Par un concours de circonstances, en appel, Daniel risque d’écoper d’une peine plus lourde que celle prononcée en première instance pour vol et séquestration notamment.
«Si vous estimez que pour deux gifles et une dispute, je mérite de ne pas voir ma famille pendant aussi longtemps, alors…» Daniel est dépité. Lundi, face à la cour d’appel, il a essayé d’obtenir une réduction de la peine prononcée par les juges de première instance à son encontre. Manque de chance, son casier judiciaire international qui avait échappé aux premiers juges est arrivé entre les mains de la cour d’appel, lui ôtant, au vu des nombreuses condamnations y figurant, toute chance de bénéficier d’un sursis. Si en première instance, il avait écopé d’une peine de 12 ans de prison dont la moitié avec sursis, alors que 17 ans avaient été requis, l’avocat général a, cette fois, requis une peine de 9 ans ferme. Si la cour venait à les confirmer, le prévenu aurait perdu au change.
Daniel aurait séquestré un septuagénaire à Esch-sur-Alzette en décembre 2019 pour lui voler sa carte de crédit. Faits qu’il nie toujours après avoir passé 18 mois en prison. «Je n’ai jamais séquestré cette personne. Ce monsieur avait quelque chose contre moi à cause d’une femme», explique le Roumain. Pour lui, la victime voulait l’écarter pour pouvoir pleinement jouir de la présence de l’amie du prévenu. «Il s’agit d’une relation complexe entre trois personnes, argue son avocat. La victime profitait de la petite amie de Daniel qui en a eu assez.» Selon lui, la victime aurait mis en scène la séquestration. Il aurait profité des faiblesses de personnes dans la rue à qui il offrait l’hospitalité, et aurait menti. Il serait d’ailleurs connu pour payer des jeunes femmes qu’il recueillait en échange de prestations sexuelles. Il les aurait également fait poser pour des photographies pornographiques.
Le septuagénaire était peut-être un personnage particulier, selon l’avocat général, mais il n’en aurait pas été moins vulnérable. «Le prévenu a utilisé son amie pour charmer des personnes vulnérables et se jouer de leur misère sexuelle pour se servir» dans leurs richesses. L’acte est crapuleux, indique-t-elle, remettant en question les théories élaborées par la défense qui demande l’acquittement sur base d’une défense à charge, d’un droit à la défense violé, de l’absence d’analyses ADN et d’un doute certain quant aux intentions du prévenu ce soir-là.
«Dieu m’a ouvert les yeux»
Ce dernier a, dans un premier temps, indiqué vouloir récupérer 120 euros confiés par sa maman à son amie. Elle aurait remis l’argent à la victime qui ne l’avait plus, selon le trentenaire. La victime, toujours selon lui, lui aurait confié sa carte de crédit pour qu’il aille retirer l’argent. Le prévenu se serait trompé de banque et serait revenu au domicile du septuagénaire. Si la victime s’était sentie en danger, elle aurait pu en profiter pour prévenir de l’aide. Entretemps, des coups ont plu et la victime a été ligotée – ce que conteste Daniel, sous l’emprise d’alcool et de stupéfiants au moment des faits, selon son propre aveu.
Il lui aurait donné deux gifles. «Il est tombé», répond-il à la présidente de la cour d’appel qui ne croit pas à cette version. «Une gifle ne fait pas cet effet», lui répond-elle en lui montrant des photos de la victime, le visage tuméfié et les yeux au beurre noir. «Je l’ai giflé!», insiste Daniel. «Il ne faut pas être médecin pour se rendre compte que ce n’est pas le cas», rétorque la présidente. «Je regrette», finit par lâcher Daniel. «Oui, je l’ai frappé. Je demande pardon. Il m’a provoqué. J’ai trouvé une photographie de nu de mon amie avec qui je vivais depuis cinq ans, chez la victime. Je pensais qu’elle ne faisait que le ménage. Toutes ces années n’ont été qu’un mensonge…»
La voix cassée, encadré par deux policiers plus grands que lui, Daniel fait tout pour apitoyer ses juges peu crédules. Un procès-verbal de la police datant du 27 juin 2019 rapporterait une affaire similaire à celle qui occupait la cour d’appel. La preuve que Daniel et son amie avaient «un mode opératoire dans lequel la jeune femme offrait ses charmes à des vieux messieurs pour leur soutirer de l’argent». La jeune femme, qui n’a pas été entendue par les juges, aurait été l’instigatrice de cette rencontre, indique Daniel, «Elle m’a causé beaucoup de problèmes. Je ne veux plus la voir (…) Je remercie Dieu de m’avoir ouvert les yeux.» Le jeune homme jure vouloir refaire sa vie. La question est dans combien de temps. Prononcé le 14 juillet.
Sophie Kieffer