour moi, il n’y a ni légitime défense ni provocation. Chaque prévenu a enchaîné sur l’agressivité de l’autre.» Sa représentante réclamera au final six mois de prison et une amende contre les deux hommes sans casier judiciaire. Les deux prévenus se sont constitués parties civiles et réclament des dommages et intérêts. Le propriétaire de l’appartement dont la porte a été esquintée réclame le dédommagement, soit quelque 1 000 euros et des poussières. Que cela ait eu lieu à l’aide d’un trépied ou d’un simple coup de main comme le prétend Paul, peu importe, elle a dû être réparée.

La 18e chambre correctionnelle rendra son jugement le 19 mars.

Fabienne Armborst