Le cas de Raymond, suspecté d’avoir tué son épouse pendant son sommeil, reste nimbé de mystère. Les enquêteurs ne peuvent se livrer qu’à des spéculations pour reconstituer les faits.
Raymond, 70 ans, est suspecté d’avoir tué son épouse pendant son sommeil durant la nuit du 7 au 8 novembre 2021 dans leur appartement de Differdange. Ce mercredi après-midi, au quatrième jour de son procès, la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg a cherché à comprendre comment les faits avaient pu se dérouler. Le prévenu jure ne pas se souvenir d’avoir tué sa femme. Il dit s’être réveillé au petit matin et l’avoir trouvée sans vie à ses côtés. La seule explication plausible pour son geste serait qu’il ait été guidé par des voix ou des défunts qui lui apparaîtraient à divers moments de sa vie.
Dans ces conditions, difficile de dégager un mobile et de comprendre comment l’auteur du crime a bien pu s’y prendre. Les enquêteurs et les magistrats ne peuvent que spéculer à partir des éléments de l’enquête. Les amis et connaissances du couple interrogés par les policiers auraient du mal à imaginer Raymond capable d’un tel acte, alors qu’il se serait toujours montré très concerné par les ennuis de santé de son épouse. Le couple n’aurait certes pas été parfait, mais aucune de ces personnes ne comprendrait pourquoi il aurait pu agir de la sorte.
Une amie du couple aurait pourtant indiqué à une enquêtrice que Raymond qui, aurait déjà fait trois tentatives de suicide, a pu vouloir se suicider et n’a peut-être pas voulu partir seul. En 2012, déjà, il aurait tenté de tuer son épouse en l’étouffant. «Il lui aurait dit vouloir la délivrer de ses problèmes aux hanches et la suivre peu de temps après», a précisé l’enquêtrice mardi.
L’affaire semble être aussi complexe que le caractère du prévenu tel qu’il est décrit par les experts psychiatres psychologues et psychiatres ainsi que par ses proches. Reste que même si lui fait diversion avec ses nombreuses lettres et récits paranormaux, les médecins et policiers intervenus sur les lieux du crime ont tous conclu à une mort suspecte. De même, Raymond est l’unique auteur présumé. Mercredi, un commissaire en chef de la police technique a expliqué ne pas avoir trouvé de traces d’effraction sur la porte de l’appartement du couple.
De pures spéculations
Les faits se seraient donc déroulés dans un huis clos entre un mari et une épouse. Le seul autre être vivant dans les lieux cette nuit-là étant le chien. Les policiers sont entrés dans un domicile propre et bien rangé, loin des scènes de crime empreintes de tumulte auxquelles ils seraient habitués. Le commissaire en chef aurait immédiatement aperçu une trace laissée par une dent sur la lèvre de la victime et une égratignure sur son nez qui auraient fait naître les premiers soupçons dans son esprit. Les marques internes révélées par l’autopsie les confirmeront : quelqu’un a exercé une forte pression sur le visage et le torse de la victime, ce qui a entraîné son étouffement.
À la question de savoir comment l’auteur a procédé et pourquoi la victime ne s’est pas débattue – aucune blessure de défense n’a été trouvée sur sa dépouille et elle n’avait pas pris de somnifères – on ne peut répondre que par de pures spéculations. «Nous n’avons que des explications plausibles, a noté l’enquêteur. Tout ce que nous savons avec certitude, c’est qu’une pression importante a été exercée sur le visage et le haut du corps de la victime.» Le premier substitut du procureur, Laurent Seck, avait suggéré que le prévenu avait pu s’asseoir sur son épouse et lui avoir passé un sac en plastique sur la tête tandis qu’elle était prisonnière de la couette.
«Il y a tellement d’inconnues, a estimé le policier. L’utilisation des sacs en plastique n’est que spéculation.» De même que les enquêteurs ne peuvent que spéculer sur ce qui a été utilisé pour exercer cette pression. L’auteur présumé s’est-il servi de ses mains, d’un oreiller, d’une serviette éponge? Lui seul le sait. L’arme du crime n’a pu être retrouvée. Le policier explique que de manière naturelle et logique l’ADN du couple se trouve partout dans l’appartement et qu’ils ont pu passer à côté. L’enquêtrice a, quant à elle, rappelé que le prévenu aurait confié à son fils que la victime se serait couchée avec une serviette mouillée sur le visage et un sac en plastique par-dessus.
L’énigme reste entière. Cet après-midi, le fils et la sœur du prévenu seront appelés à la barre pour témoigner.
Sophie Kieffer